Le ventre de Belo Horizonte
Les élus municipaux ont entrepris de contrer le phénomène à l'aide d'une série de mesures audacieuses, toutes inspirées par ce principe fondamental que le droit à la sécurité alimentaire est aussi inaliénable que le droit à la dignité, que ce dernier est en quelque sorte conditionnel à la réalisation du droit à une alimentation de qualité. Pour que la situation change, la ville a choisi d'assumer elle-même la responsabilité de nourrir ses citoyens défavorisés.
Il fallait tout d'abord mettre en place des mécanismes pour assurer la production et l'approvisionnement aux prix les plus bas possibles. Pour y parvenir, la ville a octroyé une quarantaine de parcelles de terres en périphérie de la zone urbaine à des producteurs agricoles. Ceux-ci approvisionnent des marchands qui louent à des tarifs préférentiels des emplacements fournis par la ville, en plein coeur des zones défavorisées. En favorisant l'essor d'une agriculture péri-urbaine, de proximité, en éliminant les intermédiaires habituels du libre marché qui accaparent une part importante du prix de vente au détail, non seulement les citoyens, mais aussi les hôpitaux, les écoles et les acheteurs institutionnels peuvent se procurer une vaste gamme de denrées de bases à des prix correspondant à 50% des prix du marché.
340 000 citoyens bénéficient des programmes supervisés par le SMAB (Secretaria Municipal de Abastecimendo); 10 000 familles reçoivent à chaque mois 2 kilos de farine enrichie de lait, de poudre d'écailles d'oeuf et de feuilles de manioc.
Le SMAB a également ouvert une série de centres agro-écologiques qui diffusent de l'information sur les pratiques agricoles écologiquement viables, et encouragé la création d'une centaine de jardins communautaires et en milieu scolaire. Il est assez remarquable que la facture pour l'ensemble des mesures du programme de sécurité alimentaire représente moins de 1% du budget de la ville.
De l'avis d'Adriana Aranha, une des responsables du SMAB, la plus grande réussite du programme de sécurité alimentaire de Belo Horizonte, aujourd'hui cité en exemple par l'UNESCO, aura été de faire mentir le préjugé tenace que les administrations municipales et les gouvernements sont inefficaces et de mauvais administrateurs et qu'il est préférable de s'en remettre aux forces libres du marché.
Source : FRANCES MORE LAPPE, Hope's Edge (2002) et UNESCO