La science victime d’elle-même : en marge de la manifestation mondiale de Stop 5G du 26 septembre 2020
Science trop bavarde est ruine de l’âme, dirons-nous pour paraphraser Rabelais.
La première victime de cette nouvelle déferlante technologique (5G) et de la contestation qu’elle suscite ce sera, c’est déjà la science. À force de prendre appui sur elle précipitamment et â tâtons pour promouvoir ou contester une innovation technologique, on lui fait perdre son autorité. Science trop bavarde est ruine de l’âme, dirons-nous pour paraphraser Rabelais. Quand faut-il la convoquer, pourquoi et comment? Pour être en droit de réclamer des légumes cultivés par mes voisins, ne suffit-il pas que je préfère leur saveur à celle des légumes importés de Californie? Si je mise sur la science pour obtenir gain de cause, je risque fort de me heurter à un adversaire assez riche pour acheter sur le marché de la recherche des résultats servant ses intérêts. Selon une source fiable,[i] d’ici 2025, on investira 2 700 milliards dans le 5G, on installera des tours à tous les coins de rue, les réseaux consommeront 20% de l’énergie disponible, on placera en orbite au moins 50 000 nouveaux satellites, 100 000 peut-être, tout cela pour mieux surveiller les insectes humains et mettre les camionneurs au chômage. J’oubliais l’essentiel : grâce au 5G, des puces installées dans mon frigo achèteront du lait en cas de besoin et un drône en assurera la livraison. Ai-je vraiment besoin de m’appuyer sur la science pour exiger qu’on ralentisse ce déferlement ?
Dans leur protestation contre le 5G, de nombreux groupes de pression misent sur le danger pour la santé, danger qu’ils demandent à la science de démontrer. Un seul article de fond dans Atlantic[ii] ébranle leurs thèses les plus solides. Cette revue appartenant au patron d’Amazon, Jeff Besos, l’homme au monde qui tirera le plus d’avantages du 5G, on a des réserves sur les mobiles de l’auteur de l’article, mais le doute est entré dans l’esprit du lecteur, alors qu’il n’avait pas besoin de l’argument de la santé pour fonder son choix.
Il y a science et science. Ce que je dénonce ici ce n’est pas la science pure, désintéressée discrète, consciente de ses limites, mais celle, bavarde, qui est utilisée comme instrument inapproprié pour la promotion comme pour la contestation de la technologie. Dans le cas du 5G, comme dans celui, connexe, du dérèglement climatique, il suffit, pour faire des choix éclairés, de posséder des connaissances élémentaires et incontestables sur le cycle du carbone et de les associer à l’idée de mesure, inscrite dans la nature. Comment pourrait-on, sans risques majeurs brûler en un an ce que la vie a mis des centaines de milliers d’années à enfouir dans le sol ?
[i] https://newsvoice.se/author/olle/
[ii] https://www.theatlantic.com/technology/archive/2020/05/great-5g-conspiracy/611317/