Quand la misère chasse la pauvreté
Jeudi le 15 janvier 2004
Le sort des miséreux dans les sociétés économicisées rappelle à bien des égards celui de ces personnages embarqués à bord de vieux bateaux surchargés qui font naufrage et à qui des organisations d'assistance lancent des bouées de sauvetage. C'est ce genre d'opération qui est souvent qualifié d'aide aux pauvres ou de lutte contre la pauvreté. Le malheur est que plus on arrive à sauver quelques naufragés, plus les personnes qui assistent à l'opération ont tendance à oublier tout ce qui a précédé et causé le naufrage. L'existence reconnue de 4 milliards de personnes sur terre dont le revenu journalier est inférieur à 2 dollars par jour constitue bien la preuve selon laquelle les immenses "progrès" économiques et technologiques n'ont abouti qu’à une augmentation sans précédent du nombre de ces naufragés.
Dans ces conditions, il ne suffit pas seulement de laisser les pauvres tranquilles, mais de réaliser en même temps que la course à la croissance économique n’est pas la réponse à leur «problème». Elle est elle-même le problème qu’il faudra enfin oser d’aborder sans peur ni préjugé.
Conférence prononcée à l'occasion du colloque Philia 2003.