Aristote
Dans son Introduction à l'esprit de la philosophie ancienne (Louvain-Paris, Éditions Peeters, 1997), l'historien de la philosophie Jacques Follon consacre un chapitre à Aristote et au Lycée, l'école qu'il a fondée.
L'historien résume bien l'essentiel de celui qui «est, avec Platon, le plus grand philosophe de l'Antiquité». Définissant la philosophie comme étant essentiellement la connaissance des causes premières, Aristote fut celui qui effectivement amena un progrès réel dans l'étude de ces causes par les savants de l'époque, en énonçant la théorie des quatre causes (matérielle, formelle, motrice, finale).
Dans son Éthique à son fils Nicomaque, celui que l'on a surnommé Le Philosophe distingue trois sortes de vies : « la vie de plaisir, la vie politique et la vie contemplative ». Privilégiant la dernière, Aristote en montre le caractère mixte, soumis à l’exigence que la pensée soit suivie de l'action.
Son étude fondatrice de différentes disciplines telles la logique et la biologie, de même que sa réflexion sur les différents régimes politiques achèvent de nous convaincre du rôle unique qu'a eu ce précepteur d'Alexandre le Grand dans l'histoire de la pensée occidentale latine et tout autant dans la science arabe.
Le réalisme d'Aristote
On qualifie généralement la philosophie d'Aristote de réaliste. Pour bien saisir la portée de ce jugement, il faut tenir compte de précisions comme celles-ci, de Gilbert Romeyer Dherbey, « On résume souvent par le mot de "réalisme" l'inspiration de la pensée d'Aristote, réalisme "naïf" ajoutent certains naïfs pour désigner une pensée parfaitement au fait de ses présupposés. Mais si le réalisme se définit comme visée du réel, il se trouve affecté d'une énorme ambiguïté puisque la réalité est ce que tente d'exprimer toute philosophie. Une inspiration philosophique va donc se caractériser par le lieu particulier où elle invente de situer ce réel énigmatique; si Aristote ramène la philosophie du ciel sur la terre c'est parce que, refusant de voir ce réel dans un monde idéal séparé, il veut lire l'essence dans les choses de ce monde, les pragmata. Le recours ici fait, à travers la pensée d'Aristote, au sens ancien de pragma vise à revaloriser la notion de chose, à lui redonner l'ampleur qu'elle a perdue en se bornant à désigner de nos jours l'objet simplement inerte ». (Les choses mêmes, La pensée du réel chez Aristote. Dialectica, L'Âge D'Homme, Lausanne, 1983).
Enjeux
La métaphysique d'Aristote fut longtemps l'horizon de tout événement scientifique; sa théorie du Ciel domina jusqu'à la Renaissance, sa physique élémentariste (eau, air, terre, feu), jusqu'à la fin du XIXe siècle. Reste sa psychologie dont plusieurs aspects ne sont pas encore contredits par la science moderne (localisation précise de l'âme et de l'intellect, distinction entre les facultés et les organes, etc.). Par ailleurs, la formulation par Aristote de l'existence d'une cause motrice pour expliquer le changement continue de tracer toute expérience possible de l'observation scientifique du réel, avec l'exception récente de la physique quantique. Plusieurs principes et paradigmes de la démarche aristotélicienne et de ses nombreux continuateurs conditionnent, encore aujourd'hui, nos représentations empiriques ou scientifiques, notamment dans le domaine du Vivant.