Exemples de résilience
En novembre 1963, une explosion volcanique fait apparaître l’île de Surtsey, dernière née des Vestmannaeyjar, à 40 kilomètre de la côte sud d’Islande. En 1967, le volcan essoufflé, on assiste en direct à la naissance d’un écosystème. Les conditions ambiantes de ce petit monde de 2.7km carrés, entièrement désert, stérile et isolé, balayé par des vents furieux 200 jours par année et régulièrement lessivé par des vagues de fond qui peuvent atteindre 25 mètres de haut, sont tout ce qu’il y a de moins propice à la reconstruction de la vie. Et pourtant, en quelques années, les oiseaux de mer --fulmars, guillemots et goélands, s’y installent. Les mousses et les salines apportées par le vent, la mer et les oiseaux commencèrent par former un substrat capable de retenir le sable charrié par la mer et les déchets organiques des colonies d’oiseaux nichés sur les falaises, formant en quelques décennies un sol suffisamment riche pour qu’une végétation diversifiée, comparable à celle que l’on retrouve en Islande, s’installe dans les secteurs les mieux protégés des éléments. Des mouches et des insectes, portés par les vents ou par les oiseaux, s’installèrent, occupant de minces niches écologiques que leur propre activité contribue à élargir. On y retrouve aujourd’hui, après 30 ans, un écosystème équilibré, qui couvre presque l’ensemble de l’île, où l’on a répertorié 45 types de plantes différentes, 7 espèces d’oiseaux nicheurs et au delà de 30 espèces visiteuses.
Pour plus d’informations sur Surtsey :
http://www.geocities.com/athens/cyprus/8960/surtsey_volcano.html
http://128.95.16.3:80/people/students/throstho/vinna/surtsey/nytt_surtsey.html
Résilience à Krakatoa
Les 26 et 27 novembre 1883, le plus grand bruit jamais entendu mit la planète terre en état de choc: à 600 kilomètres de distance, le bruit produit par l’éruption du Krakatoa, près de Java, rappelait un coup de canon. Dans l’océan indien, 4,500 kilomètres plus loin, on entendit des grondements. 20 kilomètres cubes de roches furent projetés dans l’atmosphère. Une colonne de fumée s’éleva jusqu’à 26 kilomètres d’altitude.
Trois îles, dont les restes de l’île hôte du Krakatoa, furent totalement recouvertes de lave. On n’y décela plus la moindre trace de vie, pas même un brin d’herbe. Neuf mois plus tard, une expédition française découvrit un seul et unique signe de vie: une araignée qui avait atteint l’île sur un ballon de soie.
Cette araignée annonçait l’avenir. Cent ans plus tard, les trois îles mortes étaient recouvertes d’une forêt tropicale et abritaient 400 espèces de plantes, des milliers d’espèces d’arthropodes dont 54 espèces de papillons, 30 espèces d’oiseaux, 17 espèces de chauvessouris et 9 de reptiles. Et tous ces êtres vivants durent franchir une barrière de 44 kilomètres d’eau de mer pour atteindre leur destination. Sur quels radeaux improvisés par la nature certains d’entre eux ontils dû voyager?
Tel oiseau apporta telle graine qui devint un arbre fruitier, tel reptile arriva sur un tronc d’arbre à la dérive. Tout ce que l’on peut dire avec certitude, c’est qu’il y eut une multitude de petits événements de ce genre qui, tels des sons égarés et rassemblés par le génie d’un compositeur, ont constitué à la longue un ensemble vivant symphonique. Et c’est la vie seule qui a créé la vie, la raison humaine n’étant pas intervenue pour en accélérer la propagation.
Pour en savoir plus:
Ian Thornton
Krakatau, The Destruction and reassembly of an Island Ecosystem
Harvard University Press, 1999
LE TARDIGRADE
« [...] les phénomènes d’anabiose ne manquent pas de surprendre: il s’agit d’une sorte de "résurrection" succédant à la disparition apparente de tout métabolisme. Le cas le plus célèbre est celui des tardigrades, petits animaux noirâtres, lesquels, vivant dans les mousses sur les toits, n’ont rien de bien remarquable à première vue, sauf leur emplacement incertain dans la classification, puisqu’ils tiennent des insectes et des araignées, sans être ni l’un ni l’autre. En revanche, du point de vue physiologique, ils présentent une particularité considérable; lorsqu’on les laisse se dessécher dans une atmosphère rigoureusement privée d’humidité, ils se transforment en peu de temps en une minuscule paillette noirâtre où même le microscope ne reconnaît plus aucune texture cellulaire. On peut les conserver dans cet état pendant une année et plus. Si alors on les place sur une feuille de papier humide, il ne faut que quelques minutes aux tardigrades pour réabsorber l’eau et s’enfuir. Mais Rahm est allé plus loin. Il a placé ces animaux desséchés dans un tube hermétiquement clos rempli d’un gaz inerte, ou encore dans le vide. Après plusieurs années, les tardigrades, remis en présence d’eau, se regonflent et reviennent à la vie. Rahm plaça alors ses sujets dans l’air liquide à moins 190 pendant 25 heures et enfin à moins 272, à un degré du zéro absolu, pendant 3 heures et sans les tuer.»
LouisVincent Thomas, L’anthropologie de la mort,Payot, Paris, 1975 p. 72