La Grèce sauvée par une mine

Plutarque
Sur le territoire de L'Attique, dans ce qu'on pourrait appeler la grande Athènes, il y avait, au Mont Laurion, des mines d'argent, uniques en leur genre dans toute la Grèce antique, qui eurent une influence déterminante sur le destin de cette région et par là sur l'histoire de l'Occident. C'est en effet grâce aux revenus tirés de ces mines que les Athéniens purent construire la flotte qui leur permit de résister à la grande offensive navale des Perses, dans ce qui devait être le dernier épisode des guerres médiques, la bataille de Salamine.
Les Athéniens regardaient la défaite des Barbares à Marathon comme la fin de la guerre; mais Thémistocle pensait au contraire qu'elle n'était que le prélude de plus grands combats; prévoyant de loin les événements, il se préparait à cet avenir pour assurer dès lors le salut de la Grèce, et il y disposait ses concitoyens.
V. Dans cette vue, sa première démarche fut d'oser, seul, proposer aux Athéniens d'affecter à la construction de galères à trois rangs de rames le produit des mines d'argent de Laurion, dont ils étaient dans l'usage de se partager les revenus. Cette nouvelle destination devait leur fournir les moyens de résister aux Éginètes, qui, maîtres de la mer qu'ils couvraient de leurs nombreux vaisseaux, faisaient à la Grèce la guerre la plus redoutable qu'elle eût alors à soutenir. Ce fut par ce motif qu'il détermina facilement les Athéniens à ce sacrifice, et non par la crainte de Darius et des Perses, alors trop éloignés, et dont on appréhendait peu le retour. Thémistocle, pour engager les Athéniens à faire ces préparatifs, sut réveiller à propos leur jalousie et leur ressentiment contre les Éginètes. On construisit, avec l'argent des mines, cent galères, qui combattirent dans la suite contre Xerxès. Dès ce moment il tourna les vues des Athéniens du côté de la mer, et sut les amener à former une marine considérable, en leur montrant que sur terre ils n'étaient pas en état de résister même à leurs voisins; au lieu qu'avec des forces maritimes ils pourraient repousser les Barbares et commander au reste de la Grèce. Mais par là, suivant Platon, il changea d'excellentes troupes de terre en matelots et en gens de mer; et il mérita le reproche d'avoir arraché aux Athéniens la pique et le bouclier, pour les réduire au banc et à la rame. Miltiade, au rapport de Stésimbrote, était d'un avis contraire à celui de Thémistocle; mais enfin ce dernier l'emporta.

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