Mélancolie
Lundi le 12 août 2002
Article "Mélancolie" paru dans l'Encyclopédie publiée sous la direction de Diderot et d'Alembert.
C’est le sentiment habituel de notre imperfection. Elle est opposée à la gaieté qui naît du contentement de nous-mêmes : elle est le plus souvent l’effet de la faiblesse de l’âme et des organes : elle l’est aussi des idées d’une certaine perfection, qu’on ne trouve ni en soi, ni dans les autres, ni dans les objets de ses plaisirs, ni dans la nature; elle se plaît dans la méditation qui exerce assez les facultés de l’âme pour lui donner un sentiment doux de son existence, et qui en même temps la dérobe au trouble des passions, aux sensations vives qui la plongeraient dans l’épuisement. La mélancolie n’est point l’ennemie de la volupté, elle se prête aux illusions de l’amour, et laisse savourer les plaisirs délicats de l’âme et des sens. L’amitié lui est nécessaire, elle s’attache à ce qu’elle aime, comme le lierre à l’ormeau. Le Féti la représente comme une femme qui a de la jeunesse et de l’embonpoint sans fraîcheur. Elle est entourée de livres épars, elle a sur la table des globes renversés et des instruments de mathématiques jetés confusément : un chien est attaché aux pieds de sa table; elle médite profondément sur une tête de mort qu’elle tient entre ses mains. M. Vien l’a représentée sous l’emblème d’une femme très-jeune, mais maigre et abattue : elle est assise dans un fauteuil, dont le dos est opposé au jour; on voit quelques livres et des instruments de musique dispersés dans sa chambre, des parfums brûlent à côté d’elle; elle a sa tête appuyée d’une main, de l’autre elle tient une fleur, à laquelle elle ne fait pas attention; ses yeux sont fixés à terre, et son âme toute en elle-même ne reçoit des objets qui l’environnent aucune impression.