Napoléon Bonaparte
Fin stratège militaire et politique, Bonaparte créera une commission qui rédigera un code civil qu'il implantera partout en Europe. Il tentera d'établir alliances et ententes avec les empereurs d'Autriche, de Prusse, de Russie ainsi qu'avec les rois d'Angleterre, d'Espagne et d'Italie.
Le non-respect de celles-ci par les dirigeants étrangers poussèrent Napoléon à envahir certains pays. Le stratège préférait les atteindre chez eux, en les prenant moins préparés à la défense sur place qu'à l'attaque développée vers l'étranger français.
L'Empereur aimera autant la politique que la stratégie militaire. Il interviendra pour la création d'institutions politiques (préfectures, conseil d'État, cours de justice, construction d'écoles pour l'instruction du peuple). Il créera la Légion d'Honneur, des écoles militaires, des systèmes de défense destinés éviter l'invasion de l'Europe par l'Angleterre.
Il fut considéré:
- — comme un ogre et un tyran tortionnaire par l'Angleterre et l'Espagne,
— comme un indécis face au mode d'existence de leur pays par la Pologne, l'Autriche, l'Italie,
— comme un allié intéressant mais embêtant par la Russie, la Suède, la Belgique et même,
— comme un bienfaiteur par l'Égypte, ou par les États-Unis auxquels Napoléon aura gracieusement donné la Louisiane.
Les Français auront aimé leur empereur. Homme certes génial, il aura permis à la France de passer de l'instabilité d'une époque révolutionnaire à l'établissement des lois et institutions républicaines qui subsistent encore aujourd'hui.
Jugements sur Napoléon
MME DE STAËL
«Lorsque Napoléon a établi le despotisme en France, les circonstances étaient favorables à ce dessein; on était lassé de troubles, on avait peur des maux horribles qu' on avait soufferts, et que le retour des mêmes factions pouvait ramener; d'ailleurs, l'enthousiasme public était tourné vers la gloire militaire; la guerre de la révolution avait exalté l'orgueil national. L'opinion, au contraire, sous Louis XVI, ne s' attachait qu'aux intérêts purement philosophiques; elle avait été formée par les livres, qui proposaient un grand nombre d'améliorations pour l'ordre civil, administratif et judiciaire; on vivait depuis longtemps dans une profonde paix; la guerre même était hors de mode depuis Louis XVI. Tout le mouvement des esprits consistait dans le désir d'exercer des droits politiques, et toute l'habileté d' un homme d'état se fondait sur l'art de ménager cette opinion.» (Considération sur les principaux événements de la Révolution française)
CHATEAUBRIAND
«Après l'adoption du Concordat par le Corps législatif en 1802, Lucien, ministre de l'intérieur, donna une fête à son frère; j'y fus invité, comme ayant rallié les forces chrétiennes et les ayant ramenées à la charge. J'étais dans la galerie, lorsque Napoléon entra: il me frappa agréablement; je ne l'avais jamais aperçu que de loin. Son sourire était caressant et beau; son oeil admirable, surtout par la manière dont il était placé sous son front et encadré dans ses sourcils. Il n'avait encore aucune charlatanerie dans le regard, rien de théâtral et d'affecté. Le Génie du Christianisme, qui faisait en ce moment beaucoup de bruit, avait agi sur Napoléon. Une imagination prodigieuse animait ce politique si froid: il n'eût pas été ce qu'il était, si la muse n'eût été là; la raison accomplissait les idées du poète. Tous ces hommes à grande vie sont toujours un composé de deux natures, car il les faut capables d'inspiration et d'action : l'une enfante le projet, l'autre l'accomplit.» (Mémoires d'outre-tombe, voir cet extrait)
«La république de Washington subsiste; l'empire de Bonaparte est détruit. Washington et Bonaparte sortirent du sein de la démocratie: nés tous deux de la liberté, le premier lui fut fidèle, le second la trahit.» (Mémoires d'outre-tombe, voir cet extrait)
GEORGES SOREL
«Il est certain que Napoléon n'a pas eu un effort extraordinaire à accomplir pour remettre le pays sur un pied monarchique. Il a reçu la France toute prête et n'a eu qu'à faire quelques corrections de détail pour profiter de l'expérience acquise depuis 1789. [...] Le véritable mérite de Napoléon fut de ne pas trop se fier à son génie, de ne pas se laisser aller aux rêves qui avaient, tant de fois, égaré les hommes du XVIIIe siècle et les avaient conduits à tout vouloir régénérer de fond en comble, — en un mot, de bien reconnaître le principe de l'hérédité historique. Il résulte de là que le régime napoléonien peut être regardé comme une expérience mettant en évidence le rôle énorme de la conservation à travers les plus grandes révolutions. Je crois bien que l'on pourrait même étendre le principe de la conservation aux choses militaires et montrer que les armées de la révolution et de l'empire furent une extension d'institutions antérieures.» (Réflexions sur la violence, 1908, voir cet extrait)
STEFAN ZWEIG
« Balzac a exposé de façon imcomparable comment l'exemple de Napoléon a, en France, galvanisé toute une génération. Pour lui, l'ascension éblouissante du petit lieutenant Bonaparte, devenu empereur du monde ne signifiait pas seulement le triomphe d'une personne, mais une victoire de l'idée de jeunesse. ll n'était pas indispensable d'être né prince pour accéder de bonne heure à la puissance, on pouvait être issu de n'importe quelle famille modeste, voire pauvre, et en général à vingt-quatre ans, à trente ans souverain de la France et bientôt du monde entier. Ce succès unique arracha des centaines de jeunes gens à leurs petits métiers et à leurs petites villes de province : le lieutenant Bonaparte échauffa les têtes de toute une jeunesse.» (Le monde d'hier, Le livre de poche, 1993)