Islam

D'origine arabique, "Islam" signifie "abandon, soumission à la volonté de Dieu". Étymologiquement, il est apparenté au mot salam qui signifie paix.

Religion monothéiste, l'Islam est la religion révélée au prophète Mahomet (c. 570-632) par l'ange Gabriel. Mahomet est le "Dernier messager", de la lignée des prophètes bibliques, ceux de l'Ancien Testament, Adam, Abraham, Moïse, et Jésus dont les musulmans rejettent le caractère divin.

Le Coran
Le Coran regroupe sous forme de sourates (chapitres, au nombre de 114), les paroles divines, transmises au prophète par l'ange Gabriel au cours d'une période s'étalant sur 22 ans, qui dévoilent aux hommes le mystère (ghayb) de leur destin. D'après les fidèles, le Coran serait le livre définitif, celui qui vient après la Torah juive et l'Évangile chrétien.

On distingue deux périodes dans la transmission du message divin: la période de la Mecque, et celle de Médine. Les sourates de la première période qui reprennent dans plusieurs passages l'histoire des prophètes bibliques, rappellent aux hommes l'imminence du Jugement, à la suite duquel les fidèles d'Allah se retrouveront au paradis, alors que les mécréants et les riches infidèles seront précipités en enfer. Les sourates mecquoises affirment également le dogme fondamental de l'Islam: «Il n'y a pas d'autre divinité qu'Allah; ... il n'y a personne qui puisse se mesurer à lui», et instituent les pratiques obligatoires de la nouvelle religion: la prière et le respect de la zakat, une aumône légale qui vise la redistribution de la richesse entre riches et pauvres.

Devant l'hostilité des clans puissants, irrités par les prêches et les condamnations lancées à leur endroit par le prophète, Mahomet fut forcé de fuir la Mecque en 622, date qui marque le début du calendrier islamique, Il trouva refuge à Médine où il devait jouer un rôle d'arbitre entre les tribus locales. Les sourates de l'époque médinoise, d'un style moins poétique, moins apocalyptique, composent une loi morale, une constitution qui règle la vie des fidèles, les pratiques commerciales — le prêt à intérêt leur est désormais interdit —, et précise les rapports hiérarchiques entre les hommes et les femmes. Elles contiennent également de nombreuses prescriptions relatives à la vie religieuse et établissent le caractère obligatoire du pélèrinage et du jeune du ramadan.

L'historiographie soutient que Mahomet était analphabète et que contrairement aux commandements donnés à Moïse sous forme de tables gravées dans la pierre, le contenu du Coran fut transmis oralement au prophète, puis retranscrit par la suite par écrit, du vivant du prophète. Le mot "Qu'ran", tiré du texte sacré, peut d'ailleurs être traduit par "récitation". Pour s'assurer que les fidèles connaissaient bien les lois coraniques, on les enjoignaient — comme c'est encore le cas aujourd'hui — à réciter chaque sourate répétitivement, jusqu'à mémorisation complète du texte sacré.

Le Coran est complété par la Sira qui contient l'ensemble des paroles et actes de Mahomet. Les deux livres constituent les fondements de l'Islam. Le devoir du musulman est de chercher à travers l'étude scriptuaire de la Sunna, regroupant l'ensemble des traditions qui remontent jusqu'au prophète ou à ses compagnons, à en donner la meilleure interprétation pour établir la Charia, la loi orale équivalent à la Torah juive.

Les six éléments de la foi islamique
L'Islam est une religion ouverte à tous, sans égards à la race. Aucune autorité ne détermine l'entrée, ou l'expulsion, d'un fidèle au sein de la communauté des croyants. Il suffit d'accepter les dogmes fondateurs. La première condition est la récitation sincère de la chahada par laquelle on reconnait qu'«il n'y a pas d'autre divinité qu'Allah et que Mahomet est le messager d'Allah». Le croyant partage également les croyances suivantes:
— en Dieu (en arabe, Allah)
— les anges
— les Écritures saintes (le Coran, la Sira)
— les messagers de Dieu (Mahomet et tous les prophètes)
— le jour du Jugement
— que le bien et le mal sont issus de Dieu (en fait, le mal est le fait d'être entraîné hors du bien par le Diable)

Les cinq piliers de l'Islam
La récitation de la chahada ne suffit pas à conduire le fidèle au Ciel au terme de sa vie. Elle ne fait que le sortir de sa condition de réprouvé. Pour gagner le Ciel, le fidèle doit respecter les cinq obligations canoniques prescrites dans le Coran:
— la récitation sincère de la Chahada
— le récit quotidien (cinq fois par jour) de la prière (Salat)
— respecter la zakat (aumône obligatoire qui purifie les biens)
— observation du jeune du ramadan
— effectuer un pélerinage à la Mecque (Hadjdj).

Les communautés islamiques
Dans les communautés qui observent l'Islam, le pouvoir législatif n'appartient qu'à Dieu, qui est la vraie source de la loi. Par contre le pouvoir exécutif est exercé par un des auxiliaires du Prophète: le calife.

Le choix de ce dernier, qui souleva de graves controverses dès les débuts de l'Islam, est à l'origine des schismes qui ont divisé les musulmans en communauté rivales. En l'absence de prescriptions enchâssées dans le texte sacré sur la question de la transmission du pouvoir exécutif, la division s'installa entre Chiites (légitimistes), aux yeux desquels le califat devait être réservé «aux membres de la maison» de Mahomet, Sunnites (qui observent la Sunna) qui reconnaissaient l'autorité du calife en place, et les Karidjiites qui préconisaient le principe électif du califat qui devait être attribué au plus méritant d'entre tous.

Les Chiites qui représentent aujourd'hui 10% du monde musulman, se soumettent à un imam, qu'ils considèrent leur chef religieux et civil. La majorité des chiites, qui sont surtout présents en Iran et en Irak, croient que le dernier imam fut caché par Dieu et que l'Ayatollah Khomeini (l'ancien chef spirituel de l'Iran) fut peut-être même une incarnation de cet imam.

Les Sunnites représentent plus de 90% de la population islamique et leurs communautés sont regroupés autour d'un chef politique chargé de faire respecter l'autorité de Dieu, en s'appuyant sur les ulémas ou docteurs de la loi, à qui est confiée l'interprétation de la Charia.

À la suite des événéments terroristes récents qui ont creusé un fossé entre l'Occident chrétien et l'Orient musulman, les Chiites sont considérés, à tort selon certains spécialistes qui estiment qu'ils pratiquent une religion plus ouverte et plus tolérante que les Sunnites, comme l'aile extrémiste de l'Islam (les fous d'Allah iraniens ou les kamikazes du Hezbollah libanais.

Rôle et condition de la femme dans l'Islam
L'Islam n'empêche pas la femme de travailler, mais insiste avant tout sur ses rôles domestique et familial. L'interprétation dominante de la loi islamique interdit néanmoins aux femmes l'accès à des postes importants, notamment au sein de la fonction publique, interprétation qui prévaut encore aujourd'hui dans la plupart des pays musulmans.

Le Coran ne prescrit pas formellement le port du voile, mais indique que la femme, tout comme l'homme, ne devraient pas être l'objet du désir sexuel, C'est pour cette raison que la femme se recouvre dans plusieurs pays musulmans du voile (hijad) afin d'éviter de dévoiler des parties dénudées de son corps et d'exposer les hommes non «mahran» (qu'elle pourrait épouser) à la tentation. La question vestimentaire et du sort des femmes suscite de nombreux débats en Occident, mais la perception de la condition féminine par les musulmanes elles-mêmes diffère sensiblement de la nôtre. Pour certaines, «l'Islam loin dévaloriser la femme, lui accorde des privilèges par rapport à l'homme».




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L'apport de l'Islam à la culture universelle
«Notre dette à l'égard [de l'Islam] est énorme... [...]

Si l'on élargit l'éventail des fleurons culturels à l'ensemble du monde arabe (et persan, puisque les deux sphères se sont enrichies mutuellement), la liste des penseurs, philosophes, poètes, juristes, physiciens ou mathématiciens est impressionnante mais nous les connaissons peu : Saadi, Omar Khayyam, al-Ghazali, al-Khansa, Madjnoun Layla (le fou de Laïla), Djamil, Hafiz, ibn Sina (Avicenne), ibn Rushd (Averroès), Maïmonide (un médecin juif), al-Farabi, ibn Khaldoun (le premier sociologue, longtemps avant Auguste Comte ou Durkheim), etc. Arrêtons ici mais ajoutons par contre, et c'est une remarque capitale, que nombre de poètes étaient également juristes, mathématiciens et philosophes de premier ordre, témoignant par là de l'unicité du savoir et surtout du caractère poétique de ce savoir, c'est-à-dire créateur. On ne peut s'empêcher ici de se remémorer, quelques siècles et cultures plus tard, la formule géniale du psychologue suisse Jean Piaget : "comprendre c'est inventer".

La science était belle, inspirée et utile. On n'est pas bien loin de l'atmosphère de la Grèce antique et on peut même affirmer que sans l'école de traduction de Bagdad et la pléthore de commentateurs qui ont récupéré Platon, Aristote, Plotin et tout le néo-platonisme subséquent pour le transmettre ultérieurement à la Scolastique médiévale, l'Occident aurait oublié ses racines helléniques. Rappelons également que si Aristote était considéré comme le Magister primus, le Magister secundus était le très grand philosophe al-Farabi (v. 870-950), auteur par ailleurs de traités scientifiques et musicaux réputés. Et puisque nous évoquons la dette de l'Occident à l'égard de l'Orient, qui prouve bien que nous avons un solide fonds commun, n'oublions pas que Dante plaçait Saladin aux côtés d'Hector, d'Énée et de Jules César dans le panthéon des païens vertueux de sa Divine Comédie; n'oublions pas non plus que Frédéric II, empereur germanique du XIIIe siècle, apprit l'art de gouverner auprès des politiciens arabes et que Machiavel, trois siècles plus tard, était en contact avec les stratèges persans par l'entremise de Venise.

Qui s'est promené, ne serait-ce qu'en Andalousie, et a visité la Mezquita de Cordoue, cette magnifique cathédrale enchâssée dans une mosquée non moins somptueuse, ou encore les jardins et les céramiques de l'Alhambra de Grenade, sentira à quel point ce monde a vécu de beauté et d'harmonie. Harmonie dans tous les sens du terme et également sociale car les ahl al-Kitab, les gens du Livre, musulmans, chrétiens et juifs vivaient généralement en bonne intelligence, tous étant issus d'Abraham et Jésus étant reconnu comme un prophète par le Coran au même titre que Moïse. Il y a dans l'Alhambra une cour des Myrtes d'une douceur et d'un équilibre dont on ne retrouve d'aussi bouleversantes incarnations que dans la Grèce antique (le myrte, notons-le, symbolisait l'amour dans la mythologie grecque). On pense par association à ces vers ravissants du poète Djamil, mort en 701 de notre ère et dont l'inspiration amoureuse est une des plus tendres de la poésie arabe :
Ô Bathna, vous m'avez infligé un si long tourment,
que mon désir ferait pleurer sur moi les tourterelles…

Ou encore à ceux-ci de Hafiz, mort en 1388, le plus délicat et le plus raffiné des poètes persans, auteur des célèbres Ghazels : Que la vision de ton amour, brillante comme une étoile, soit toujours plus étincelante dans ma pensée.
Que toutes les beautés de ce monde soient au service de ta beauté.
Que tous les cyprès s'inclinent devant ta sveltesse.
Que les yeux qui refusent de subir ton enchantement versent du sang au lieu de larmes.
Qu'elles soient omeyyades, abbassides, fatimides, almohades, almoravides ou encore mameloukes, ces émouvantes manifestations sont pour la plupart musulmanes. L'anthropologue et psychanalyste algérien Malek Chebel ne devrait donc pas nous surprendre lorsqu'il évoque "cette logique fondamentale de l'islam qui veut que l'effort de compréhension soit préférable à tout, y compris au dogme fermé, pourvu qu'il se nourrisse de beauté." On sait en effet que cette religion qui refuse la représentation, inadéquate par définition, et dont le rituel est quasiment inexistant, trouve son premier élan dans le Coran, livre de beauté avant d'être recueil de préceptes juridiques et d'interdits moraux. Le nom d'Allah se décline ainsi de quatre-vingt dix-neuf façons, toutes plus inspirées les unes que les autres, la centième appellation étant mystérieuse, ineffable et accessible aux seuls illuminés. La 24e sourate (chapitre du Coran), très poétique, dit que "Dieu est la lumière des cieux et de la terre. Sa Lumière est semblable à une niche où se trouve une lampe. La lampe est dans un verre pareil à un astre étincelant qui s'allume grâce à un arbre béni : un olivier qui n'est ni de l'orient ni de l'occident et dont l'huile brillerait sans qu'un feu la touche ou peu s'en faut. Lumière sur Lumière." On imagine la splendeur de cette description en arabe…»

JEAN-PHILIPPE TROTTIER, «Les sentiments blessés de l'honneur et de la beauté chez les Arabes», L'Agora, vol. 10 no 1, été 2003

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