Weil Simone

3 février 1909-24 août 1943

Soeur cadette d'André Weil, un enfant prodige qui allait devenir un grand mathématicien, fille d'un médecin qui adhérait aux dogmes positivistes de la science de son époque, Simone Weil (1909-1943 )a eu la rigueur comme langue maternelle; une rigueur alliée, dès le plus jeune âge à une passion de l'absolu qui inspira le commentaire suivant au philosophe Gustave Thibon, l'ami à qui elle avait confié ses principaux manuscrits. «Elle connaissait, elle vivait la distance désespérante entre «savoir» et «savoir de toute son âme» et sa vie n'avait pas d'autre but que d'abolir cette distance». Cette passion de l'absolu la conduisit à l'usine, puis à la guerre d'Espagne, puis en Italie, dans les lieux, Assise en particulier, qui avaient inspiré saint François. Elle devait mourir en Angleterre, où elle était venue, après un détour par les États-Unis, conduite par son désir de se rapprocher de ses compatriotes. Et à trente-quatre ans, en dépit d'une vie très active et d'une migraine qui ne lui laissait guère de répit, elle avait accompli une oeuvre dont on n'a pas encore mesuré l'ampleur et la qualité. Albert Camus, celui qui a publié plusieurs de ses oeuvres, (Oppression et liberté, L'Enracinement, La Condition ouvrière, Pensées sans ordre concernant l'amour de Dieu) dans la collection Espoir chez Gallimard, a écrit à son sujet: «Il me paraît impossible d'imaginer pour l'Europe une renaissance qui ne tienne pas compte des exigences que Simone Weil a définies».

Simone Weil ou la synthèse de la méthode et de la purification

«La méthode dans les sciences, la purification dans la vie personnelle sont les deux conditions de la vérité. Si vous négligez la première, vous n'aurez de vous-mêmes et du monde qu'une image floue; si vous négligez la seconde, le savoir essentiel, qui donne sens à la vie, vous échappera toujours, votre science se limitera à l'enchaînement des faits et des signes abstraits.

L'Occident moderne a négligé la purification. Il en est résulté cet univers intellectuel, dont nous sommes à la fois les responsables et les victimes, où le mot vérité ne conserve de sens que dans les sciences, tandis que le domaine du sens est abandonné à l'opinion subjective: "Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà!"».

Simone Weil a souffert constamment, et de façon aiguë, de ce rétrécissement du domaine de la vérité. Sa vie, comme son œuvre, auront consisté en un effort continu pour rétablir la légitimité de la rigueur intellectuelle dans la vie intérieure et celle de l'inspiration dans les sciences.

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