Revues Argument et Action nationale, printemps 2017

Jacques Dufresne

Revue Argument, Vol 19, No 2, printemps-été 2017

La confédération canadienne

L'Action nationale, en kiosque le 19 juin 2017

Actes du colloque des 26 et 27 juin sur le voyage du général de Gaulle en 1967


Un grand rayon de ma bibliothèque est entièrement consacré à la question constitutionnelle québécoise et canadienne. Elle doit bien contenir 200 livres et numéros de revue et je n’ai sans doute rassemblé qu’une petite fraction de toute la littérature sur le sujet. Faut-il en conclure qu’on disserte d’autant plus sur un pays, le Canada ou le Québec par exemple, qu’on n’a pas vraiment la volonté de le faire?

J’avais de bonnes raisons de croire que tout a été dit et redit à ce propos. Ce numéro d’Argument me prouve que j’étais dans l’erreur. Marc Chevrier, par exemple, y signe un texte sur un personnage inconnu, inquiétant, troublant du XIX siècle, soit Adam Thom, dont les réflexions sur les moyens de dominer le Canada français et les lamentations sur le « triste sort » fait aux Anglo-britanniques dans la colonie annoncent le Canada de 1867 et même la pensée de Pierre-Elliott Trudeau. C’est lui qui, en 1836, a préconisé l’emploi d’une charte constitutionnelle sanctionnée par les tribunaux pour empêcher l’éclosion d’un État français en Amérique. Et le tout est exprimé dans une prose extatique et dramatique, qui rappelle les imprécations des grands prêcheurs évangéliques. Peu de gens connaissent Adam Thom et ses lettres anti-gauloises. En le lisant, on découvre un prophète terrible. Le personnage mérite d’être plus largement connu.

Bien d’autres articles de ce numéro me semblent aussi intéressants. La table des matières est invitante. Un mot sur l’article hors sujet et hors des normes de l’auteur lui-même : Louis Cornellier. Il s’agit d’un commentaire libre sur un texte peu connu de Tolstoï, un apologue où la parole est donnée à un cheval. En voici un extrait qui donne à réfléchir sur le sens de l’expression «mon pays»:

«En entendant ce dernier dire «mon » cheval à son sujet, l’Arpenteur réfléchit. Lui qui croyait appartenir à Dieu ou s’appartenir, « ainsi qu’il est normal pour tout être vivant », découvre qu’il est, sans avoir son mot à dire, la chose d’un homme. La leçon est bouleversante : « Ce n’est pas d’après les actes mais d’après les paroles que les hommes se dirigent dans la vie. Ce qu’ils apprécient, ce n’est pas tant la possibilité de faire ou de ne pas faire quelque chose que la possibilité de prononcer au sujet de différents objets certains mots dont ils sont convenus entre eux. Ces mots qu’ils considèrent comme très importants sont mon, ma, mes. Ils les appliquent aux êtres, aux objets, même à la terre, aux hommes et aux chevaux. Et ils sont convenus entre eux qu’un même objet ne pouvait être appelé “mon” que par une seule personne. Et celui qui conformément à ce jeu dit “mon” du plus grand nombre d’objets possible est considéré comme le plus heureux. Pourquoi est-ce ainsi ? »

Au moment où j’ai lu cet article, je venais de lire Les Rapaillages de Lionel Groulx. Frappé par la similitude entre le texte de Tolstoï sur le cheval et le chapitre de Groulx sur Adieu à la Grise, j’ai mené une recherche qui m’a conduit à un remarquable article de Cornellier sur Les Rapaillages de Lionel Groulx. Écrit en 2004, il commence ainsi : «Ah! ceux qui méprisent Lionel Groulx ne savent pas de quoi ils se privent! Bien sûr que l'abbé était réactionnaire, mais, tout de même, quel écrivain, quel intellectuel entier et profondément enngagé»

L’Action Nationale

Le colloque franco-québécois des 26 et 27 mai derniers commémorant le cinquantième anniversaire du voyage du général de Gaulle n’a pas été l’objet de la publicité qu’il méritait. Tout s’est passé comme si on avait voulu minimiser l’événement en en faisant un objet d’étude réservé exclusivement au milieu universitaire et à quelques initiés. La revue Action Nationale a fort heureusement pris le relais. On y trouvera les Actes du Colloque dans le prochain numéro qui sera en kiosque le 19 juin. Bonne lecture pour la Saint-Jean. Voici le programme du colloque.

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