Disparition de la lutte aux JO de 2020 : un manque de sens historique

Stéphane Stapinsky

Oeuvre de Hokusai. Source : visipix.com

 

Les dirigeants du Comité international olympique (CIO) ont décidé de supprimer les épreuves de lutte du programme des Jeux de 2020. La Fédération internationale des luttes associées, qui s’oppose à cette décision, rappelle que la lutte est implantée dans 180 pays et qu’elle constitue le sport national pour bon nombre d'entre eux. De plus, cette disparition pénalisera les athlètes de pays où les infrastructures sportives sont déficientes (la lutte, on le devine bien, ne requiert pas d’équipement sophistiqué).

  La position du CIO révèle un manque total de sens historique. La lutte fait partie du programme olympique moderne depuis les premiers jeux, en 1896. Par ailleurs, elle est un sport aussi vieux que l’apparition de l’homme sur terre. On peut presque dire qu’elle est l’archétype de tous les sports de combat. Pensons seulement à la Grèce antique et aux peintures extraordinaires qu’elle nous laissées (notamment sur des vases). L’un des plus célèbres athlètes grecs, Milon de Crotone, gendre et disciple de Pythagore, était un lutteur émérite. Il fut six fois champion olympique.

Cette annulation d’un sport aussi vénérable ne fait que nous confirmer ce que nous savions déjà : le mouvement olympique privilégie désormais une « spectacularisation » des JO, sponsors obligent. D’ailleurs, parmi les épreuves qui pourraient supplanter la lutte, on trouve le karaté, le patin à roues alignées (!), l’escalade sportive, le squash et la planche nautique. Les « rollers » aux jeux olympiques. C’est l’écrivain Philippe Muray qui doit se retourner dans sa tombe!
 

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