Dans l'allée

Émile Nelligan
Toi-même, éblouissant comme un soleil ancien
    Les Regrets des solitudes roses,
    Contemple le dégât du Parc magicien
    Où s'effeuillent, au pas du Soir musicien,
    Des morts de camélias, de roses.

    Revisitons le Faune à la flûte fragile
    Près des bassins au vaste soupir,
    Et le banc où, le soir, comme un jeune Virgile,
    Je venais célébrant sur mon théorbe agile
    Ta prunelle au reflet de saphir.

    La Nuit embrasse en paix morte les boulingrins,
    Tissant nos douleurs aux ombres brunes,
    Tissant tous nos ennuis, tissant tous nos chagrins,
    Mon coeur, si peu quiet qu'on dirait que tu crains
    Des fantômes d'anciennes lunes!

    Foulons mystérieux la grande allée oblique;
    Là, peut-être à nos appels amis
    Les Bonheurs dresseront leur front mélancolique,
    Du tombeau de l'Enfance où pleure leur relique,
    Au recul de nos ans endormis.

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Le poète est fils de la poésie.




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