Les hortillonnages
Description
Les hortillonnages forment un milieu naturel où terre et eau se disputent l'espace des méandres de la rivière Somme dans la ville d'Amiens (France: 130 km au nord de Paris) et ses abords. Ils s'étendent aussi sur les communes d'Amiens, Camon, Longueau et Rivery. Les hortillonnages sont si proches de ces agglomérations que certaines maisons ont un accès direct sur les cours d'eau ou sur les parcelles de terre.
Ce type de milieu n'est pas unique. On trouve des hortillonnages dans d'autres régions en France et dans d'autres pays, mais ce site d'Amiens est particulièrement caractéristique et protégé. Le type de culture dans ce milieu fait l'objet de recherches scientifiques dans le cadre du développement des ressources alimentaires. Les élèves du Lycée de La Hotoie à Amiens ont réalisé une étude très détaillée et particulièrement complète sur les Hortillonnages.
À la confluence des rivières Somme et Avre ce milieu naturel, remodelé et agrandi par les hommes au fil des siècles, est constitué d'îles d'alluvions dans un réseau de canaux et étangs dans lesquels la Somme se disperse. La tourbe a longtemps été extraite des hortillonnages et on en distingue d'ailleurs différentes qualités selon leur couleur et la profondeur d'extraction. Les anciennes tourbières constituent parfois des plans d'eau creusés sur plusieurs mètres de profondeur. L'homme a également modifié le site en créant des canaux, en les entretenant, pour aménager ces voies d'accès aux «îles flottantes», qui n'ont rien de «flottantes» du tout …
Le nom «hortillonnages» vient du latin «hortus» qui signifie «jardin». La culture des légumes, fruits et fleurs y est en effet pratiquée depuis des centaines d'années par des hommes et femmes qu'on appelle toujours des «hortillons» (ou parfois, en picard, des «hortillonneux»), ce nom venant de «hortilani», nom que les troupes gallo-romaines leur avaient donné. Ils se rendent sur leurs îles, qu'ils appellent des «aires», à bord de leur «barque à cornet» en suivant les «rieux» (petits canaux navigables entre les «aires»).
Les productions maraîchères des hortillonnages sont réputées pour leur qualité et leur fraîcheur. La fertilité des «aires» permet plusieurs récoltes par an. Ces aires sont entretenues soigneusement par les hortillons qui remontent les alluvions des rieux sur leurs parcelles. Ils évitent l'envasement des canaux qu'ils curent ainsi, fertilisent la terre par l'apport de cette boue organique naturelle et consolident les berges en la plaquant pour former un plan incliné lisse. La consolidation des rives est indispensable car cette terre devient très dure, puis friable en séchant. Certains consolident les berges avec des rondins de bois, des planches ou des tôles, le tout étant maintenu par des pieux enfoncés dans la berge.
Le «marché sur l'eau», sur le quai de la Somme dans le quartier Saint-Leu (le «vieil Amiens»), au pied de la cathédrale, voyait de nombreux hortillons venir en barque à cornet pour y vendre leurs produits. Cette activité maraîchère, florissante au XIXe siècle, a été délaissée à partir du milieu du XXe. On assiste maintenant à une importante reprise. L'avenir des hortillonnages est sauvé par la création d'un label de qualité pour les légumes et une structure commerciale efficace: «les tchiots légumes» (tchiots = petits en patois picard). Le marché sur l'eau est organisé de nos jours à l'occasion de fêtes («Fête sur l'eau», début septembre, par exemple).
L'intérêt économique et l'intérêt de la protection de cet environnement original sont étroitement liés. Des aires sont aménagées en jardins d'agrément par des particuliers qui, s'ils ne pratiquent pas la culture maraîchère, participent efficacement à la sauvegarde du site. Des études y sont réalisées par le Centre d'Initiation à l'Environnement qui y est implanté et l'Association pour la Protection et la Sauvegarde du Site des Hortillonnages. Des étudiants de l'Université de Picardie y consacrent des travaux et en font des sujets de mémoires, thèses de doctorat et publications.
Histoire
Il est difficile et même impossible de trouver l'origine des hortillonnages. Les Gallo-romains, dans le siècle qui a précédé Jésus-Christ, auraient apprécié des produits de ces terres fertiles quand Amiens s'appelait encore «Samarobriva» (pont sur la Somme).
Réalité ou légende, la cathédrale d'Amiens aurait été édifiée, à partir de 1220, sur une terre exploitée par un couple d'hortillons. Ils auraient fait don de leur terrain «le champ des artichauts» pour la construction de ce célèbre édifice.
On ne trouve véritablement trace des hortillons dans des documents qu'au XIIIe siècle.
Les hortillonnages sont inscrits à l'Inventaire National des Sites et l'UNESCO envisage leur classement comme Site d'Intérêt Mondial.
Carte
Tourisme
La place des hortillonnages dans l'activité touristique est de plus en plus importante et doit même être suivie avec attention pour ne pas devenir un danger pour ce fragile environnement. Les hortillonnages peuvent être visités en barque à cornet du 1er avril au 31 octobre (s'adresser à l'Office du Tourisme d'Amiens), mais certains lieux, indiqués sur la carte, sont accessibles à pied ou en voiture et permettent d'effectuer une visite individuelle, édifiante mais… sans guide.
Les hortillonnages constituent un lieu privilégié pour les amis des oiseaux, de la botanique et de la vie aquatique et en milieu humique. Les amateurs de pêche s'y retrouvent individuellement, en famille ou pour des concours sur les berges de la Somme.
Statistiques
- Superficie: 300 hectares
- 55 km de canaux navigables en barque à fond plat.
- Une dizaine d'exploitants maraîchers (hortillons) au début de l'an 2000.
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