Essentiel
Le plagiaire
psychologique ne semble voir aucune différence entre un texte original et un texte d’autrui, d’où son étonnement quand on lui adresse un reproche. Faut-il en conclure qu’il n’a aucune estime de lui-même en tant qu’auteur, en tant que
je qui
pense ou que, ignorant tout de l’acte de penser, faute d’avoir l’habitude de le pratiquer, il ne s’intéresse qu’au résultat, sans se soucier de savoir si ce dernier est son oeuvre ou celle d’un autre?
Comme le rappelle
Christian Vandendorpe, l’importance attachée aux droits d’auteur et au fait d’être auteur est toutefois assez récente. «Montaigne reconnaît avec une suprême désinvolture les nombreux emprunts qu'il fait aux Anciens ("Je ne compte pas mes emprunts, je les poise") et se justifie de ne pas nommer ses sources par le plaisir anticipé de voir des critiques un peu hâtifs "donne[r] une nazarde à Plutarque sur mon nez, et qu'ils s'échaudent à injurier Seneque en moy" (II, 10).»
Hélas! il n’est pas donné à tout le monde de plagier Montaigne plagiaire. Montaigne ou Shakespeare, autre emprunteur célèbre, étaient au-delà du
Je, dans la communauté des grands esprits, où toute formule vous appartient en un sens, parce qu’il entre plus de créativité dans la façon dont vous la comprenez que dans les formules originales mais banales d’un auteur médiocre. Le plagiaire psychologique de nos universités, dont les emprunts sont généralement anonymes et insignifiants, est en-deça du
Je. (J.D.)