État-providence
L'expression « État-providence » désigne l'ensemble des interventions de l'État dans le domaine social, qui visent à garantir un niveau minimum de bien-être à l'ensemble de la population, en particulier à travers un système étendu de protection sociale. On l'oppose couramment à celle d'« État gendarme ou protecteur », dans laquelle l'intervention de l'État est limitée à ses fonctions régaliennes. Cependant, d'après Pierre Rosanvallon, l'État-providence en est, en réalité, « une extension et un approfondissement ».
L'expression « État-providence » aurait été employé pour la première fois dans un sens péjoratif par le député Emile Ollivier en 1864, afin de dévaloriser la solidarité nationale organisée par l'État par rapport aux solidarités professionnelles traditionnelles. En effet, le développement économique et l'évolution des rapports sociaux conduisent alors l'État à remplir une fonction de régulateur social de plus en plus importante, et certains observateurs craignent que la solidarité nationale n'empiète sur les solidarités traditionnelles (familles, communautés...).
C'est à la fin du XIXème siècle que se substituent dans certains pays d'Europe les premiers systèmes d'assurance sociale (destinés à protéger les salariés contre les risques liés à la vieillesse, à la maladie ou aux accidents du travail) aux anciens systèmes fondés sur l'assistance.
Une première ébauche de l'État-providence (le Sozialstaat ou « État social ») voit le jour en Allemagne. Le chancelier Bismarck y met en place un système d'assurances sociales afin de contrer l'influence grandissante du socialisme au sein d'une classe ouvrière en plein développement. L'État se voit assigner une mission nouvelle : promouvoir le bien-être de tous les membres de la société. Sont ainsi mises en place l'assurance maladie (1883), l'assurance contre les accidents du travail (1884), et l'assurance invalidité et vieillesse (1889). Initialement destinées aux ouvriers dont les revenus ne dépassent pas un certain plafond, ces assurances sociales sont progressivement étendues aux autres catégories professionnelles, tout en restant soumises à des conditions de ressources.
Cette première grande conception de l'État-providence, fondée sur l'assurance des revenus du travail, se diffuse en Europe. En France, elle se manifeste par la loi sur la réparation des accidents du travail (1898), puis par la loi sur les assurances sociales (1930) qui prévoit une couverture des risques vieillesse, maladie, maternité, décès et invalidité.
Source : La Documentation Française, "l'Etat-providence"
Quelques dates clés
1883-1889 : en Allemagne, lois sur les assurances sociales organisant la prise en charge de la maladie, des accidents du travail, de la vieillesse et de l'invalidité.
1898 : en France, loi sur les accidents du travail.
1911 : au Royaume-Uni, National Insurance Act créant une assurance obligatoire gérée par l'Etat pour la maladie, le chômage et l'invalidité.
1942 : au Royaume-Uni, rapport Beveridge proposant un système de sécurité sociale pris en charge par l'Etat : ses propositions seront appliquées dès la fin du conflit.
1945-1946 : en France, ordonnances sur la Sécurité sociale.
1988 : création du Revenu minimum d'insertion (RMI).
1999 : création de la couverture maladie universelle (CMU).
Source : La Documentation Française, "l'Etat-providence"