Lis tigré
''Lilium tigrinum Ker-Gawl.- Lis tigré.- Martagon, Matagon, dans le Québec.- (Tiger Lily). -Bulbe (diam. 2-4 cm.) solitaire, globuleux; tige forte, d'un rouge brun ou noir, pubescente supérieurement, entourée, dans toute sa longueur, de feuilles (long. 7-10 cm.) alternes et étroitement lancéolées; feuilles supérieures plus courtes et portant des bulbilles noires à leur aisselle; fleurs 5-25, très grandes et très brillantes, fortement penchées; divisions du périanthe d'un beau rouge cinabre sensiblement saumoné, marquées d'un grand nombre de macules d'un rouge brun foncé, recourbées, lancéolées, les sépales plus étroits que les pétales; étamines à filet grêle et anthère d'un rouge brun foncé; style épaissi supérieurement, recourbé; capsule toujours avortée. Floraison estivale. Très cultivé dans les régions tempérées, et naturalisé en certains endroits de l'est de l'Amérique. Dans le Québec, bien établi au sommet du mont Beloeil (ancien lieu de pèlerinage), sur les rivages du fleuve à Lavaltrie, et sans doute ailleurs. Originaire du Japon et de la Chine.
Le L. tigrinum, l'Orni-Juri des Japonais, est remarquable par sa grande beauté, la facilité avec laquelle il fleurit, et sa rusticité à toute épreuve. Il fut d'abord apporté du Japon en Angleterre, en 1804, et depuis cinquante ans, la Chine et le Japon en ont exporté une grande quantité en Europe et en Amérique. Bien que l'espèce soit classiquement considérée comme indigène en Chine et au Japon, on sait très peu de chose sur son habitat naturel, parce qu'elle est cultivée pour l'ornement et pour la valeur alimentaire de ses bulbes dans ces deux pays depuis plus de mille ans, et qu'elle franchit facilement les cultures. Quoi qu'il en soit, aussi bien dans son pays d'origine qu'en Europe et en Amérique, on n'a jamais vu le L. tigrinum donner des fruits. Il se propage uniquement, mais facilement, par la division des bulbes et par les nombreuses bulbilles noires produites à l'aisselle des feuilles. Il est clair qu'en ce cas comme en d'autres semblables,- celui du L. canadense exposé plus haut, par exemple,- il y a un rapport de cause à effet, ou d'effet à cause, entre cette stérilité et l'extrême facilité de multiplication par voie végétative. L'explication la plus naturelle semble être que le L. tigrinum est une mauvaise espèce, un sport, une mutation, et que les milliers d'individus vivant aujourd'hui sont issus par voie végétative d'une mutation unique. Leur stérilité ne serait en somme que l'inaptitude ordinaire à l'autofécondation, tous les L. tigrinum pouvant être considérés au point de vue génétique comme les fragments d'un même individu. Dans toutes les espèces de Lis, d'ailleurs, les individus appartenant au même clône végétatif sont ordinairement interstériles aussi bien qu'autostériles. Mais les ''bonnes espèces'' sont la synthèse d'une diversité de races qui assurent l'efficacité de la fécondation croisée.''1
1. Marie-Victorin Flore Laurentienne 3e édition.