Doctrine de Monroe et interventions des États-Unis en Amérique centrale et dans les Caraïbes
En conséquence, au début du XXe siècle, par des traités conclus avec la République dominicaine en 1907 (4) et avec Haïti en 1915 (5), les États-Unis ont fait reconnaître leur droit de percevoir et de décaisser les recettes douanières de ces nations ainsi que celui de protéger le receveur général des douanes et ses assistants dans l'exercice de leurs fonctions. Ces dispositions, qui faisaient de ces deux pays des protectorats américains de fait, ont été résiliées sous l'administration du président Franklin Roosevelt. Des insurrections intérieures intermittentes contre les autorités nationales ont conduit les États-Unis à intervenir pour rétablir l'ordre en Haïti de 1915 à 1934, et en République dominicaine de 1916 à 1924. Mais le but de ces interventions des forces armées américaines, appuyées par les traités en vigueur, était de maintenir ou de rétablir la stabilité politique et d'éliminer ainsi les possibilités d'interventions militaires de puissances étrangères, conformément aux principes de la doctrine de Monroe.
Des préoccupations analogues concernant les interventions étrangères dans un Nicaragua au régime politique instable ont conduit les États-Unis à accéder à la demande du président Adolfo Diaz et à envoyer leurs troupes dans ce pays en 1912 pour y rétablir l'ordre. Par le traité Bryan-Chamorro de 1914 avec le Nicaragua, les États-Unis avaient obtenu le droit de protéger le futur canal de Panama et de préserver leurs droits de propriété concernant tout futur canal inter-océanique passant par le Nicaragua de même que les îles nicaraguayennes louées en vue de leur utilisation comme bases militaires. Le traité Bryan-Chamorro accordait aussi aux États-Unis le droit de prendre toute mesure nécessaire afin de réaliser les objectifs du traité (6). Il faisait donc du Nicaragua un quasi-protectorat des États-Unis. Les États-Unis ont invoqué la menace que les troubles politiques pouvaient constituer pour le canal de Panama ou pour leur droit de construire un autre canal pour justifier leur intervention et la présence prolongée de leurs forces armées au Nicaragua, considérant qu'ils contribuaient ainsi à la stabilité politique du pays. Les forces américaines ont été retirées du Nicaragua en 1933. Outre les cas qui viennent d'être mentionnés, les États-Unis sont intervenus en République dominicaine en 1965, à la Grenade en 1983 et au Panama en 1989, en réponse aux préoccupations inspirées par les menaces que l'instabilité politique faisait peser sur leurs ressortissants ou leurs intérêts dans ces pays. Bien que ces interventions militaires américaines dans les pays d'Amérique centrale et des Caraïbes aient prêté à controverse, l'examen du contexte dans lequel elles se situaient permet de dire objectivement qu'aucune d'elles ne constituait un emploi préventif de la force militaire de la part des États-Unis (7).
Notes
(4) 7 UST 196.
(5) 8 UST 660.
(6) 10 UST 379.
(7) Pour un excellent exposé sur la politique des États-Unis à l'égard des nations des Caraïbes et de l'Amérique centrale au cours de la première moitié du XXe siècle, voir A Diplomatic History of the United State de Samuel Flagg Bemis. New York. Holt, Rinehart and Winston, Inc. 1965, pp. 519-538. Pour une étude historique détaillée contenant d'intéressants aperçus et remarques sur les mesures prises par les États-Unis envers les nations des Caraïbes et de l'Amérique centrale, voir les chapitres 9, 11 et 12 de The Latin American Policy of the United States de Samuel Flagg Bemis. New York. Harcourt, Brace & World, 1943. (Ré-impression en livre de poche à New York, par W. W. Norton & Company, Inc., 1967).