La paume

Jean-Jules Jusserand

I

Tournoyeurs, jouteurs, chasseurs, et avec eux la masse des Français d'autrefois, vivaient debout plutôt qu'assis, et en plein air plutôt qu'à l'abri d'un toit. Nos ancêtres séjournaient beaucoup moins que nous dans leurs maisons, par la raison qu'ils n'avaient, d'habitude, rien à y faire. Bien des gens meurent aujourd'hui après avoir passé à couvert les quatre cinquièmes de leur vie. Le toit nous est cher et, quand nous le quittons, nous emportons, et même nos campagnards emportent, ces abris ou toits mobiles qui eussent bien surpris les ancêtres et qu'on appelle des parapluies.

Au temps de la renaissance des lettres, alors que le goût de l'étude s'était répandu et que l'imprimerie avait vulgarisé les livres, Nicolas Rapin a décrit le genre de vie que menait, durant l'intervalle des guerres, le «gentilhomme champêtre» dans l'ancienne France. C'est une sorte de Beatus ille à la manière d'Horace: heureux qui vit en paix, aux champs, loin du bruit et des querelles,
    De qui la maison est bâtie
    Sans grande somptuosité...
    De qui la terre bien bornée
    Se joint au clos de sa maison...
    Qui n'a point en son voisinage
    Un prince ni un grand seigneur,
    Mais seul commande en son village.
Ce n'est pas un soldat de profession: le temps n'est pas encore arrivé, toutefois, où l'on puisse vivre sans armes:
    Mais en sa salle, pour défense,
    Garde le harnais et la lance,
    Et le harquebuz de Milan.
Il a vu la guerre; c'est un souvenir qu'un honnête gentilhomme doit avoir, ne fût-ce que
    Pour en parler en devisant;
prêt cependant, s'il le faut, à la faire encore, en ces temps de troubles civils:
    Mais ne craint de monter en selle,
    Quand l'occasion l'y appelle
    Pour son ami ou son parent.
Il chasse; c'est là son principal passe-temps, et voici la liste des animaux dont il se sert. Il a:
    ... trois chevaux en l'étable,
    Six chiens courants, deux lévriers,
    Six épagneuls et, pour la table,
    L'autour et le lanier traitable.
Il préfère la basse volerie à la haute: moins de frais et plus de profit. Il a des furets, des poches à lapins, des panneaux à perdrix,
    Pour aider à fournir la broche,
    Quand une compagnie approche,
    Sans en user journellement
car il faut être hospitalier. Il va voir les vaches, la vigne, les semis, les coupes de bois; il prend des loups, ce qui le fait aimer dans le pays, car ces animaux étaient, on l'a vu, un vrai danger; il tue des oiseaux d'eau «avec l'arquebuse», s'endort quand il est fatigué, mais en plein air, au bord de quelque ruisseau. Enfin, tout au bout de la liste de ses occupations, on voit, dans ce portrait du gentilhomme idéal, qu'il peut lui arriver de lire un livre. Mais c'est à la dernière extrémité: l'hiver est venu, il semble qu'il soit impossible d'éviter cette bénigne occupation. Quelquefois donc, en ce temps de frimas,
    D'un plus chaud habit revêtu,
    Il lit dedans quelque bon livre
    Qui montre comment il faut suivre
    Le beau chemin de la vertu.
Ainsi s'écoulent des existences honorables et heureuses: soyez donc contents de votre sort, gentilshommes qui vivez dans les campagnes de France, conclut le poète; ne regrettez pas la vie de cour; vivez aux champs, robustes de corps et joyeux d'esprit:
    Si vous n'êtes auprès des dames
    A danser et faire l'amour,
    Aussi ne sentez-vous les flammes
    Et l'ennui dont ces pauvres âmes
    Sont tourmentées nuit et jour.

    Aussi n'avez-vous point la peine
    De vous friser tout le matin;
    De faire bien sentir l'haleine
    Et, chacun jour de la semaine,
    Changer de velours et satin;
    De godronner votre chemise

    Et toujours y porter la main;
    De vous habiller à la guise,
    Tantôt d'un seigneur de Venise,
    Tantôt d'un chevalier romain.

    Vivez donc aux champs, gentilshommes,
    Vivez, sains et joyeux, cent ans,
    Francs du malheur des autres hommes
    Et des factions où nous sommes,
    En un si misérable temps 1.

Cette existence en plein air avait toujours été celle des gentilshommes, à plus forte raison celle des rustres. Les jeux auxquels ils s'amusaient, les uns et les autres, étaient presque tous des jeux en plein air, les dés et jeux «de tables» faisant exception: encore transportait-on souvent les tables dehors, sous un arbre, pour jouer à l'air, comme le montrent les miniatures et les ivoires.

Noël du Fail a peint, d'après nature, la vie des paysans français, comme Rapin celle des gentilshommes; sa description est de 1547; elle eût été vraie plus tôt et demeura vraie plus tard; les deux tableaux se complètent: «Quelquefois, aux champs m'étant retiré... je me promenais, et ce à jour de fête, par les villages prochains, comme cherchant compagnie, où trouvai... les jeunes faisant exercice d'arc, de luttes, de barres et autres jeux, spectacles aux vieux, étant sous un large chêne couchés, les jambes croisées et leurs chapeaux un peu abaissés sur la vue, jugeant des coups, rafraîchissant la mémoire de leurs jeunes ans, prenant un singulier plaisir à voir folâtrer cette inconstante jeunesse.» On dansait aussi, et avec un entrain qui faisait de la danse un vrai jeu d'exercice: «Après dîner, quelqu'un du village, comme vous pourriez dire Pestel, produisait de sous sa robe un rebechon, un chalumeau, en lequel soufflait par grand maîtrise, et tellement les invitait le doux son de son instrument... qu'ils étaient contraints, ribon ribaine... commencer une danse. Les vieux, pour montrer l'exemple aux jeunes... faisaient l'essai, tournoyant la danse deux ou trois fois, sans beaucoup fredonner des pieds... La jeunesse alors faisait son devoir de treppir et mener le grand galop 2.» Spectacle séculaire dont on peut avancer ou reculer la date presque à volonté; la ramener au temps de Rousseau ou la reporter au temps de Froissart.

Froissart dresse, dans son Épinette amoureuse 3, l'interminable liste de ses amusements d'enfance:
    Jamais je ne fus lassé
    De jouer aux jeux des enfants,
    Tels qu'ils prennent dessous douze ans.
Ce sont surtout des jeux en plein air; quelques-uns, tout en rappelant ceux du jeune Boucicaut, sont encore populaires dans nos villages: il se battait, c'est de tous les temps; il rentrait au logis, les chausses en loques, c'est également de tous les temps:

Je ne pouvais à repos être,
Car aux enfants me combattais,
J'étais battu et je battais
Lors étais si desréé (mal en point),
Que souvent, mes draps déchirés,
Je m'en retournais en maison.
D'autres passe-temps étaient plus anodins; il s'amusait:
A faire voler contre vent
Une plume.

Il prenait des papillons;
Puis jouions à autre jeu

Qu'on dit à la queue leu leu...

Et souvent aussi fait avons

Héaumes de nos chaperons.

Il jouait enfin:

Aux barres et à l'agnelet...

A l'esteuf et aux reculées,

Au mulet, au saillir plus haut,

Au chasse lièvre...

Beaucoup de ces jeux étaient en faveur auprès de gens qui avaient passé l'âge de douze ans; la plupart des anciens chevaliers dont nous avons l'histoire excellaient au «saillir plus haut»; leurs biographes ne manquent jamais de signaler en eux ce mérite. A la cour du roi Marc, Tristan saute à merveille et fait admirer de tous la perfection avec laquelle il exécute le «saut gallois 4». Certains de ces exercices provoquaient des enthousiasmes qui duraient la vie entière (nos ancêtres ne brillaient pas par la modération): c'étaient ceux, en particulier, où figurait une paume, une pelote, un esteuf 5, boule, balle ou ballon Après les jeux où l'on cherchait à se frapper l'un l'autre, ce furent les plus aimés. Il y fallait de la force et de l'adresse, et on s'y livrait en plein air: autant de raisons pour qu'ils fussent populaires.

Lancer, chasser, arrêter, renvoyer un projectile, tel qu'une paume ou une balle, est un jeu primitif, des plus faciles à imaginer, des plus plaisants à exécuter; on en peut varier à l'infini les règles et les procédés; on trouve de ces jeux chez tous les peuples, des plus barbares aux plus civilisés; on s'y livre aujourd'hui dans nos jardins publics, les sauvages de l'Amérique s'y exerçaient dans leurs savanes, et les héros d'Homère, sur les plages de la mer stérile 6.

Les jeux de boule, de palets, de quilles sont au nombre de ces passe-temps; ils datent des âges les plus reculés et sont venus, de siècle en siècle, jusqu'à nos jours 7. La faveur dont ils jouissaient était jugée excessive au moyen âge, et les rois, on l'a vu, les interdisaient périodiquement; mais ils ont survécu aux rois et aux ordonnances; les quilles continuent de s'aligner le dimanche sur nos places de villages, et les «tournois» de joueurs de boules institués dans la région lyonnaise sont plus célèbres aujourd'hui qu'ils ne furent jamais.

Les jeux consistant dans l'envoi (et le renvoi) d'un objet mobile se sont subdivisés à l'infini au cours des siècles; il en naît chaque jour de nouveaux; beaucoup des plus populaires aujourd'hui ont acquis, en notre siècle seulement, leurs règles actuelles, mais n'en ont pas moins une lointaine origine, et l'on peut, si l'on veut, suivre leur filiation, comme on peut suivre à travers les âges les variations d'un mot jusqu'à sa source et étymologie primitive. Quelle que soit leur espèce et leur forme présente, ils peuvent tous se ranger dans l'une ou l'autre de deux grandes classes, selon que le projectile est lancé par le joueur, soit avec la main ou le pied même, soit au moyen d'un instrument: bâton, crosse, maillet, battoir, chistera des Basques 8, tamis, raquette. Quelques jeux ont passé, au cours du temps, et par une évolution des plus lentes, d'une catégorie dans l'autre, ajoutant ainsi un chapitre à l'histoire de la variabilité des espèces. D'autres ont survécu presque intacts, depuis les plus anciennes origines, et, comme au début, n'importe quel bâton et n'importe quel bout de bois taillé en pointe en fournissent les éléments.

Il ne saurait être question de les étudier tous, il y faudrait des volumes; il suffira, sans doute, de donner un aperçu de ceux que nos ancêtres préféraient et qui ont fourni la plus triomphante carrière.

II

Tout les auteurs qui ont écrit sur un jeu en particulier l'ont qualifié de «roi des jeux», et cela est naturel: chacun prêche pour son saint. Pour la postérité impartiale, le roi des anciens jeux français non militaires fut le jeu de paume. Il semble qu'on l'ait toujours pratiqué dans notre pays; les plus anciens textes qui se rapportent aux jeux de paume, pelote ou bonde, les montrent populaires déjà depuis longtemps. Les rôles de la taille qui nous ont été conservés pour la ville de Paris en 1292 permettent de constater qu'il s'y trouvait alors treize paumiers fabricants de balles, ce qui suppose un trafic considérable; deux «valets-paumiers» (aides ou apprentis) figurent également au rôle. La ville, dans le même temps, n'avait que huit libraires, «merchants et vendéeurs de livres,» et un seul marchand d'encre, qui était, d'ailleurs, une femme, qualifiée d'encrière dans le rôle 9.

Les poètes qui, depuis le temps où se répandit chez nous le goût des expressions générales, se sont plu à qualifier les hommes de «jouets» de la Fortune; les plaignaient au moyen âge d'en être «la pelote»: reçus, chassés, renvoyés, ballottés de maintes manières, comme à la paume. Aux yeux d'un poète du treizième siècle, la mer, avec le flux et le reflux de ses vagues, semblait jouer à «la bonde»:

Car souvent la mer, par mainte onde,

Jouait de moi comme à la bonde,

Et me jetait puis çà, puis là! 10

Le jeu excitait et absorbait les esprits à tel point que des lois répressives étaient jugées utiles par le roi, vexatoires par ses sujets, et, en fait, demeuraient vaines. Charles V interdit, comme on a vu, les jeux de «palmes» (paumes) parce qu'on y perdait son temps. Une ordonnance du Prévôt de Paris, du 22 janvier 1397, constate que «plusieurs gens de métier et autres du petit peuple quittent leur ouvrage et leurs familles pendant les jours ouvrables pour aller jouer à la paume, à la boule» et à une variété d'autres jeux, gaspillant ainsi leur temps et leurs biens. Il leur est enjoint de ne s'y plus livrer que le dimanche; défense de jouer pendant les jours ouvrables, à peine de prison et d'amende arbitraire, dont les dénonciateurs auront le quart 11. Les religieux même se laissaient entraîner, et le concile de Sens leur interdisait, en 1485, de jouer à la paume, surtout «en chemise et en public 12». Les Plantagenets, qui régnaient à Londres, voyaient les mêmes inconvénients aux mêmes jeux, importés de France en Angleterre, avec toutes leurs règles et procédés, leurs «chasses», leurs coups comptés à la française. Ils les avaient interdits de même périodiquement, pour les mêmes motifs 13.

Le jeu se jouait, au moyen âge, en plein air: c'est ce que nous appelons la longue paume, encore en usage dans nos campagnes et même dans pas mal de villes, telles que Saint-Quentin, Péronne, Montdidier, Soissons, Compiègne, Valenciennes, Paris, où une partie des Champs-Élysées lui est demeurée affectée jusqu'en 1853. Sur cet emplacement fut construit le Palais de l'Industrie, qui a disparu à son tour, et le jeu a été transporté au jardin du Luxembourg, où il continue de prospérer.

Intéressant, demandant de l'agilité et du coup d'œil, faisant prendre au corps une variété de poses, n'exigeant que des accessoires insignifiants, ce jeu était pratiqué par toute la France, en tout temps et même au milieu des guerres, par des gens de toute sorte, depuis les vilains jusqu'au roi, qui n'avait garde de s'interdire à lui-même un passe-temps si agréable, ni, d'ailleurs, de limiter son plaisir en prenant des précautions d'hygiène. Louis X le Hutin se trouvait au bois de Vincennes, en 1316; là,

il avait

Joué à un jeu qu'il savait:

A la paume.

Il joua avec la dernière violence, en «hutin» qu'il était, fut se reposer «en une cave», but un plein hanap d'eau:

Si but trop et froid se bouta.

La fièvre se déclara; il dut se mettre au lit:

Là il perdit plumes et pennes,

autrement dit, il trépassa 14. Cet exemple ne retint pas plus ses successeurs que ses sujets. On jouait dans les fossés à sec des châteaux, dans les rues des villes, les avenues des parcs, sur les places des villages, dans les cours d'auberge et dans celles du Louvre 15. Le brave La Hire était à ce jeu quand il fut pris par le seigneur d'Offemont, son ennemi. Celui-ci, dit Monstrelet, «assembla environ six vingt combattants... lesquels il mena dedans la cité de Beauvais dont La Hire était capitaine, et à cette heure jouait à la paume en la cour d'une hôtellerie où était l'enseigne de Saint-Martin.» Ledit seigneur y alla droit, «car bien le savait par ses espies être à icelui jeu.» La Hire, sans armes, sans défense, essaya d'échapper à l'ennemi en se cachant «sous une mangerie de chevaux»; mais il y fut trouvé, capturé, et, heureusement pour la patrie, promptement admis à rançon (1436).

Les balles de fabrication française étaient célèbres par toute l'Europe; on s'en procurait à l'étranger lorsqu'on pouvait. Shakespeare raconte l'envoi, par le Dauphin, de «balles de Paris» au prince Hal, devenu Henri V: l'envoi était fait par défi et dérision. Mais, en temps ordinaire, les princes étrangers ne manquaient guère l'occasion de s'en faire apporter par leurs amis de France. Une troupe de seigneurs français se rend par mer, en 1386, avec armes, valets et chevaux, auprès du roi de Castille, Jean 1er, «Père de la patrie;» elle le rejoint à Burgos.

Les voyageurs donnent au roi la fâcheuse nouvelle d'une grande expédition militaire préparée contre lui par Jean de Gand et les Anglais: de quoi fut ce prince «tout pensif». Mais il fit «bonne chère aux chevaliers de France», les remercia de leur venue et, s'adressant à Robert de Bracquemont et à son frère Jean, leur dit:

«Quand vous partites de moi, l'autre année, je vous dis et chargeai que vous apportassiez, quand vous retourneriez en ce pays, des pelotes de Paris pour nous ébattre, moi et vous, à la paume. Mais il valût mieux que je vous eusse chargé d'apporter bassinet et bonnes armures, car la saison appert que nous les aurions bien su employer.» — Sire, répondit le sire de Bracquemont, nous avons de l'un et de l'autre, car toujours ne peut-on pas jouer, ni toujours armoyer.»

Et, quant à prendre au tragique des questions de paix ou de guerre et de vie ou de mort, c'eût été déchoir, et l'idée qu'il dût être tué le lendemain n'eût pas fait manquer une balle à un Bracquemont. L'ennemi tardant à paraître, les chevaliers se donnent un passe-temps supplémentaire, en allant «en pèlerinage au baron Saint-Jacques», à Compostelle, emportant toutes leurs armes et armures, par grand bonheur, car ils coururent de terribles dangers, comme on peut voir dans Froissart 16.

Louis XI, s'il s'intéressait surtout à la chasse, ne dédaignait pas de réglementer, dans l'intérêt des joueurs, des paumiers et du bon renom de la célèbre fabrication française, la confection des balles ou esteufs. Il rendit, le 24 juin 1480, «étant à la Motte d'Esgry en Gâtinois,» une ordonnance sur «les faiseurs de balles pour la ville de Rouen», lesquels «maîtres-jurés» lui avaient remontré que «ledit métier est de grand peine et à peu de profit parce que, le temps passé, chacun qui s'en est voulu mêler l'a fait»; et que des gens sans conscience «emplissent iceux esteufs de chaux, sablon et autres choses qui ne sont bonnes et à l'occasion de quoi plusieurs ont eu les bras et mains fêlés et blessés»: car on n'y allait pas mollement et le jeu était un jeu de force autant que d'adresse. Le roi édicte une réglementation minutieuse, établit une surveillance, prescrit que: «seront tous les maîtres dudit métier tenus de faire bons esteufs bien garnis et étoffés, de bon cuir et bonne bourre, sans y mettre sablon, craie, batue (rognures de métaux), chaux, son, resture (rebut) de peau nommée resur, sciure d'ais (de bois), cendre, mousse, poudre ou terre,» sous peine d'amende et de saisie de tous mauvais esteufs qui seront «ars et brûlés afin que aucun n'en soit inconvénienté 17».

La bonne bourre dont parle Louis XI consistait en poils d'animaux; et son ordonnance dut avoir effet, car, au siècle suivant, l'Espagnol Vivès constate que les balles françaises «ne sont pas remplies comme en Espagne de rognures de drap, mais de poils de chiens», pili canini. Cet usage, suivi aussi en Angleterre, explique la plaisanterie, dans Much Ado, sur la barbe de Benedick, qui s'est fait raser, pour se donner l'air jeune et amoureux; sa précieuse barbe, dit Claudio, «est allée garnir des balles de tennis 18!»

Le fils de Louis XI, Charles VIII, aimait les mêmes exercices et se plaisait à jouer et voir jouer; la mort le trouva ainsi occupé. La veille des Rameaux 1498, étant à Amboise, le roi, dit Commynes 19, «partit de la chambre de la reine Anne de Bretagne et la mena... voir jouer à la paume ceux qui jouaient aux fossés du château... Et entrèrent ensemble une galerie» fort mal tenue et malpropre, comme étaient souvent les galeries et passages en ces temps-là, même dans les palais; et «était rompue à l'entrée; et s'y heurta le roi du front contre l'huis... et puis regarda une grande pièce les joueurs, et devisait à tout le monde...» Ses pensées toutefois étaient graves; il dit, entre autres choses, «qu'il avait espérance de ne faire jamais péché mortel ni véniel s'il pouvait; et en disant cette parole il chut à l'envers;» on le porta sur une paillasse dans cette même galerie, et il y mourut.

C'est vers ce temps que le jeu subit les principales transformations qui lui ont donné son caractère définitif. D'abord, on cessa de se servir, comme précédemment, de la main nue pour jouer: la violence des coups et la résistance des balles étaient telles qu'on pouvait se fausser les muscles ou s'écraser les veines si la balle était honnêtement faite, se rompre le poignet si elle était bourrée de sable ou de rognures de métal comme le constate le roi Louis XI. On jouait, en effet, à toute volée, dans toute sorte de terrain, suivant des règles qui variaient selon les lieux et la nature des obstacles: ici, se renvoyant la paume par-dessus le toit d'une église; là, «poussant de telle façon la pelote que, fort souvent, elle était portée au-dessus des murailles.»

Étienne Pasquier, qui cite ce dernier exemple, le tenait d'un vieux et passionné joueur de paume, témoin de la transformation. Elle avait été graduelle: en ce temps, disait le vieillard, dont les souvenirs remontaient aux dernières années de Charles VIII, le «déduit (des joueurs) était tout autre, parce qu'ils jouaient seulement de la main... et lors les uns jouaient à mains découvertes, et les autres, pour se faire moins de mal, y apportaient des gants doubles. Quelques-uns depuis, plus fins, pour se donner quelque avantage sur leurs compagnons, y mirent des cordes et tendons, afin de jeter mieux et avec moins de peine la balle; ce qui se pratiqua tout communément. Et finalement, de là s'était introduite la raquette telle que nous voyons aujourd'hui, en laissant la sophistiquerie du gant 20».

Dès le commencement du seizième siècle, la raquette l'emporte, bien que certains joueurs continuent encore à chasser la balle avec la main: «Raro luditur palmâ,» dit à ses compagnons un Espagnol revenant de Paris.

«— Mais alors, comment frappent-ils la balle? du poing, comme le ballon?

— Non, mais avec une raquette.»

Et Vivès, auteur du dialogue, décrit minutieusement cette curieuse invention, ainsi que la manière de jouer et de compter. On compte par «quinze, trente, quarante-cinq ou avantage (antegressio), à deux». On renvoie la balle «de volée, ou après le premier bond; au second, le coup est mauvais 21».

La forme et le mode de fabrication de la raquette donnèrent lieu à divers tâtonnements: elle fut ronde, carrée, garnie tantôt d'un grillage de cordes, tantôt de parchemin tendu. Ce dernier procédé finit par être plus spécialement affecté à la longue paume (usage qui ne s'est pas continué) et la raquette ainsi constituée s'appela battoir. «Battoir,» disent les Encyclopédistes du dix-huitième siècle, «terme de paume; est un instrument rond ou carré par un bout, garni d'un long manche, le tout couvert d'un parchemin fort dur: on s'en sert à la longue paume pour chasser les balles.» Le jeu étant des plus usités, il en résulta une consommation extraordinaire de parchemin. Le parchemin neuf était fort cher; les paumiers-raquetiers en prirent qui avait déjà servi: plus d'un manuscrit précieux trouva ainsi un emploi inattendu. «J'ai ouï dire à M. Chapelain, rapporte Colomiès, qu'un de ses amis, homme de lettres, avait joué à la longue paume avec un battoir sur lequel se voyaient des fragments de quelques décades de Tite-Live que nous n'avons point, et que ces fragments venaient d'un apothicaire qui, ayant eu en don, des religieuses de Fontevrault, plusieurs volumes en parchemin du même auteur, les avait vendus par ignorance à un faiseur de battoirs 22.»

Une modification plus importante encore, imaginée antérieurement, mais peu répandue, obtint, aussi au seizième siècle, un succès prodigieux. La Renaissance venue, l'exercice auquel se livraient La Hire dans sa cour d'auberge, les seigneurs de Charles VIII dans les fossés d'Amboise, les villageois autour de leurs églises ou à travers champs, parut un peu rude à une société qui, toute déchirée qu'elle fût par d'incessantes guerres, se flattait d'offrir le modèle des mœurs polies et élégantes. On se mit, de plus en plus, par toute la France, à circonscrire le champ du jeu et à l'entourer de murs, comme on avait autrefois entouré de lices continues le champ des tournois. L'intérêt des parties se trouvait augmenté, à cause des ricochets multipliés des balles sur les parois (jeu à bricole) 23, et parce que les dames pouvaient, dès lors, comme pour les tournois de la deuxième période, y assister. Les camps étaient séparés, au début, par une corde d'où pendait une simple frange qui n'allait pas jusqu'à terre: de là de fréquentes discussions pour savoir si la balle avait passé dessus ou non, et l'invention du filet 24, qui mit fin aux disputes. On perfectionna ces arrangements en couvrant le jeu, si bien qu'il fut loisible de jouer en tout temps et en tout lieu, par le soleil et par la pluie 25. Ce fut le jeu de «courte paume», et les édifices à ce consacrés furent communément appelés tripots, de l'ancien verbe français triper, bondir:

Qu'ils ballent et tripent et saillent 26.

L'autre forme du jeu subsista néanmoins 27, puisqu'elle dure encore, mais avec un caractère moins brillant et plus populaire.

L'existence de ces salles quadrangulaires, offrant un espace libre et couvert, eut, dans notre pays, une influence considérable, non pas seulement au point de vue du développement physique de la nation, mais, ce qui était imprévu, au point de vue littéraire. Par toute la France, en province comme dans la capitale, elles servirent de théâtre. Les troupes errantes, que ce fussent celle du Roman comique ou celle de Molière, sûres de savoir où jouer, pouvaient multiplier leurs tournées. Le nombre de ces édifices contribua à répandre chez nous le goût de l'art dramatique, si bien que, par là, le jeu rendit avec usure aux belles-lettres ce que les battoirs de parchemin lui avaient fait perdre. Le seul inconvénient fut qu'on s'habitua tellement à voir théâtres et jeux de paume se confondre, que très tard, par habitude, on conserva aux premiers la forme des seconds, et Mercier, au dix-huitième siècle, poussait des cris d'indignation en voyant encore telle scène, bâtie de son temps, conserver la «précieuse» forme d'un jeu de paume. Il est certain que, partout ailleurs, dès le seizième siècle, en Italie avec les théâtres de Vicence et de Sabbioneta, en Angleterre avec la série des théâtres de Southwark, la forme semi-circulaire avait prévalu. Nous fîmes exception: effet inattendu de l'extraordinaire popularité d'un jeu d'exercice en France.

Quand la salle n'était retenue, ni par Mlle de l'Étoile pour y jouer le «Nicomède de l'inimitable M. de Corneille», ni par Jean-Baptiste Poquelin pour y représenter la Jalousie du Barbouillé, simples intermèdes dans l'affectation normale de ces bâtiments, les parties s'y succédaient, et, malgré les lois restrictives, tout le monde se délectait à ce jeu. Les étrangers s'y livraient aussi, dans leur pays, mais notre ardeur dépassait celle de tous les autres, si bien qu'Anglais, Italiens ou Espagnols, Dallington, Lippomano, Vivès, traversant la France, notaient ce trait, dans leurs souvenirs, comme une des singularités caractéristiques de notre patrie.

Le nombre des jeux de paume construits chez nous aux seizième et dix-septième siècles est prodigieux: pas de château qui n'ait le sien, pas de ville qui n'en possède une dizaine; de simples bourgades même ont les leurs. Tous les voyageurs sont d'accord. Vivès révèle à ses compatriotes d'Espagne cette curiosité:

— BORGIA. — N'avez-vous plus en France de jeux en public? (Jeux à l'air libre, dans les rues, sur les routes ou les places.)

— SCINTILLA. — Je ne peux parler des autres villes de France. Mais je sais qu'à Paris, il n'y a plus de ces jeux publics et il y en a beaucoup de privés, spécialement aux faubourgs Saint-Jacques, Saint-Marcel et Saint-Germain... On joue avec des souliers feutrés.

— BORGIA. — Ils ne seraient guère utiles ici.

— SCINTILLA. — Sans doute, avec nos rues pierreuses; mais en France et en Belgique on joue sur un pavé uni et lisse, entouré de parois 28.»

Francesco Gregory d'Ierni, qui accompagne à Paris le légat du pape en 1596, constate qu'il se trouve dans cette ville «deux cent cinquante jeux de paume très beaux et très bien installés, qui, dit-on, avant les dernières guerres, faisaient vivre jusqu'à sept mille personnes» (gardiens, maîtres de jeux, naquets ou marqueurs chargés en outre de frotter les joueurs après les parties; paumiers-raquetiers ou fabricants de balles et raquettes, etc.) 29. Lippomano, ambassadeur de Venise, voit tant de salles de tous côtés par la ville qu'il en évalue le total au chiffre impossible de dix-huit cents: «La seule dépense des paumes s'élève, dit-il, à mille écus par jour. Les Français se plaisent beaucoup à ce jeu et s'y exercent avec une grâce et une légèreté merveilleuses 30.» L'Anglais sir Robert Dallington, maître d'école enrichi, qui séjourne en France sous Henri IV, n'est pas moins ébahi 31. D'après lui, on joue davantage à la paume, en France, que «dans tout le reste de la chrétienté»; le pays est semé de jeux de paume; ils sont plus nombreux même que les églises; les Français naissent «une raquette à la main»; les femmes jouent, les enfants jouent; les artisans jouent aussi, nonobstant toute ordonnance à ce contraire, et perdent en un jour le gain d'une semaine. Pour donner enfin à ses compatriotes une idée saisissante du nombre incroyable des joueurs, il déclare qu'il y a plus de joueurs de paume en France que d'ivrognes en Angleterre.

Ce n'est pas pour nous faire un compliment, au contraire; Dallington ne voit guère chez nous que des sujets de blâme, et le portrait qu'il trace de la nation française est un des moins flattés qui aient été jamais dessinés. Il trouve cette nation beaucoup plus sportive que la sienne, partant trop sportive; et, tandis qu'on nous a reproché, depuis, de négliger les exercices physiques et qu'on nous a fait honte de notre paresse, Dallington nous blâme de trop les cultiver. Qu'il nous soit permis aujourd'hui de tourner ses reproches en compliments. Les Français, selon lui, adorent les exercices violents; ils n'ont nul souci de l'heure et ne tiennent aucun compte de la température; à des moments où les gens sensés ne songent qu'à demeurer tranquilles à la maison, à cause de la chaleur, non seulement les Français sortent, mais ils vont jouer à la paume 32. Il en résulte qu'altérés et affamés, ils boivent et mangent trop, et de tous ces excès combinés résulte la quantité de galeux qu'on voit dans le pays: effet inattendu de l'abus des sports. La science heureusement n'a pas confirmé ces inquiétantes déductions.

Enfin Dallington observe, non sans regret, que cette passion pour les jeux d'exercice est d'un contagieux exemple. Pour les sports, la France donne le ton et ses voisins l'imitent: l'Angleterre, sans aller jusqu'à de si choquants excès, lui a pris «quantité de balivernes absurdes», négligeant le mail, le seul qu'elle aurait dû lui emprunter parce qu'il est moins violent que les autres.

Bien loin de partager les opinions de Dallington, que d'ailleurs ils ne connurent pas (car personne alors ne savait l'anglais en France, et le livre devait attendre jusqu'en 1892 les honneurs d'une traduction) 33, nos compatriotes se vantaient de leur prééminence à la paume au lieu d'en rougir. Des magistrats, des hommes d'étude, des savants: Pasquier, Fauchet, Henri Estienne, éprouvaient le même engouement que tout le reste de la nation, depuis le Roi jusqu'au dernier des artisans: «Jeu que j'ai bien aimé, dit le président Fauchet, et plus commun aux Français qu'à tous leurs voisins.» — «Je donnerai le premier lieu (au jeu) de la paume, écrit le philologue Henri Estienne, auquel on peut aussi dire la nation française être plus adonnée qu'aucune autre: témoin le grand nombre de tripots qui sont en cette ville de Paris. Et avons bien raison d'y être plus adonnés, tant pour y être plus habiles et adroits, que pour être un exercice non moins beau et honnête que profitable 34.»

Rien de tel que l'exercice pour le corps, et même pour l'esprit, disait-on encore, à une époque où la part de l'esprit n'était certes pas des moindres, en 1668, au plus beau temps du Grand Roi: «L'exercice du jeu, dûment fait, échauffe le corps et les membres, purge les humeurs superflues et étrangères en les faisant évaporer, fortifie les facultés naturelles, éclaircit et réjouit l'esprit; en telle manière que l'homme qui sait choisir certain jeu d'exercice honnête et en user sagement, en vaut beaucoup mieux tant pour sa santé corporelle que pour la vivacité de son esprit.»

Suivent les «ordonnances (remontant à 1592) du royal et honorable jeu de la paume», lequel n'a guère d'autre inconvénient que de tellement exciter les joueurs qu'ils s'emportent parfois en jurons effroyables. C'est un grand tort; au jeu comme à la guerre il faut se posséder. — «Messieurs qui désirez vous ébattre et jouer à la paume, faut jouer, afin de récréer le corps et délecter les esprits, sans jurer ni blasphémer le nom de Dieu. Avant de jouer, convient tourner la raquette pour savoir» à qui le service. Dans les cas douteux, consulter les naquets ou marqueux, mais de préférence le public, constitué en tribunal arbitral, toujours formé alors de gens compétents, car à cette époque tout le monde jouait.

Des concours publics avec prix — des «championnats» — étaient organisés. Le jeu était ouvert trois jours durant à tous venants et le maître du jeu donnait «aux champions qui voulaient s'exercer au dit prix» trois objets: une couronne de fleurs, une paire de gants; enfin, prix suprême, un éteuf d'argent ou une raquette. Les joueurs devaient prendre, comme jadis les tournoyeurs, divers engagements préliminaires, proportionnés à l'importance de ces pacifiques batailles; le plus difficile à observer était de ne pas jurer; aussi les infractions étaient-elles punies d'amende: «Toutes personnes qui désirent jouer audit prix y seront honnêtement reçues, à la charge de ne jurer ni blasphémer le nom de Dieu, sous peine, pour chacune fois, de cinq sols d'amende.»

La bataille étant à tous venants, les «défendants», comme jadis Regnault de Roye, Boucicaut et Saint-Py, doivent être à leur poste, les trois jours, du matin au soir. Ils seront donc au jeu à partir de huit heures du matin et ne s'en iront qu'à sept heures du soir, avec permission seulement d'aller «changer de chemise, et boire et manger à l'heure du dîner pendant une heure seulement 35».

La quantité de termes empruntés à cet exercice et passés dans le langage courant (se renvoyer la balle, prendre la balle au bond, à vous la balle, être à deux de jeu) 36 montrent encore la popularité dont il a joui parmi nous sous ses deux formes de longue et courte paume; de même, les comparaisons qu'en tiraient des poètes comme Charles d'Orléans 37, ou des penseurs comme Pascal 38; de même, les ordonnances des rois, qui s'inquiétaient périodiquement des pertes de temps et d'argent que leur fréquentation occasionnait aux bourgeois et artisans; de même, d'autres ordonnances reconnaissant, au contraire, l'importance de ce jeu, la légalité des dettes qui y étaient contractées et la protection due aux métiers divers qui s'y rattachaient. «Des lettres patentes de François 1er, du 9 novembre 1527, portent que tout ce qui se jouera au jeu de paume sera payé à celui qui gagnera, comme une dette raisonnable et acquise par son travail 39.»

Le jeu était qualifié de royal, et non sans cause. Capétiens, Valois et Bourbons s'étaient transmis, avec la couronne, l'amour de cet exercice. François 1er y était fort habile; son fils Henri II, tout autant. Il avait fait construire au Louvre une magnifique salle pour ce jeu 40. «Il jouait à la paume et très bien, dit Brantôme. Il se plaisait fort quand la reine sa femme, madame sa sœur, et les dames le venaient voir jouer, comme souvent elles y venaient, et qu'elles en donnassent leur sentence, comme les autres, des fenêtres en haut.» Charles IX, écrit en 1561 Giovanni Michieli, ambassadeur de Venise, «aime passionnément le jeu de paume et l'exercice du cheval,» malgré que la «moindre fatigue le condamne à un long repos». Le duc de Nemours (Jacques de Savoie), le modèle des cavaliers, brille dans les palais et dans les camps, se distingue à la guerre et en amours, et ne dédaigne pas de s'acquérir, par-dessus le marché, à grande peine et par une longue pratique, la réputation d'excellent joueur de paume. Il était propre à tout, «très adroit et de belle grâce... les armes belles en sa main. Il jouait très bien à la paume: aussi disait-on les revers de M. de Nemours; jouait bien à la balle, au ballon, sautait, voltigeait, dansait,» et, par toutes ces qualités réunies, gagnait la faveur des dames. Brantôme déclare en avoir connu deux, «des belles du monde, qui l'ont bien aimé... Plusieurs fois leur ai-je vu laisser les vêpres à demi dites pour l'aller voir jouer ou à la paume ou au ballon, en la basse-cour du logis de nos rois.» Mais la femme qui fit le plus pour sa gloire ne fut aucune de ces deux dames-là et ne put jamais le connaître: ce fut Mme de La Fayette, qui le choisit pour héros de son immortelle Princesse de Clèves.

Quant à Henri IV, le plus «en cervelle» de tous ces rois et qui suffit à tout, chasse, administration, amour, guerre et jeux, il est constamment à la salle de paume. Dès le lendemain de son entrée dans Paris, on le trouve au jeu de la Sphère. L'entrée eut lieu, rapporte Lestoile, le 15 septembre 1594; le roi, «fort riant... avait presque toujours son chapeau au poing, principalement pour saluer les dames et demoiselles qui étaient aux fenêtres.

Le vendredi 16, le roi joua à la paume tout du long de l'après dînée, dans le jeu de paume de la Sphère.

Le samedi 24, le roi joua à la paume dans le jeu de la Sphère. Il était tout en chemise, encore était-elle déchirée sur le dos, et avait des chausses grises, à jambes de chien, qu'on appelle.»

Le 27 octobre, «le roi ayant gagné, ce jour, quatre cents écus à la paume, qui étaient sous la corde, les fit ramasser par des naquets et mettre dans un chapeau, puis dit tout haut: — Je tiens bien ceux-ci; on ne me les dérobera pas, car ils ne passeront point par les mains de mes trésoriers.»

En 1597, au milieu des affaires les plus graves, «il passait son temps à jouer à la paume et c'était d'ordinaire à la Sphère,» où les dames venaient le voir et en particulier «madame de Monsseaux», autrement dit Gabrielle d'Estrées. «Et ne laissait pour cela Sa Majesté de veiller et donner ordre à tout ce qui était nécessaire au siège d'Amiens pour le mois suivant; lequel étant venu, il donna congé au jeu et à l'amour, et y marcha en personne, faisant office de roi, de capitaine et de soldat, tout ensemble,» et reprit la ville aux Espagnols 41.

Louis XIV avait un paumier-raquetier en titre, et les princes, un maître de paume qui leur donnait des leçons et qui était «porte-raquette du roi». Ces fonctions de cour subsistaient au siècle suivant; le maître-paumier avait l'honneur de «présenter la raquette au roi. Il a douze cents livres de pension, et cinquante livres, payées par le premier valet de chambre, pour chaque fois que le roi joue». Six marqueurs de cour complétaient ce personnel et recevaient chacun dix francs pour chaque partie royale 42.

Aussi les éloges sont-ils incessants et viennent-ils de tous côtés. La paume, lit-on dans le Dictionnaire de Trévoux, «est un exercice honnête et permis par les lois, dont les différends se peuvent régler cri justice.» La paume, selon la grande Description des Arts et Métiers, publication officielle, imprimée au dix-huitième siècle, «est le seul jeu qui puisse prendre rang dans le détail des Arts et Métiers, dont la description a été entreprise par l'Académie Royale des Sciences, attendu qu'étant lui-même un art, il s'exécute par le secours d'un autre art qui a ses instruments et sa manufacture particulière. Celui-ci est la fabrique des raquettes et des balles. Il fut érigé en corps de maîtrise en 1610 sous le titre de la Communauté des maîtres-paumiers, raquetiers, faiseurs d'éteufs, pelotes et balles 43.»

Mais à ce moment, au milieu de tant d'éloges et d'honneurs, le jeu était en pleine décadence: son déclin avait même commencé dès le temps de Louis XIV; le roi y jouait 44, mais sans passion, et le zèle de ses courtisans s'en ressentit. Il s'intéressait encore aux belles parties; il allait, avec les princes, au jeu de paume de Fontainebleau «voir les grands joueurs. Jourdain tout seul gagna les deux plus forts, après avoir joué longtemps, deux contre deux, des parties qu'il avait gagnées aussi» (Dangeau). Ce Jourdain était célèbre; il avait huit cents livres de pension pour jouer contre les princes et leur servir la balle. Non moins célèbre était cet original marquis de Rivarole qui battait les plus habiles bien qu'il eût une jambe de bois, laquelle fut emportée d'un coup de canon à Nerwinde: «La peste des sots! s'écria-t-il... Ils seront bien attrapés; ils ne savent pas que j'en ai une autre dans mon coffre.» — «Avec sa jambe de bois, continue Dangeau, il était un des plus forts à jouer à la paume 45.»

Mais ni Jourdain ni Rivarole ne pouvaient rien contre le mouvement de recul qui avait commencé sans qu'on s'en aperçût encore 46; l'éloquence de l'Académie royale au siècle suivant, alors que la décadence s'accentuait, demeurait également vaine. L'essai consacré par elle à l'art du paumier-raquetier, illustré d'excellentes gravures, est un plaidoyer chaleureux en faveur de ce jeu naguère si prisé. La paume, y lit-on, permet à la jeunesse «d'acquérir une santé robuste et une agilité si nécessaire dans le cours de la vie: aussi cet exercice est-il en telle considération qu'il se bâtit des édifices exprès, comme il s'en construit d'autres pour apprendre l'art de monter à cheval. Le roi a un jeu de paume dans chacune de ses maisons royales: à Versailles, à Fontainebleau, à Saint-Germain, à Compiègne; M. le duc d'Orléans en a un à Villers-Cotterets, et M. le prince de Condé, un à Chantilly». Celui de Versailles a été conservé intact; on sait en quel souvenir. Ce jeu, continue l'Académie royale 47, a de l'importance au point de vue militaire: «On peut comparer l'art de la paume, pour l'infanterie, à celui du cheval pour la cavalerie; et l'officier et le soldat qui l'aurait pratiqué se trouverait bien supérieur à celui qui ne sait que son exercice ordinaire et même celui des armes: car le premier ne débourre que les bras, et le second ne dirige le corps que dans un sens; au lieu que les inflexions, les élans et les courses qu'on est obligé de faire à ce jeu le rendent également souple et le rompent, pour ainsi dire, de toutes les façons.»

Vains efforts. En 1657, l'ambassadeur de Hollande comptait encore cent quatorze tripots à Paris; en 1780, il n'y en avait plus que dix; en 1839, plus qu'un, sis rue Mazarine, et qui disparut cette année-là 48. Un autre lui succéda; il en reste toujours un ou, plus exactement, deux, sur la terrasse des Tuileries, et il y aurait sûrement place aujourd'hui pour davantage dans notre capitale, grâce à la renaissance des exercices physiques.

Sous une forme remaniée (et, si l'origine est française, le remaniement est dû à nos voisins d'Angleterre, qui ont droit, de ce fait, à notre reconnaissance), le jeu de paume a reconquis chez nous une très grande popularité. C'est la forme appelée lawn-tennis ou paume sur gazon, qui se joue, d'ailleurs, sur n'importe quelle surface plane et constitue un intermédiaire entre la courte paume en édifices clos et la longue paume en plein air. C'est un jeu excellent, qui mérite, lui aussi, l'éloge accordé jadis par l'Académie des Sciences aux exercices propres à «débourrer» les membres, et dont le seul défaut est de ne pas pouvoir être continué aussi tard dans la vie que le jeu de courte paume. Aucun marquis de Rivarole n'y saurait briller, quoique ce sport ait été traité parfois, chez nous, de jeu de demoiselles et de forme nouvelle de la paresse, par des juges sévères, mais un peu dépourvus, ce semble, d'expérience personnelle.

L'essor extraordinaire pris par le lawn-tennis date seulement de 1874, époque où la major Wingfield obtint à Londres un brevet pour son «invention», à laquelle il avait donné le nom superbe de Sphairistike, renouvelé des Grecs.

Quant à la filiation française du lawn-tennis, qui ne fut pas longtemps connu sous son nom de baptême, elle n'est ni discutable ni discutée; c'est un dérivé de notre jeu de paume. Dans sa demande de brevet, le major Wingfield le définissait: «Cour transportable, nouvelle et perfectionnée, pour jouer l'ancien jeu de paume 49.» Tous ses termes et procédés rappellent cette origine; on compte à la française par quinze, trente, deuce (forme bâtarde de «à deux»), «avantage de jeux,» manière de compter pour laquelle nos ancêtres avaient découvert une origine astronomique 50. On tire le service à la française, au moyen, disait l'Académie Royale des Sciences, parlant de la paume, d'une «raquette jetée en l'air», avec l'exclamation «droit» ou «nœud», qui correspond à rough ou smooth du lawn-tennis. Le mot tennis, d'ailleurs, est lui-même d'origine française et s'écrivait primitivement tenetz 51; autrement dit: «Tenez!» cri d'appel du serveur, «accipe! excipe!» disaient Érasme et Cordier en leurs Dialogues.

Souhaitons donc bonne chance et prospérité à ce jeu, un des plus salutaires, des moins encombrants, des plus aisés qui soient à installer. On pourra s'y livrer sans scrupules, d'abord, parce qu'il est sain et bienfaisant, ce qui devrait être une raison suffisante; ensuite, parce qu'il n'est pas tellement étranger par ses origines qu'il puisse porter ombrage aux censeurs les plus exigeants.

Notes
1. Les Plaisirs du gentilhomme champestre, par N. R. P. (Nicolas Rapin, selon Barbier), Paris, 1583, in-12.
2. Propos rustiques de maistre Léon Ladulfi (anagramme de Noël du FAIL), Lyon, 1547, in-8°, pp. 12, 13, 22.
3. Poésies, éd. Scheler, Bruxelles, 1870, 3 vol. in-8°, t. I, p. 93. Scheler compte que Froissart jouait à 52 jeux. Cf. ceux de Jeunesse dans le Pèlerinage de Vie Humaine, par Deguileville, 1330-2 (Londres, 1893, pp. 368 et s.):
    Jeunece sui, la legiere...
    La sauterelle, la saillant,
    Qui tout dangier ne prise un gant (etc.).

4.
    E puis firent un sauz waleis
    E uns qu'apelent waueleis...
    Sur tuz i fud Tristran preisez. (Tristan, 1835, t. II, p. 38.)
5. «Les esteufs se poussent avec la main; ils sont faits de bourre recouverte de peau de mouton. Les pelotes sont les balles toute ficelées, non encore recouvertes. Les balles sont la pelote recouverte de drap blanc.» De Garsault, Art du Paumier-Raquetier (1767). — Tous ces termes étaient parfois employés l'un pour l'autre et avaient, au moyen âge, un sens moins précis.
6. «Les suivantes et la princesse quittent leurs voiles et jouent à la paume; au milieu d'elles, l'élégante Nausicaa dirige les jeux... En ce moment, Nausicaa jette à l'une de ses suivantes la paume légère qui s'égare et va tomber dans le rapide courant du fleuve; toutes alors poussent un grand cri,» qui réveille le divin Ulysse. — Odyssée, trad. Allègre.
7. Jeux de boule à Paris, sous Louis XIV:
«ARLEQUIN. — Ah! monsieur Jupiter, un gentilhomme comme vous aux troisièmes loges?
JUPITER. — Je me suis amusé en venant à jouer à la boule aux Petits-Carreaux, contre quatre procureurs qui ne m'ont laissé que trente sous.
ARLEQUIN. — Où diable vous êtes-vous fourré là? Ces messieurs savent aussi bien rouler le bois que ruiner une famille.» Prologue du Divorce, de Regnard (joué en 1688).
8. La chistera est un «long gant-panier, qui prolonge le bras des joueurs de plus de soixante centimètres». Cette forme du jeu, aussi populaire aujourd'hui que jamais, a suivi les Basques dans toutes leurs migrations: ils n'y sont pas moins attachés qu'à leur langue même; ce sport national les a accompagnés de Saint-Jean-de-Luz à Mexico et Buenos-Ayres, «où les grands joueurs de profession... avaient de superbes engagements, jusqu'à trente mille francs par mois,» (dit M. J. Villemer, Almanach des sports, de Leudet, 1891, p. 243).
9. Publié par H. Géraud, Paris sous Philippe le Bel, 1837, in-4° (Documents inédits), pp. 506, 519, 529, 546.
10. Miracles de Nostre-Dame, au mot bonde, dans Godefroy, avec une lettre de rémission montrant bien le sens du mot: «Comme l'exposant et plusieurs autres eussent joué au jeu de la paume que on appelle ou pais (Lisieux) à la bonde...» (1395.)
11. Delamarre, Traité de la Police, 1705 (2° éd., 1722, t. I, p. 488)
12. Thomassin, Ancienne et nouvelle discipline de l'Eglise, 1725, t. III, col. 1355.
13. «Et lessent tout outrement les jeues as pelotes sibien à meyn come à piee, et... gettre de pere... et autres tielx jeues importunes.» 12 Ric. II, chap. VI. Défenses du même genre: 17 Éd. IV, chap. III; 19 H. VII, chap. XII, etc. Statutes of the Realm. Voir plus haut, p. 24
14. Chronique rimée, attribuée à Geffroi de Paris. (Recueil des historiens de la France, t. XXII, 1865, p. 163.)
15. Ce que faisait le sage roi Charles V lui-même: «Et en la cour, devers la rue Froidmantel, scellé et assis en un auvent où le Roy et nos seigneurs jouent à la paulme, et au mur faict un estuy à mettre les esteufs.» Compte de 1368. Topographie historique du vieux Paris; région du Louvre, t. I, p. 161.
16. Chroniques, liv. III, chap. XXXII.
17. Ordonnances des rois de France de la troisième race, Paris, 1723-1849, 22 vol. in-fol., t. XVIII.
18. Claudio: «The barber's man bath been seen with him; and the old ornament of his cheek hath already stuffed tennis-balls.» Much Ado, III, 2.
19. Mémoires, liv. VIII, chap. XXV.
20. Recherches de la France, liv. IV, chap. XIII. — Le mot raquette est dans Chaucer (quatorzième siècle): «Pleyen raket to and fro» (mot de l'amoureux Troïlus, chant IV, vers 460, qui déclare ne pouvoir aimer ici, puis là, comme les joueurs lancent et renvoient la balle). Mais il n'en faudrait pas conclure que l'usage de la raquette datât de cette époque. Le sens primitif du mot est paume de la main (et plante du pied); Chaucer veut parler d'un jeu qui se pratiquait avec la «raquette» ou «paume» de la main, c.-à-d. le jeu de paume, comme on le jouait de son temps, en Angleterre aussi bien qu'en France.
21. «Raro luditur palmâ. — Quomodo ergo percutiunt pilam? Pugno, ut folles? — Ne sic quidem, sed reticulo. — Confecto ex filo? — Ex fidibus crassiusculis, quales fere sunt sextæ in testudine... Sub funem misisse globulum vicium est, seu peccatum... Numeri (sunt) quaterni, quindecim, triginta, quadraginta quinque seu antegressio, æqualitas numerorum... Pila autem vel ex volatu remittitur, vel ex primo resultu: ex secundo enim ictus est invalidus.» Il explique aussi comment on gagne une chasse, et comment on gagne la partie. Exercitatio linguœ latinœ,. — Leges ludi. — Opera, Bâle, 1555, 2 vol. in-fol., t. I, p. 50. (1er éd. des Dialogues, Paris, 1539). Charmants dialogues sur le même sujet, par Érasme, par Cordier, dans: Lusus pueriles, Paris, 1581, in-8°. Suivant Érasme, l'usage de la main demeurait, de son temps, plus élégant que celui de la raquette.
22. Colomesiana, dans Œuvres mêlées de Saint-Evremont, Londres, 1708, t. VI, p. 128.
23. «Tout de mesme que l'esteuf bat (les murailles) d'un jeu de paulme qui s'appelle à bricolle quand il n'y a qu'un toit du costé du service...» Fauchet, Origine des chevaliers. — Œuv., 1610, fol. 528.
24. Voir le frontispice de: le Jeu royal de la paume, Paris, 1632, reproduit en tête de notre volume, et la gravure de Crispian de Pas, dans Speculumn vitae scolasticœ, 1612. Jeu avec filet, infra, p. 26.
25. Toutefois, on ne renonça pas complètement aux jeux sans toits; il en existait encore au dix-huitième siècle. Le jeu (de courte paume) est «tantôt couvert, tantôt découvert». Académie des jeux, éd. de 1725.
26. Roman de la Rose. Les tripots, jeux de paume, se multiplient à partir du quinzième siècle; Villon les mentionne: c'est du moins l'interprétation que donne Marot du legs fait par le poète au jeune prêtre Colas Tacot:
    S'il sceust jouer en ung trippot,
    Il eust de moy le Trou Perrette.
27. La Fontaine, visitant le château de Richelieu, en 1663, constate qu'il se trouve dans le parc deux jeux de longue paume, orientés différemment, afin qu'on puisse jouer à toute heure sans être gêné par le soleil. Lettre à sa femme, 12 septembre 1663, Œuvres. — Grands Écrivains, t. IX, p. 280.
28. Leges ludi. — Opera, Bâle, 1555, 2 vol. in-fol., t. I, p. 50. Vivès mentionne la Belgique et la connaissait bien, ayant longuement séjourné à Louvain.
29. Bulletin de la Société de l'Histoire de Paris, 1885, p. 166. (Original en italien.)
30. Voyages et Voyageurs de la Renaissance, par M. Bonnaffé, 1895, p. 92.
31. The View of Fraunce, Londres, 1604. Dallington, né en 1561, séjourna en France en 1598. Il fut fait chevalier en 1624 et mourut, Master de Charterhouse, en 1637.
32. «(In) his exercises... the Frenchman is very immoderate, especially in those which are somewhat violent; for ye may remember ye haue seen them play sets at tennise in the heat of summer and height of the day, when others were scarce able to stirre out of dores.» Elyot avait déjà enseigné à ses compatriotes que la paume était trop violente: à cause des rivalités qu'elle excite, on ne peut se modérer. (Gouernour, éd. Croft, I, 293.)
33. Un Aperçu de la France, trad. par E. Émerique, Versailles, 1892.
34. Précellence du langage français, 1579, par Henri Estienne, éd. Huguet, 1896, p. 135. — Origine des chevaliers, par Fauchet, Œuvres, 1610, fol. 512.
35. La Maison des jeux... contenant un recueil général de tous les jeux divertissants pour se réjouir et passer le temps agréablement, Paris, 1668, in-12, dédié à «Mgr, frère unique du Roy». P. 174: Le Jeu royal de la paume (texte souvent réédité, à partir de 1592).
36. Pour ne rien dire d'une foule d'autres, tombés en désuétude depuis le déclin du jeu, mais dont Henri Estienne cite un grand nombre dans sa Précellence: «Que de bond, que de volée; jouer par dessus la corde; courir après son esteuf,» etc., ou, parlant au figuré: «Nous pelotions nos déclinaisons.» (Montaigne.)
37. Ballade sur son âge:
    J'ai tant joué avecques Age
    A la paume, que maintenant
    J'ai quarante-cinq: sur bon gage
    Nous jouons, non pas pour néant...
    Vieillesse de douleur enrage
    De ce que le jeu dure tant;
    Et dit en son félon langage
    Que les chasses dorénavant
    Merchera (marquera) pour m'être nuisant.
38. «Qu'on ne dise pas que je n'ai rien de nouveau: la disposition des matières est nouvelle; quand on joue à la paume, c'est une même balle dont on joue l'un et l'autre, mais l'un la place mieux.» Pensées.
39. Delamarre, Traité de la police, 2e éd., 1722, t. I, p. 489.
40. «Con grande architettura.» Giuoco della Palla, Venise, 1555, par Scaino, qui donne le plan et les dimensions de la salle (p. 164*).
41. Mémoires et Journal de Pierre de Lestoile, collection Michaut et Poujoulat, 1837, 2 vol. in-8°, t. II, pp. 245 et suiv.
42. État de la France, 1722, t. II, p. 287.
43. Art du paumier-raquetier, par De Garsault, Paris, 1767, in-fol.
44. «Le roi jouait à la paume à Versailles et, après avoir fini sa partie, se faisait frotter au milieu de ses officiers et de ses courtisans, lorsque M. Rose...» profita de ce que le roi était de bonne humeur pour obtenir que l'Académie française fût admise, comme les autres grands corps de l’État, à le féliciter désormais sur ses conquêtes, «chose qui donna bien du relief à la compagnie.» Mémoires de Charles Perrault, Avignon, 1759, in-12, p. 140.
45. Journal, 16 octobre 1686, 9 octobre 1687, 1er juin 1704.
46. Les étrangers continuaient de noter la passion des Français pour ce jeu: «Les jeunes gens se divertissent à tous les exercices du corps et surtout à la paume.» Lettre d'un Sicilien, datée de 1692, éd. Dufour, 1883, p. 62.
47. Par la bouche de De Garsault, Art du paumier-raquetier.
48. Éd. Fournier, le Jeu de paume, Paris, 1862, in-fol, pp. 16 et s.
49. C. G. Heathcote, Lawn Tennis, 4e éd., Londres, 1897, p. 136.
50. «Il faut premièrement estimer que ceux qui ont mis en usage cette manière de compter le jeu de paume par quinze pris quatre fois, comme dit est, n'ont point choisi ce nombre de quinze entre plusieurs autres sans quelque bonne raison. Certainement ils eussent pu aussi bien prendre quelque autre nombre plus petit... Or, les hommes doctes en Astronomie connaissants bien qu'un signe physic (qui est la 6° partie d'un cercle) est divisée par imagination en 60 degré, suivant celle raison sexagénaire, ils peuvent dire que cette manière de compter le jeu de paume a été instituée suivant icelle raison sexagénaire.» La Maison des jeux, 1668, p. 178 (reproduisant la Déclaration de deux doutes, par Gosselin, 1579, souvent réimprimée.
51. C'est ce qu'a montré, après que la question fut demeurée longtemps douteuse, M. Skeat (Athenœum, 4 avril 1896), qui cite un vers de Gower, de l'année de 1399 ou 1400:
Off the tenetz to winne or lese a chase.

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