Idolâtrie

«L'idolâtrie vient de ce qu'ayant soif de bien absolu, on ne possède pas l’attention surnaturelle, et on n'a pas la patience de la laisser pousser.

Faute d'idoles, il faut souvent, tous les jours ou presque, peiner à vide. On ne peut le faire sans pain surnaturel.
L'idolâtrie est donc une nécessité vitale dans la caverne. Même chez les meilleurs, il est inévitable qu'elle limite étroitement l'intelligence et la bonté.

Les pensées sont changeantes, obéissantes aux passions, aux fantaisies, à la fatigue. L'activitédoit être continue, tous le jours, beaucoup d'heures par jour. Il faut donc des mobiles de l'activité qui échappent aux pensées, donc aux relations : des idoles.

Tous les hommes sont prêts à mourir pour ce qu'ils aiment. Ils ne diffèrent que par le niveau de la chose aimée et la concentration ou la dispersion de l'amour. Aucun ne s'aime lui-même.
L'homme voudrait être égoïste et ne peut pas. C'est le caractère le plus frappant de sa misère et la source de sa grandeur.

L'homme se dévoue toujours à un ordre. Seulement, sauf illumination surnaturelle, cet ordre a pour centre ou lui-même ou un être particulier (qui peut être une abstraction) dans lequel il s'est transféré (Napoléon pour ses soldats, la Science, le Parti, etc.). Ordre perspectif.

Nous n'avons pas à acquérir l'humilité. L'humilité est en nous. Seulement nous nous humilions devant de faux dieux.»
Simone Weil, La pesanteur et la grâce.

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