Biographie de Jean-Baptiste Colbert

Louis Delavaud
COLBERT (Jean-Baptiste), ministre de Louis XIV, né à Reims le 29 août 1619, mort à Paris le 6 sept. 1683, fils aîné de Nicolas Colbert et de Marie Pussort. Après une jeunesse employée à d'obscurs travaux de commerce, il servit comme commissaire des guerres, puis devint secrétaire de Le Tellier qui, en 1649, lui fit donner le titre de conseiller du roi et le fit connaître à Mazarin (1651). Celui-ci l'apprécia et ne tarda pas à le charger de ses affaires à titre d'intendant. Dans ces fonctions délicates, Colbert fut économe et honnête en ce qui le concernait, tout en ne se dissimulant pas la malhonnêteté des moyens employés par le cardinal pour augmenter sa fortune; il multipliait envers Mazarin les expressions du dévouement le plus absolu et rien n'autorise à croire qu'il ne fut pas sincère; il lui prodiguait d'ailleurs les bons conseils et ce ne fut pas toujours uniquement pour les affaires privées du cardinal qu'il eut voix consultative. Il ne cessait, d'ailleurs, de demander à Mazarin des faveurs, de celles qui rapportent un bénéfice pécuniaire; mais cela n'avait rien de choquant dans un temps ou tous les serviteurs de l'État pouvaient presque, sans demander, prendre hardiment ce qui était à leur convenance; du moins Colbert voyait-il le mal dont il ne tirait bénéfice que très indirectement. Il avait demandé au cardinal sa confiance absolue (1652) et il obtint la disposition sans réserve de sa fortune. Le cardinal, vers la fin de sa vie, le chargea de surveiller l'administration des finances de l'État; il lui répondit avec fermeté et liberté; en oct. 1659, il lui adressa un mémoire où il exposait les malversations de Fouquet et proposait l'établissement d'un ordre exact, d'une administration royale, et d'une chambre de justice qui punirait les prévaricateurs; il conviendrait ensuite, ajoutait-il, de porter remède aux souffrances, des pauvres, de mieux répartir la taille, de surveiller les collecteurs d'impôts, de retrancher une multitude d'offices inutiles, surtout des offices de justice et de favoriser le développement de la richesse publique par le rétablissement de la marine et du commerce. C'est le programme que deux ans plus tard il était appelé à appliquer; Mazarin était à la fois trop intelligent pour n'en pas voir la grandeur, trop fatigué, trop sceptique et trop malhonnête pour en entreprendre la réalisation. Il se contenta de faire quelques observations à Fouquet et lui fit promettre de l'informer de tout; il continua à soumettre le travail du surintendant à l'examen de Colbert. En mourant, le cardinal recommanda Colbert à Louis XIV. On raconte qu'il lui dit: «Je vous dois tout et je crois m'acquitter en vous laissant Colbert.» Le roi avait apprécié depuis quelque temps l'honnêteté et l'esprit d'ordre de l'intendant de Mazarin; il lui donna d'autant plus volontiers sa confiance qu'il le voyait humble et soumis et qu'il était choqué de la vanité encombrante du surintendant. La lutte entre Colbert et Fouquet ne dura que quelques mois; chaque jour, Colbert démontrait au roi, avec une passion dont le bien de l'État n'était pas la seule cause, l'infidélité de Fouquet. La perte de celui-ci fut résolue, et, s'il méritait un châtiment exemplaire, l'acharnement avec lequel il fut poursuivi éveilla en sa faveur des sympathies qu'il ne méritait guère. Sa punition parut à une grande partie du public le résultat de la haine de Colbert et de Le Tellier désireux de se partager les dépouilles de leur rival, de Colbert surtout qui mena l'affaire et qui maintint pendant de longues années en disgrâce quelques-uns des juges du surintendant, trop indulgents à son gré. L'opinion publique était très complaisante pour les concussions dont Mazarin lui-même avait si largement profité.

Colbert était désormais en mesure d'appliquer ses plans. Il avait toute la confiance de Louis XIV, qui aimait la largeur de vues de son ministre et qui comprenait la grandeur et l'éclat des projets développés complaisamment devant lui par Colbert. Celui-ci fut le principal conseiller du roi pendant plusieurs années et il usa de cette situation au mieux des intérêts de l'État, sachant allier à la plus stricte économie un air de magnificence qui plaisait au souverain. D'abord simple intendant des finances (16 mars 1661), Colbert en devint l'administrateur unique sous l'ancien titre de contrôleur général dont les trois charges furent réunies en une seule entre ses mains (12 déc. 1656); il eut entrée et voix aux conseils d'État et des finances. Il ne devint secrétaire d'État qu'en 1669 (de la marine le 7 mars et de la maison du roi le 18 févr.); en 1669, il fut fait ministre d'État. Depuis 1661, il avait la direction des affaires de la marine, bien que M. de Lyonne eût la signature; il n'en fut chargé par commission qu'en 1666. Depuis 1664, il était surintendant des bâtiments et manufactures. En somme, il avait les attributions qui sont aujourd'hui réparties entre les ministres des finances, de la marine et des colonies, de l'agriculture, des travaux publics, du commerce, des beaux-arts, de l'instruction publique même, et jusqu'à un certain point de l'intérieur. Il fit confier à sa famille quelques-uns des plus grands emplois de l'État, dont elle était digne d'ailleurs, ne rougissant pas de demander au roi sans cesse de nouveaux bienfaits que ses services payèrent largement. Il touchait, comme surintendant des bâtiments, au moins 100,000 livres, comme contrôleur général, 200,000 livres par an et 50,000 livres en outre comme pot de vin des fermes générales, et ses filles eurent du roi un million de dot. On l'accusa d'avoir fait des spéculations sur les anciens billets de l'Épargne; il recevait, avec l'autorisation du roi, des gratifications des fermiers généraux, des États provinciaux, etc. Sa fortune était considérable; il était baron de Seignelay, de Sceaux, de Lignières; en 1681, il devint marquis de Châteauneuf; toutes ses terres étaient fort belles et bien entretenues. Sa vie était d'ailleurs magnifique, bien qu'il eût personnellement des goûts assez simples et se contentât de peu pour lui-même; il eut la faiblesse d'embellir sa généalogie par l'addition d'ancêtres de fantaisie auxquels personne ne crut. En 1665, il fut fait grand trésorier des ordres et, comme les autres officiers de l'ordre, porta les marques et insignes réservés aux chevaliers qui seuls faisaient les preuves de noblesse nécessaires; son frère, Maulévrier, fut même chevalier des ordres en 1688.

Les principaux titres de gloire de Colbert sont le relèvement des finances et du commerce et l'impulsion donnée à l'établissement de la marine royale. Dans son œuvre de restauration des finances, «les magnificences de Louis XIV contrarièrent toujours le système de Colbert... Il travaillait pour des ingrats» (Voltaire). «Esprit solide mais pesant, né principalement pour le calcul, Colbert, dit l'abbé de Choisy, débrouilla tous les embarras que ses successeurs avaient mis exprès dans les affaires. Une application infinie lui tenait lieu de science.»

Il commença par supprimer un grand nombre d'offices de finances et par déclarer les offices conservés «casuel,», c.-à-d. viagers, ou même révocables à volonté (1661-65). La comptabilité fut réorganisée; l'État fut affranchi des avances que lui faisaient ses receveurs par un système qui consistait à leur faire souscrire des obligations à quinze mois. Une chambre de justice fut instituée pour la recherche des abus et malversations commis dans les finances depuis 1635, «pour punir exemplairement tous les auteurs et complices des crimes énormes de péculat qui ont épuisé nos finances et appauvri nos provinces» (nov. 1661). La chambre de justice déploya une rigueur extraordinaire; plusieurs traitants furent pendus ou envoyés aux galères; deux commis des finances, Gourville et Bruant, furent condamnés à mort par contumace (1664). La plupart des financiers furent frappés de taxes énormes. Un édit de juill. 1665 convertit les peines corporelles en peines pécuniaires; l'ensemble en atteignit 135 millions (chiffre calculé par H. Martin). La chambre de justice fut supprimée en 1669, par commisération pour les familles que «l'appréhension de ces recherches tenait dans une inquiétude continuelle». L'État fut remis en possession d'une foule de droits et de revenus aliénés à vil prix (1662-65). Une commission spéciale fut instituée en 1667 pour le recouvrement du domaine aliéné ou usurpé. Les rentes excessives furent réduites, au delà même de ce que permettait l'équité; l'édit de déc. 1663 abaissa l'intérêt légal du denier 18 au denier 20, c.-à-d. de 5 1/2 à 5 0/o. Pour les fermes, on reprit le système des adjudications publiques. Les ordonnances de comptant furent réduites à un chiffre relativement modéré. Les finances municipales furent aussi réorganisées, les aliénations furent interdites aux communes qui ne purent faire d'emprunts que dans des cas fort rares et à charge de remboursement dans un délai fixé. Il ne suffisait pas d'empêcher l'exploitation frauduleuse des ressources de l'État, il fallait répartir l'impôt d'une manière plus équitable et en augmenter le rendement. Colbert réduisit à la fois la taille et les aides; mais, par suite de l'accroissement de la richesse nationale et de la consommation ainsi que par la conclusion de nouveaux baux avec les fermiers, les revenus montèrent en même temps que les dépenses diminuèrent. En 1663, l'assiette et la perception des tailles furent réglées à nouveau par une ordonnance; les exemptions injustes furent révoquées, et même les privilèges de certains districts ou de certaines villes. Les faux nobles furent poursuivis. Colbert eût voulu faire plus encore, substituer la taille réelle à la taille personnelle, comme cela existait en Languedoc et en Provence; il eût ainsi fait disparaître d'injustes inégalités; il introduisit la taille réelle dans la généralité de Montauban après en avoir fait faire le cadastre en trois ans (1669). En 1681, dans une réunion des intendants de Languedoc, Provence, Dauphiné et Guyenne, il fit arrêter un projet de reconstitution de la taille réelle qui ne fut appliqué que dans ces provinces. Divers droits d'aides furent supprimés. En sept. 1668, l'administration des gabelles fut réorganisée. En 1672, Colbert était parvenu à accroître, dans des proportions considérables, le revenu net; seule l'année 1670 avait présenté un excédent de dépenses sur les recettes. Mais la guerre de Hollande exerça, plus encore que ne faisaient les bâtiments du roi, une influence déplorable sur l'état des finances. Pour rassembler 45 millions avant d'entrer en campagne, il fallut recourir non seulement à la suppression d'un certain nombre d'offices qui furent réunis aux offices conservés, à la mise en adjudication des postes et voitures publiques et à la recherche des francs fiefs possédés par les roturiers, mais à des expédients moins légitimes (aliénations de domaines, doublement de certaines taxes de consommation, concession de l'hérédité à certains officiers publics, diminution du titre des monnaies, etc.). Il dut même consentir à l'emprunt, après une délibération du conseil, ou il avait opposé une résistance opiniâtre aux propositions faites en ce sens. «Voilà donc, dit-il, la voie des emprunts ouverte! Quel moyen restera-t-il désormais d'arrêter le roi dans ses dépenses! Après les emprunts, il faudra les impôts pour les payer, et, si les emprunts n'ont point de bornes, les impôts n'en auront pas davantage.» En 1673, il dut, malgré sa résistance, assigner 60 millions au fonds de la guerre; il avait déclaré impossible de subvenir à cette dépense. «Songez-y, lui dit le roi; il se présente un homme qui entreprendra d'y suffire si vous ne voulez pas vous y engager.» On rétablit des offices de finances et de justice supprimés; on en créa de nouveaux, en vendit aux bas officiers des exemptions des tailles; divers droits royaux turent aliénés; la taille fut augmentée; un emprunt de 900,000 livres fut émis. A la paix de 1678, Colbert se reprit à espérer. On a raconté qu'il disait un jour: «Je voudrais que mes projets eussent une fin heureuse, que l'abondance régnât dans le royaume, que tout le monde y fût content, et que, sans emplois, sans dignités, éloigné de la cour et des affaires, l'herbe crût dans ma cour.» Dès 1678, il diminua de nouveau la gabelle, ramenée au taux de 1672; il recommença la réduction des tailles; un nouvel emprunt permit de racheter des domaines publics aliénés. En 1680, il put ramener au denier 20 l'intérêt qui s'était élevé beaucoup pendant la guerre. En 1680, deux nouveaux règlements confirmèrent et développèrent ceux de 1664 et de 1668 sur les gabelles et les aides. Les aides furent réunies en une même ferme générale. En 1682, il avait remboursé ou converti 90 millions d'emprunts. Malheureusement, malgré l'augmentation des baux des fermes, le déficit croissait par suite de l'exagération des dépenses. En 1683, il adressa encore au roi un mémoire sur les finances qui est son véritable testament, demandant la réduction des tailles et la diminution des dépenses, «en vue du soulagement du peuple.»

Bien qu'il y ait eu des soulèvements populaires durant l'administration de Colbert, cet homme, si mal jugé par la populace, aimait profondément le peuple. Il n'avait cessé de penser à réduire les charges qui ne pesaient pas sur les plus riches, et il parlait avec émotion de la misère publique. Il s'occupa du développement de l'agriculture, du commerce et de l'industrie et prit à cet effet les mesures les plus sages. Jamais peut-être les campagnes n'avaient été plus malheureuses que de 1650 à 1660. Le blé avait enchéri d'une manière effrayante. (V. Feillet, la Misère au temps de la Fronde.) Colbert provoqua l'importation des grains étrangers en exemptant du droit de trente sous par tonneau les navires étrangers qui apporteraient du blé; l'État en acheta et le vendit à prix modéré ou le distribua gratuitement. De 1669 à 1683, l'importation des blés ne fut autorisée que neuf ans sur quatorze, suivant l'appréciation que le gouvernement faisait de la récolte; mais de nombreuses entraves furent apportées au commerce intérieur du blé. Il est difficile de défendre des mesures restrictives qui n'étaient que des remèdes passagers, tout au plus. L'agriculture fut encouragée par l'interdiction de saisir les bestiaux pour la taille (1663) ou pour dettes (1667); le droit de pied fourché sur le bétail fut aboli à 20 lieues autour de Paris. L'élévation des droits d'exportation repoussa les bestiaux étrangers. Les droits d'entrée et de sortie sur les bestiaux de province à province furent supprimés. Un arrêt du conseil rétablit les haras (1665); des étalons forent achetés et distribués; des privilèges furent accordés aux particuliers chargés du soin des étalons. La conservation des forêts fut protégée. L'ordonnance des eaux et forets (août 1669) «eût suffi, dit M. Clément, à illustrer un ministre». Les moyens de transport furent améliorés. Des routes nouvelles furent construites. Colbert facilita à Riquet les moyens de démontrer la possibilité de la jonction de la Méditerranée à l'Océan (1665); un édit d'oct. 1666, après le succès de l'expérience, lui concéda le droit de créer le canal des Deux-Mers, qui fut terminé en 1681, et qui devint «l'âme et la vie du Languedoc». A la suite d'un rapport présenté au roi par Colbert sur «tous les droits qui grèvent la circulation, l'importation et l'exportation des marchandises et qui ont toujours été croissant depuis le milieu du siècle dernier, le roi reconnut l'abus énorme de ces droits, si multipliés et si confus qu'ils arrêtent à chaque pas le marchand et le réduisent à la discrétion des commis». L'édit de sept. 1664 supprima un grand nombre de droits intérieurs; les lignes des bureaux des tarifs embrassèrent tout le centre de la France; la résistance des provinces privilégiées rendit l'application du tarif impossible au Midi, à la Bretagne, à l'Artois, à l'Alsace. Une foule de droits vexatoires avaient été réduits. Le régime des acquits à caution fut créé et appliqué à un grand nombre de denrées et surtout aux vins. Onze entrepôts francs furent établis dans certaines villes maritimes; en 1670, la faculté de l'entrepôt fut étendue à toutes les villes maritimes; Colbert offrait ainsi, comme il le disait, aux négociants étrangers «les portes de France comme une étape générale.» Il convient de citer encore, parmi les mesures prises dans l'intérêt du commerce, la déclaration du 9 janv. 1664 sur les lettres de change et billets à ordre; les ordonnances d'avr. 1664 et juil. 1669 sur le commerce de Lyon, et enfin l'ordonnance de commerce (mars 1673), qui est un admirable monument.

En ce qui concerne le commerce extérieur, Colbert avait pris pour principe la protection; mais en somme il fit preuve d'une certaine modération dans l'application de ce système. La prohibition frappa seulement l'importation de quelques articles de luxe. Le roi avait annoncé l'intention de mettre son royaume «en état de se passer de recourir aux étrangers pour les choses nécessaires à l'usage et à la commodité de ses sujets». Les droits de sortie furent augmentés sur les matières premières; les droits d'entrée sur certains objets fabriqués furent presque doublés (tarif de 1667); les droits sur l'entrée des matières premières et des denrées tropicales furent réduits. Colbert encouragea les fondations de grandes compagnies pour le commerce du Nord et pour celui du Levant. Les capitulations avec la Porte ottomane furent renouvelées par M. de Nointel. Des privilèges furent accordés au commerce de Marseille. Les relations de la France avec le Levant prirent une extension remarquable, en dépit d'un système de réglementation minutieuse qui avait d'ailleurs son bon côté. (A. Vandal, Une Ambassade de France à Constantinople, introduction.) Les draps français surtout circulèrent dans tout le Levant et pénétrèrent en Arménie et en Perse. Si peu justifiées qu'elles soient au point de vue des principes économiques, les mesures de protection prises en faveur de l'industrie nationale eurent d'heureux résultats et facilitèrent la tâche de notre commerce et de nos manufactures naissantes. Les abus inséparables de ce système ne peuvent faire oublier les succès réels de Colbert. Des privilèges furent accordés à la manufacture de tapis de Beauvais (1664) et à celle des Gobelins (1667). La culture de la garance fut rétablie (1671). La fabrication des draps fins fut introduite à Abbeville par les van Robais. Partout sous l'impulsion de Colbert et de son actif collaborateur Bellinzani, s'établirent des manufactures: de draps à Louviers et à Elbœuf; d'ouvrages de fils à Arras, à Reims, à Alençon, à Aurillac; de glaces au faubourg Saint-Antoine; des verreries, des cristalleries, des fonderies, des corderies, etc. L'industrie des métiers à laine prit un grand développement. Colbert, suivant l'exemple des villes industrielles d'Italie au moyen âge, ne craignit pas de recourir à des mesures rigoureuses pour rappeler en France les industriels et les ouvriers français; il attira du dehors les meilleurs ouvriers étrangers. En 1669, 44,000 métiers étaient employés dans l'industrie des laines; celle des soieries avait pris aussi un développement inouï. En 1666 et 1667, les points de fil, les étoffes et passements d'or et d'argent, les dentelles venant de l'étranger furent prohibés; nous avons déjà dit que l'édit de 1767 doubla certains droits d'entrée (sur la draperie, la bonneterie, les tapis, les cuirs fabriqués, les glaces, les toiles, etc.). Sans abandonner les saines théories économiques, on peut plaider les circonstances atténuantes en faveur d'un système protecteur, tel qu'il fut appliqué par Colbert, au profit de l'industrie française encore en enfance. Ce n'est pas ici, d'ailleurs, le lieu de discuter la valeur de ses principes, dont l'examen trouve place ailleurs.

Le système de réglementation intérieure du travail adopté par Colbert trouvera moins de défenseurs, bien qu'il ait eu quelques avantages passagers. Il revisa les statuts des anciennes corporations et en créa de nouvelles (édits de 1666 et 1673). Une ordonnance de 1669 règle les longueur, largeur et qualité de toutes les étoffes de laine et de fil. La moindre infraction (arrêt du roi du 24 déc. 1670) exposait les contrevenants à des confiscations, parfois à des châtiments corporels. Le monopole des corporations amenait la cherté des produits. Tout au plus peut-on dire que les règlements de Colbert «érigèrent en lois générales les procédés les plus perfectionnés qu'eussent pu découvrir les premiers fabricants de l'Europe, procédés que la routine, toute puissante encore, eût peut-être repoussés durant des générations entières; ils offraient, en même temps à l'acheteur les plus puissantes garanties de la loyauté du commerce et de la qualité du produit. C'était aux successeurs de Colbert de suivre l'esprit et non la lettre de ses lois et de les modifier suivant le besoin des temps» (Henri Martin). Il nous faut mentionner, pour terminer l'exposé de l'administration de Colbert en matière commerciale, le développement donné à la juridiction consulaire et la réforme de l'administration des monnaies. Les mesures prises en faveur du commerce se rattachent d'ailleurs, étroitement, à l'une des plus grandes œuvres de ce ministère, la restauration de la marine.

La marine avait été fort négligée pendant une partie du ministère de Mazarin, bien que celui-ci, comme Richelieu, en eût compris toute l'importance. Colbert y donna tous ses soins; il imprima une grande activité aux constructions de la flotte royale dans les arsenaux; il fonda Rochefort, il agrandit les ports de Brest et de Toulon; il fortifia Dunkerque; il créa des fonderies et des fabriques d'ancres et de canons; il établit des relations permanentes avec les pays du Nord pour faire amener en France des bois de construction, en même temps qu'il faisait faire des enquêtes sur la meilleure manière de conserver et exploiter nos forêts. On profita de tous les progrès qu'avait faits l'art de la construction chez les Anglais et les Hollandais. La question du personnel était plus difficile encore à résoudre que celle du matériel; il fallait recruter les équipages. Colbert se proposa d'avoir des équipages permanents; il est l'auteur du système de l'inscription maritime; une ordonnance du 22 sept. 1668 prescrivit à tous les gouverneurs des provinces maritimes de faire procéder au dénombrement de la population pour la partager en trois classes; cette disposition avait déjà été appliquée à la Rochelle, à Brouage, et en Saintonge par Colbert de Terron (ordonnance du 17 sept. 1665). L'exécution de ce système ne fut achevée qu'après les édits de 1673 et 1674. La discipline n'existait pas dans la marine; Colbert, pour l'y établir, multiplia les ordonnances, les réprimandes et les punitions; il fit régler les questions de préséance, chercha, par des dispositions qui ne furent pas facilement appliquées, à prévenir les conflits, et s'efforça de réduire les prétentions. Il réprima les abus commis par les officiers dans l'enrôlement des matelots, surveilla le service des vivres, apportant partout l'esprit d'ordre et d'économie. Il créa une école d'hydrographie, des écoles pour deux cents gardes-marine, etc., et tenta de répandre le goût de la vie maritime et de faire entrer dans la marine des officiers de haute naissance pour jeter sur le corps des officiers un éclat de nature à attirer l'attention sur la marine. Des grades furent conférés aussi aux capitaines marchands les plus habiles. Des écoles furent fondées pour l'artillerie de marine. Des ordonnances accordèrent aux matelots des privilèges et exemptions en compensation de l'établissement de l'inscription maritime. Des hôpitaux furent fondés dans les arsenaux de Toulon et de Rochefort. «L'accroissement de la flotte française en dix ans, dit H. Martin, fut quelque chose à confondre l'imagination.» En 1661, on n'avait, les galères à part, que 30 bâtiments de guerre. En 1671, on arriva à 196; et en 1683, à 276. L'inscription maritime fournit, en 1685, 78,000 matelots.

Il convient de citer les ordonnances de 1671, 1673 et surtout le règlement du 6 oct. 1674 sur la police des arsenaux. Tous les approvisionnements durent être d'origine française, excepté le cuivre, le plomb, et partie des bois qu'on pouvait tirer du dehors par l'entremise des marchands français. Il dut y avoir toujours un approvisionnement double du nécessaire pour l'entretien des vaisseaux existants, et, dans chaque arsenal, toujours du bois pour bâtir six vaisseaux neufs. A Rochefort on construisit, en 1671, treize vaisseaux de haut bord et on en arma trente et un. Ce qui nous paraît étonnant, c'est la rapidité avec laquelle on construisait à cette époque; on en vint à monter en quelques heures un navire dont toutes les pièces avaient été préparées. Un conseil de construction fut établi dans chaque port. Il faut rappeler les noms des habiles constructeurs, les Hubac, et l'ingénieur Renau. Il ne convient pas moins de citer le nom des administrateurs qui se firent les collaborateurs du ministre, d'Infreville, Desclouzeaux, Colbert de Terron, Arnou, Matharel, de Seuil, etc.

La compagnie des Indes orientales, fondée par un édit d'août 1664, avait pour souscripteurs quelques-uns des plus grands personnages de l'État. On avait pesé sur nombre de magistrats, de communautés, etc., pour les décider à souscrire, et l'académicien Charpentier avait rédigé un appel au public. La compagnie n'avait pas seulement le privilège du commerce des Indes; elle devait occuper et coloniser Madagascar; mais cette œuvre de colonisation fut si mal conduite que dès 1670 la compagnie céda l'île au roi. Mais en 1669, des comptoirs furent fondés à Surate; des privilèges furent obtenus du roi de Golconde, et, sans la guerre de Hollande, nous aurions sans doute acquis Ceylan. La pèche de la morue fut réglementée à Terre-Neuve. Le Portugal concéda au gouvernement français l'établissement d'un entrepôt franc à Lisbonne. Des compagnies d'assurances maritimes furent instituées. D'année en année, on vit croître le nombre et le tonnage des navires de commerce; leur construction fut encouragée par l'établissement de primes (4 à 6 fr. par tonneau pour tous navires au-dessus de 100 tonneaux). Une prime de 40 sous par tonneau fut accordée à tout navire qui irait chercher dans la Baltique des goudrons, des bois de construction, etc. Colbert a fondé un empire colonial et a favorisé le développement des cultures et du commerce des anciennes colonies. «Sa politique coloniale n'a pas été systématique, dit M. Pigeonneau; elle s'est inspirée avant tout des circonstances et des intérêts du pays. Le monopole n'a jamais été pour lui que le moyen et non le but; sauf l'exclusion des étrangers, il n'a été pour rien dans ce qu'on devait appeler plus tard le pacte colonial; il a eu sur le rôle des colonies, sur leur régime intérieur, sur leurs relations avec la métropole, des idées plus larges, plus élevées et plus justes que ceux qui l'avaient précédé et surtout que ceux qui lui succédèrent. Enfin, bonne on mauvaise en théorie, conforme ou non aux principes économiques, sa politique a eu un mérite qui en vaut bien un autre, elle a réussi.» Il a acquis Saint-Domingue, Tabago, la Dominique, relevé la Guyane, étendu le Sénégal, créé les établissements des Indes, fondé Pondichéry; Bourbon a eu une prospérité inconnue jusque-là; Cavelier de la Salle a ouvert de nouveaux débouchés, grâce à la protection de Colbert, au Canada, qui avait été racheté de la compagnie de la Nouvelle-France en 1663. En 1672, Colbert aurait volontiers accordé la paix aux Provinces-Unies moyennant la cession de colonies. La population française du Canada a quintuplé, celle des Antilles a doublé; cent cinquante navires français se rendaient chaque année aux Antilles, où s'étaient développées les cultures riches (canne à sucre, tabac, cacao). Des compagnies privilégiées étendirent sans frais les limites de nos possessions; elles étaient condamnées d'ailleurs à disparaître, parce qu'elles n'avaient pas les moyens suffisants pour tirer parti de leurs privilèges. En Afrique, Colbert a appliqué tous les systèmes successivement, sans parti pris. En Asie, il ne voulut avoir que des comptoirs. Son principal but était de développer le commerce de la métropole avec les colonies, l'une fournissant aux autres ce qui leur manquait et réciproquement; mais le Canada était principalement une colonie de peuplement; les Antilles des pays de productions. C'est en vain qu'on chercherait dans l’œuvre de Colbert une seule disposition interdisant l'établissement d'une industrie ou d'une culture ou une restriction à la liberté du commerce. Il n'agissait pas en vertu de théories abstraites; après avoir vu et indiqué dès 1653 la nécessité d'une politique coloniale, il avait fait faire à son arrivée au pouvoir (1661-1664) une vaste enquête dont les résultats lui montrèrent la voie à suivre, les moyens à employer.

Colbert s'est montré aussi particulièrement attentif au développement des arts, des sciences et des lettres. On a sans doute exagéré l'influence que, dans cet ordre d'idées, purent avoir les bienfaits de Louis XIV. Un gouvernement cependant peut s'honorer par des encouragements donnés aux auteurs et aux artistes dont il facilite les travaux. Nommé surintendant des bâtiments et des manufactures en 1664, il avait dans ses attributions les académies, la bibliothèque royale, l'observatoire, l'imprimerie royale, le Jardin des Plantes, ainsi que la direction des travaux de tous les bâtiments du roi, des ouvrages et des meubles destinés à ses palais, des jardins, parcs et canaux, etc. Il fit venir Bernin de Rome à Paris (1665), attira en France Puget, protégea Coysevox qui est l'auteur de son tombeau, Auguier qui a fait le buste actuellement conservé au Louvre, Perrault qui construisit la colonnade du Louvre, Le Vau qui travailla aux châteaux de Seignelay et de Sceaux et bâtit en partie les édifices de Rochefort, Blondel qui travailla aussi à Rochefort, Mignard, Lebrun, etc.; c'étaient de grands artistes que certains constructeurs ou décorateurs de navires; les vaisseaux et les galères étaient de belles œuvres d'art, mais les sculpteurs et peintres étaient invités à retrancher les dépenses superflues au-dedans des navires «où il ne convient pas de mettre tant d'ornements». Colbert considérait comme inutiles toutes les dépenses qui n'avaient pas d'intérêt pratique ou qui, tout au moins, ne tournaient pas à la gloire du roi.. Plusieurs artistes célèbres embellirent l'hôtel Colbert, célèbre par la magnificence de son ameublement. Colbert faisait chercher partout, sous la direction de Baluze, des livres précieux et des manuscrits rares; il provoquait les dons pour sa riche bibliothèque et pour celle du roi, qu'il administrait aussi. L'hôtel des Invalides fut construit et achevé en 1674; l'Observatoire fut fondé en 1667; Picard le dirigea et y attira Cassini et Römer. L'orientaliste d'Herbelot fut encouragé par Colbert; l'enseignement du droit romain fut réorganisé à Paris. Colbert a créé encore l'enseignement du droit français. Il fonda en 1663 l'Académie des inscriptions; en 1666, l'Académie des sciences; en 1671, l'Académie d'architecture; il attira en France Huyghens (1666) et pensionna plusieurs savants étrangers. Le roi se déclara le protecteur de l'Académie française; Colbert en fut membre; il y fit apporter des fauteuils et créa les jetons de présence. Il ne faut pas exagérer, comme l'a fait Voltaire, l'importance des libéralités répandues sur les savants et les gens de lettres français et étrangers. La liste des pensions qui leur fut accordée fut rédigée, sans discernement, par Chapelain; «rien de plus triste que ce monument. On imposa des tâches aux poètes; on leur fit payer en compliments ce qu'on faisait pour eux.
    Un Auguste aisément peut faire des Virgiles.
Ces niaiseries plates et serviles doivent-elles être prises au sérieux? Le chiffre des pensions, d'ailleurs, a continuellement baissé, puis, disparu. Une pension ne fait pas d'un littérateur médiocre un grand écrivain» (Paul Albert). Comment oublier cependant que le roi et Colbert assurèrent des loisirs à d'illustres écrivains?

Colbert s'est appliqué encore à la réforme des lois françaises. Son principal collaborateur, à cet égard, fut son oncle, Pussort (frère de sa mère), dont Saint-Simon dit «M. Colbert l'avait fait ce qu'il était; son mérite l'avait bien soutenu. Il fut toute sa vie le dictateur et, pour ainsi dire, l'arbitre et le maître de toute cette famille si unie.» Colbert le fit conseiller d'État (il devint doyen du conseil en 1691), l'un des deux conseillers au conseil royal des finances et le mit à la tête de toutes les grandes commissions du conseil et de toutes les affaires importantes du dedans du royaume. Un conseil de justice, où Pussort jouait le principal rôle, fut formé en 1665 avec la mission de réduire en une série de codes toutes les lois du royaume. En 1667 parut l'ordonnance civile ou code Louis; en 1670, l'ordonnance criminelle; cette législation «accourcit les griffes de la chicane» (Boileau); en 1681 fut rendue l'ordonnance de la marine. Un édit de 1672 reconstitua le régime hypothécaire. Un édit de 1673 réduisit les épices. Toutes ces lois se distinguent par l'ordre et la clarté. Les procédures pour sorcellerie furent suspendues; mais on maintint des mesures atroces contre les blasphémateurs. L'ordonnance criminelle fut la moins novatrice des réformes législatives du règne. Le code noir, préparé sous le ministère de Colbert et publié après sa mort, a adouci quelques dispositions rigoureuses des lois sur l'esclavage. En 1666, Colbert chargea Pussort de la police de Paris dont il prépara la réorganisation; le 12 mars 1667, M. de la Reynie fut nommé lieutenant général de police, charge nouvellement créée et détachée de celle de lieutenant-civil; ce devint une sorte de ministère, «fort important par la confiance directe du roi». L'ordre fut rétabli dans la ville qui fut éclairée d'une manière régulière et où furent entrepris de grands travaux d'édilité, notamment de nombreux boulevards. Colbert, qui préférait Paris aux coûteuses constructions de Versailles, avait projeté d'achever le Louvre et les Tuileries, dont Lenôtre refit le jardin, d'élargir les rues, de reconstruire les quais, d'élever de superbes arcs de triomphe, dont deux seulement ont subsisté. L'ordonnance de déc. 1672 régla ce qui concernait la juridiction du prévôt des marchands et l'approvisionnement de la capitale. Les justices seigneuriales furent supprimées à Paris (1674). Pour achever de peindre l'activité de Colbert qui s'appliquait à tous les objets du gouvernement, il ne nous reste plus qu'à montrer son attitude dans les questions religieuses. Il a, dans une certaine mesure, ménagé les protestants; il avait cependant décidé que les protestants ne pourraient former que la moitié des corporations et même le tiers seulement en Languedoc (1er févr. 1669). A la Rochelle, ils furent exclus des corps des métiers. L'édit d'août 1669 contre les émigrations devint contre eux une arme de guerre.

Colbert soutint énergiquement les théories gallicanes, soit dans l'affaire de la régale, soit lors de la déclaration de 1682. C'est seulement après la mort de Colbert que fut achevée l'œuvre de révocation de l'édit de Nantes; mais les édits et les arrêts qui s'étaient multipliés en 1682 et 1683 n'avaient plus guère laissé aucun droit aux réformés; on sait que leur émigration porta un coup funeste à notre industrie et par conséquent à la richesse publique qui avait été l'objet de toutes les préoccupations de Colbert. Les dernières années de ce grand homme furent affligées par sa lutte contre Le Tellier et Louvois, par l'ingratitude du roi, par le regret d'avoir dû créer des taxes onéreuses à la suite de la guerre et par l'inquiétude de l'avenir. Son œuvre n'était pas achevée et déjà elle était menacée. «Ce qu'il y a de plus important, disait Colbert en 1681, c'est la misère très grande des peuples.» «La postérité, dit Voltaire, chérira cet homme dont le peuple insensé voulut déchirer le corps après sa mort.» La guerre de Hollande, qu'il eût voulu empêcher, ruina les finances de la France ainsi que nous l'avons dit; il ne fit plus que lutter contre le torrent des dépenses improductives. Le roi était toujours jaloux des hommes qui lui paraissaient prendre une trop grande place; en vain Colbert avait-il soin de repousser toutes les flatteries assez durement, et, au lieu de s'attribuer le mérite de ses actes, d'en reporter toute la gloire au roi. Louis XIV était las de l'économie de Colbert qui gênait sa magnificence; depuis longtemps, une lutte sourde entre les Colbert et les Le Tellier divisait le conseil; Louvois était plus porté que Colbert à satisfaire les goûts de Louis XIV pour les grandes dépenses et flattait la passion du roi pour la guerre. Colbert ne pouvait suffire aux frais de guerres continuelles. D'autre part, comme surintendant des bâtiments, il était aussi forcé de faire appel à la modération du roi qui voulait toujours bâtir sans calculer ses ressources. D'accord avec Louvois, il réussit, en 1679, à faire disgracier M. de Pomponne qui fut remplacé par M. Colbert de Croissy; mais l'influence de celui-ci fut annulée par celle de Louvois, désormais prépondérante; Colbert mourut désespéré, presque en disgrâce, et refusant à sa dernière heure d'entendre parler du roi, son ingrat souverain.

Colbert avait épousé le 14 déc. 1648 Marie Charon de Ménars (1630-16 août 1687), désignée sons le nom de la sage Mélinde dans la Carte de la cour, de Guéret (1663); la première femme de secrétaire d'État qui entra dans les carrosses du roi, et qui était aussi très estimée de la reine et de la dauphine; Louis XIV la chargea d'élever la fille qu'il avait eue de Mlle de la Vallière; on lui confia le soin des layettes des petits-enfants du roi. Colbert eut d'elle: Jean-Baptiste Colbert, marquis de Seignelay (V. plus bas); Jacques-Nicolas, né le 14 févr. 1655, mort le 30 déc. 1707. Dès 1678, il fut élu membre de l'Académie française, où il fut reçu par Racine qui lui dit: «Ce n'est point la brigue, ce ne sont point les sollicitations qui ouvrent nos portes.» Archevêque de Rouen, il se distingua par sa tolérance; il fit restaurer le château de Gaillon; il vivait avec beaucoup de magnificence; «très aimable, très appliqué à son diocèse». Il hérita de la bibliothèque de son père (dont le catalogue a été dressé en 1728); il la légua au comte de Seignelay qui la vendit au roi; — Antoine-Martin , né le 2 oct. 1659 , mort le 2 sept. 1689, chevalier de Malte le 1er août 1667, bailli de l'ordre général des galères, colonel du régiment de Champagne, brigadier des armées du roi, mort d'une blessure reçue au combat de Valcourt; — Jules-Armand, marquis d'Ormoy, titré marquis de Blainville en 1682, né le 17 déc. 1663, mort le 17 août 1704 des blessures reçues à la bataille d'Hochstædt, secrétaire des bâtiments en survivance (28 mars 1674-sept. 1683), capitaine au régiment de Picardie (1683), colonel en 1684, brigadier en 1693, maréchal de camp en 1702, lieutenant général en 1703, inspecteur général de l'infanterie (1702), grand-maître des cérémonies (30 janv. 1685-1701); «il jouissait d'une considération singulière, dit Saint-Simon, et pouvait espérer le bâton de maréchal;» il épousa Mlle de Tonnay-Charente (Marie-Gabrielle de Rochechouart), fille du maréchal duc de Vivonne, dont il eut une fille, mariée à Jean-Baptiste de Mortemart, comte de Maure; — Louis, abbé de Bonport, puis comte de Linières (V. plus loin); — Charles-Edouard, comte de Sceaux, colonel du régiment de Champagne, tué le 1er juil. 1690 à la bataille de Fleurus; — les duchesses de Mortemart, de Chevreuse et de Beauvilliers.

La plupart des papiers de Colbert sont conservés à la Bibliothèque nationale; mais il y en a un assez grand nombre aux archives nationales, aux archives des affaires étrangères et surtout aux archives de la marine. Les plus importants ont été publiés par M. P. Clément (Lettres, Mémoires et documents de Colbert, 1861-82, 9 vol. in-8). D'autres ont été insérés dans certains recueils cités ci-dessous.

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