Multiculturalisme

Le multiculturalisme est un mot doté de nombreuses acceptions, selon qu'on l'utilise au Canada, aux États-Unis, en Australie, en Europe ou ailleurs. Pour une définition du terme dans le contexte canadien, voir Wayne Norman, «Justice and Political Stability in the Multicultural State», dans Mondialisation, citoyenneté et multiculturalisme. Il rappelle que c'est Pierre Elliott Trudeau qui, en 1971, a approuvé une première politique destinée à refléter la réalité d'une contrée qui allait continuer d'attirer des immigrants venant de partout à travers le monde. Les gardiens officiels de cette politique d'ouverture seront la Charte canadienne des droits et libertés (1982) et la Loi sur le Multiculturalisme canadien (1988).

Dans Finding Our Way: Rethinking Ethnocultural Relations in Canada (1998), Will Kymlicka énumère les politiques qui constituent le fond du débat public sur le multiculturalisme au Canada. Elles comprennent notamment:
    - Des programmes d'action positive qui cherchent à augmenter la présence des minorités visibles dans les institutions.
    - Des représentations faites au Parlement en faveur des minorités visibles.
    - Des révisions de programmes scolaires destinées à tenir compte des contributions historiques et culturelles des minorités ethniques.
    - Des horaires flexibles, pour accomoder les pratiquants de certaines religions.
    - Des programmes d'éducation à orientation anti-raciste.
    - Des codes de conduite qui interdisent le racisme à l'école ou au travail.
    - Une formation multiculturelle pour les policiers, fonctionnaires et intervenants du monde de la santé, afin qu'ils puissent reconnaître la nature des problèmes vécus par les familles d'immigrants.
    - Des lignes directrices qui préviennent la propagation des stéréotypes dans les médias.
    - Le soutien des festivals et programmes d'études ethniques.
    - Des services aux adultes dans leur langue maternelle.
    - Des programmes d'éducation bilingue pour les jeunes, en vue de leur permettre de faire la transition entre leur langue maternelle et celle(s) de leur pays d'adoption.

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Le multiculturalisme en France:

"Dans la conception française de cette notion: un des modèles possibles de l'intégration à la communauté politique et nationale des populations immigrées.

Note:
La France a une conception particulière du multiculturalisme, qui tient à la fois à l'histoire de la construction de la nation et à l'image qu'elle se fait de sa culture. De formation plurielle, la France a aujourd'hui conscience que son unité nationale n'était pas contradictoire avec le respect de sa diversité. La culture française n'a elle-même de référence 'universelle' qu'en raison de la richesse des apports extérieurs dont elle s'est toujours nourrie. L'image qui caractérise sans doute le mieux la relation culturelle de la France avec le reste du monde, et d'abord avec les immigrés qui sont installés sur son sol, n'est pas celle d'une assimilation forcée; c'est celle d'un lent métissage, de part et d'autre accepté et entretenu, au service d'un projet de construction permanente de la nation et de la société républicaine."

source: Les mots de l'immigration et de l'intégration (Commission de terminologie et de néologie du domaine social, Min. de l'Emploi et de la Solidarité)

Essentiel

«Très noble en principe, surtout quand on la formule dans les couloirs feutrés d'un parlement loin des quartiers chauds, un verre de martini à la main, l'idée de multiculturalisme pèche par le fait qu'elle est définie superficiellement et qu'elle introduit dans le corps social, et la culture qui donne sens et cohésion à ce dernier, un élément fragmenteur qui s'appelle le vouloir individuel absolu. Le vouloir d'un électron libre de choisir ses allégeances, de fabriquer sa pâte identitaire comme on commande un repas à la carte. C'est la modernité qui multiplie à l'infini les appartenances et crée une illusion d'unité par gonflement d'un langage diplomatique et flou auquel tous entendent ce qu'ils veulent bien entendre. C'est le village global aux multiples traditions populaires déracinées et réduites à l'état de caricature. Toute racine lui est odieuse, toute définition dangereuse, toute verticalité un démenti à sa Weltanschaung festive, technicienne et horizontale.»

Jean-Philippe Trottier, Une leçon de contrepoint

Le multiculturalisme, notion abstraite, est incompatible avec cette conception de la société : «On a mis dans la tête des gens que la société relevait de la pensée abstraite alors qu'elle est faite d'habitudes, d'usages, et qu'en broyant ceux-ci sous les meu les de la raison, on pulvérise des genres de vie fondés sur une longue tradition, on réduit les individus à l'état d'atomes interchangeables et anonymes. La liberté véritable ne peut avoir qu'un contenu concret: elle est faite d'équi libres entre des petites appartenances, de menues solidarités: ce contre quoi les idées théoriques qu'on proclame rationnelles s'acharnent; quand elles sont parvenues à leurs fins, il ne reste plus qu'à s'entre-détruire. Nous observons aujourd'hui le résultat.»

Claude Lévi-Strauss, De près et loin

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