Nobel Alfred Bernhard

21 / 10 / 1833-10 / 12 / 1896

Vie et personnalité

«Né à Stockholm en 1833 de parents suédois, Alfred Nobel s'est installé avec sa famille à Saint-Pétersbourg, à l'époque capitale de la Russie, alors qu'il n'avait que neuf ans. Par la suite, il a vécu dans divers pays et a fini par se considérer comme un citoyen du monde. Il n'a cependant jamais renoncé à sa nationalité suédoise.

Grâce à l'éducation cosmopolite qu'il avait reçue, Alfred Nobel lisait, parlait et écrivait couramment cinq langues européennes: le suédois, le russe, l'anglais, le français et l'allemand. Ses nombreuses lettres manuscrites montrent qu'il était remarquablement versé dans toutes les cinq. Il avait perfectionné son français dans les dernières années de son adolescence, son père l'ayant envoyé étudier la chimie à Paris. Ses lettres françaises sont particulièrement élégantes et, alors que celles en anglais portent parfois la trace du style du début du XIXe siècle généralement associé à Byron et Shelley ­ ses deux poètes préférés ­ elles sont remarquablement exemptes de fautes grammaticales et idiomatiques. A sa mère, il écrivait toujours en suédois, langue qui est aussi celle du testament rédigé à Paris.

Les domaines couverts par les prix institués par son testament reflètent les intérêts personnels d'Alfred Nobel. Alors qu'il ne prévoyait pas de récompenses pour les architectes, les artistes, les compositeurs ou les spécialistes de sciences sociales, il se montrait généreux à l'égard de ceux qui étaient actifs en physique, en chimie, en physiologie et médecine ­ matières que lui-même connaissait le mieux et dont il espérait les plus grands progrès.

Alfred Nobel a souffert tout au long de sa vie d'une santé fragile et il faisait souvent des cures dans des villes d'eau, «moins pour boire de l'eau que pour le repos». Mais il s'attendait à de grands progrès dans le domaine de la médecine, et de fait elle en a réalisé bon nombre.

Il lui arriva d'engager à Paris un jeune physiologiste suédois pour mettre à l'épreuve ses théories personnelles sur les transfusions de sang. Ses efforts restèrent infructueux, mais le problème fut résolu plus tard par un Autrichien, Karl Landsteiner, qui reçut en 1930 le Prix Nobel de physiologie ou médecine.

Le Prix de littérature reflète également les préférences du fondateur. Dès sa prime jeunesse il écrivait et lisait assidûment, mais par la suite il détruisit beaucoup de ses poèmes d'adolescence en suédois. Il conservait toutefois un long poème autobiographique en anglais, dont il donnait à l'occasion des copies à des amis intimes. Lecteur éclectique, il lisait des livres dans toutes les langues qu'il connaissait. Ce qu'il entendait dans son testament par les termes de «tendance idéaliste» ressort des livres et des auteurs auxquels allaient ses préférences. En 1895, au moment même où il rédigeait son testament définitif, il exprimait dans ses lettres son enthousiasme pour certains auteurs, dont la Suédoise Selma Lagerlöf qui devait être en 1909 la première femme à recevoir le Prix Nobel de littérature.

La récompense que destinait Alfred Nobel à ceux qui serviraient la cause de la paix reposait sur des motifs tout aussi personnels, et le fait qu'il recommande particulièrement « les organisateurs et promoteurs de congrès de la paix » montre qu'il pensait à son amie autrichienne, la baronne Bertha von Suttner, dont il avait financé les congrès de la paix à Rome et à Berne.

Encore qu'il fût préoccupé des problèmes de la paix bien avant de la rencontrer, elle stimula sans doute davantage encore son intérêt à cet égard. En 1905, la baronne von Suttner remporta le Prix de la paix.

Pourquoi la Norvège a-t-elle été choisie pour décerner le Prix de la paix ­ c'est une question souvent posée. Nobel lui-même n'a pas motivé son choix. Il convient de rappeler cependant que de son vivant, la Suède et la Norvège formaient encore une union, qui a été dissoute pacifiquement en 1905. Quand Alfred Nobel dressa son testament, il lui parut sans doute tout naturel de partager la responsabilité de l'attribution des prix entre les deux Etats dont se composait sa patrie. Son admiration pour le grand écrivain et patriote norvégien Bjørnstierne Bjørnson (lauréat du Prix de littérature en 1903) a également pu y contribuer.

La fortune de Nobel

La grande fortune d'Alfred Nobel peut être attribuée à sa capacité de joindre l'intelligence du scientifique et de l'ingénieur à l'intuition et au dynamisme de l'industriel.

La fortune d'Alfred Nobel est fondée sur ses inventions. A sa mort en 1896, il détenait 355 brevets, sur la base desquels il avait créé des sociétés dans quelque 90 villes d'une vingtaine de pays. La plupart de ses capitaux provenaient de ses activités industrielles en Grande-Bretagne,en France, en Allemagne, en Suède et en Russie.

Dans son testament, Nobel stipulait que la majeure partie de son patrimoine devait être placée dans une fondation et investie en «valeurs sûres». En conséquence, 31,5 millions de couronnes suédoises (ce qui équivaut aujourd'hui à environ 1,5 milliard de couronnes) ont été affectés à la création de la Fondation Nobel. La Fondation est indépendante des sociétés qui, un peu partout dans le monde, portent aujourd'hui encore le nom de Nobel.

Les Prix Nobel

Par expérience, Alfred Nobel n'aimait pas les hommes de loi et s'en méfiait, et vers la fin de 1895 il rédigea son testament définitif sans l'avis ou l'assistance d'aucun juriste. Ce testament, qui en remplaçait deux plus anciens faits en 1889 et 1893, stipulait que le revenu de sa fortune, qui à son décès en 1896 s'élevait à 33 200 000 couronnes suédoises, serait partagé tous les ans en cinq parts égales et distribué «sous la forme de prix à ceux qui dans l'année écoulée auraient rendu les plus grands services à l'humanité».

Il disposait que les prix seraient répartis comme suit: «... une part à qui aura fait la découverte ou l'invention la plus importante dans le domaine de la physique; une à qui aura fait la découverte ou le progrès le plus remarquable en chimie; une à qui aura fait la découverte la plus importante dans le domaine de la physiologie ou de la médecine; une à qui aura produit dans le domaine littéraire l'oeuvre la plus remarquable d'une tendance idéaliste; et une part à celui qui aura agi le plus ou le mieux pour la fraternisation des peuples, l'abolition ou la réduction des armées permanentes ainsi que pour la formation et la diffusion de congrès de la paix». Le testament stipule également que «les prix soient décernés sans aucune considération de nationalité de sorte qu'ils soient attribués au plus digne, Scandinave ou non».

Cependant, au regard de la loi, le testament ne désignait en fait pas de légataire pour la fortune elle-même, et à sa lecture en janvier 1897 il fut vivement contesté par certains membres de la famille Nobel. Par ailleurs, Nobel n'avait pas consulté les diverses institutions en question pour s'assurer qu'elles consentaient à assumer la responsabilité de l'attribution des prix.

Les politiciens critiquaient l'idée comme telle et le Roi Oscar II de Suède et de Norvège était sceptique à son égard pour diverses raisons.

Plus de trois ans s'écoulèrent avant que l'affaire fût enfin réglée, et il fut alors décidé d'instituer comme légataire une Fondation Nobel qui gérerait le capital des Prix Nobel, tandis que les divers organismes désignés par le testament acceptaient de se charger de l'attribution des prix.

L'exécuteur testamentaire désigné par Nobel, son jeune collaborateur Ragnar Sohlman, contribua de manière déterminante au succès final, par la création en 1900 de la Fondation Nobel. Sohlman devint par la suite directeur général de la Fondation.

Les institutions Nobel

La désignation des candidats au Prix de la paix fut confiée à un comité nommé par le Storting, le Parlement norvégien. Lui-même membre de l'Académie royale des Sciences de Suède, Nobel la considérait comme l'institution appropriée pour choisir les lauréats de physique et de chimie. La désignation des lauréats du Prix de physiologie ou médecine fut confiée au Karolinska Institutet de Stockholm, au sujet duquel il avait entendu des rapports favorables. Quant à l'Académie suédoise, à laquelle il demanda de se charger du Prix de littérature, sans doute ne la connaissait-il guère, mais il jugea certainement qu'en tant qu'homologue de l'Académie française, elle était la mieux qualifiée pour assumer la difficile mission de désigner les lauréats de ce Prix.

Cinq comités Nobel spéciaux sont rattachés aux institutions chargées d'attribuer les prix.

Chacun de ces comités compte cinq membres et peut demander à des experts non membres de donner leur avis à titre complémentaire. L'organe administratif général est la Fondation Nobel de Stockholm. La tâche principale de son Conseil d'administration est la gestion des fonds et autres biens de la Fondation.

Le Prix de sciences économiques

En 1968, à l'occasion de son tricentenaire, Sveriges Riksbank (la Banque de Suède) a institué un Prix de sciences économiques en mémoire d'Alfred Nobel en mettant à la disposition de la Fondation Nobel une somme annuelle équivalente au montant des autres prix. Le lauréat du Prix de sciences économiques doit être désigné chaque année par l'Académie royale des Sciences de Suède. La nomination des candidats, l'attribution, le décernement et la remise du prix ont lieu en conformité avec les règles des Prix Nobel.

Les méthodes de sélection

Sont habilités à proposer des candidats aux prix: les anciens lauréats des Prix Nobel, dans leurs domaines respectifs; les membres des institutions chargées de décerner les prix et ceux des Comités Nobel, dans leurs secteurs propres; des professeurs représentant chaque discipline, soit en tant qu'appartenant à certaines universités, soit appelés par invitation spéciale des divers groupes qui décernent les prix; les présidents de sociétés littéraires représentatives (littérature); les membres de certaines organisations internationales parlementaires ou juridiques (Prix de la paix); les membres des Parlements et des Gouvernements (Prix de la paix). Quiconque se propose lui-même au Prix Nobel est automatiquement disqualifié. Il convient de mentionner que seules les personnes appartenant aux institutions citées, et non les institutions en tant que telles, sont en droit deproposer des candidats. Ni les autorités suédoises ni les autorités norvégiennes n'ayant d'influence sur les décisions en matière de prix,nulle démarche ou recommandation officielle en faveur d'un candidat ne peut avoir d'effet.

Les Comités examinent les propositions, qui doivent leur être parvenues avant le 1er février,et au début de l'automne leurs rapports sont soumis aux institutions respectives chargées de décerner les prix. Après avoir examiné les mérites des candidats, les institutions annoncent leur décision définitive à la mi-octobre. Toutes les délibérations des instances qui attribuent les prix sont secrètes.

Les cérémonies de remise des prix

Les Prix Nobel de physique, de chimie, de physiologie ou médecine et de littérature, de même que le Prix de sciences économiques, sont remis solennellement aux lauréats par S.M. le Roi au cours d'une cérémonie qui a lieu, d'habitude, a la Salle des concerts de Stockholm le 10 décembre, jour anniversaire de la mort d'Alfred Nobel en 1896 à San Remo, Italie. La remise du Prix Nobel de la paix a lieu le même jour à l'hôtel de ville d'Oslo.

Chaque lauréat reçoit une médaille Nobel en or et un diplôme. Le montant du prix, qui varie en fonction du revenu net du capital, est versé après le 10 décembre selon les modalités souhaitées par le lauréat. En 2001, la valeur des prix Nobel est approximativement de 10 millions de c.s. par prix. Ces récompenses sont considérées par un très large public comme le premier titre honorifique civil au monde. Tout en incitant les lauréats et les candidats en puissance à de nouveaux efforts, elles ont servi à faire connaître bien plus largement qu'il n'en aurait été autrement les réalisations scientifiques et littéraires ainsi que les actions accomplies au service de l'humanité.»

Source: Svenska Institutet

Articles





Articles récents