Art gothique

La période gothique s'étend de la moitié du XIIe siècle à la Renaissance (XIVe siècle).

La forme architecturale la plus caractéristique de l'art gothique est l'ogive, que l'abbé Suger introduit dans l'art occidental en 1144, lors de la reconstruction de l'église abbatiale de St-Denis.


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De l'art français à l'art gothique (Ernest Renan)
«Le style gothique nous apparaît ainsi comme un art purement français. Il naît avec la France, au centre même de la nationalité française, dans ce pays florissant et riche qui se dégageait le premier de la fécondité germanique, fut le berceau de la dynastie capétienne, et en recueillit avant tous les autres les bénéfices. Ce fut, comme l’a dit M. Viollet-le-Duc, l’architecture du domaine royal. Soumis à l’influence essentiellement française de la royauté et de l’abbaye de Saint-Denis, ce pays, au XIe siècle et au XIIe fut le théâtre d’un grand éveil de l’esprit humain, d’une sorte de renaissance, qui se traduisit en poésie par les chansons de geste, en philosophie par l’apparition de la scolastique, en politique par le mouvement des communes et l’administration de Suger, en religion par saint Bernard et les croisades. L’architecture gothique ou, pour mieux dire, le mouvement de construction d’où elle sortit fut le produit des mêmes causes. En ce qui concerne les communes, ce ne fut pas sans doute une circonstance fortuite qui fit coïncider leur établissement avec la rénovation architecturale. L’église, à cette époque, avait hérité du forum et de la basilique ancienne; c’était le lieu des réunions civiles, et, en effet, ce sont des villes de communes, Noyon, Laon, Soissons, qui élèvent les premières cathédrales gothiques.

Qu’aucun élément, ni italien, ni allemand, ne se mêlât à cette première renaissance toute française du XIe et du XIIe siècle, si tristement arrêtée au XIVe, c’est ce qui, pour l’architecture, est de toute certitude. Cent ans au moins le style ogival reste la propriété exclusive de la France. Les bords du Rhin se couvraient encor de constructions romanes, quand les chefs-d’œuvre du style ogival étaient déjà élevés dans la France du nord. L’Angleterre eut des églises gothiques bâties dès le XIIe siècle, mais par des Français. En 1174, la reconstruction de la cathédrale de Cantorbéry ayant été décidée, on ouvrit un concours: ce fut Guillaume de Sens, célèbre par de grands travaux, qui fut choisi, et qui commença le chœur dans le système nouveau qui déjà régnait exclusivement en France. Au XIIIe siècle, les innombrables maîtres maçons qui portèrent ce style jusqu’aux confins de l’Europe latine étaient des Français. Le premier architecte gothique non français dont le nom nous soit connu est Erwin de Steinbach (1277). En Allemagne, jusqu’au XIVe siècle, ce style s’appelle "style français", opus francigenum, et c’est là le nom qu’il aurait dû garder. Malheureusement la fatalité qui priva la France de la gloire de ses chansons de geste se retrouve ici. L’esprit étroit qui domine à partir de saint Louis, les violences de l’inquisition, les malheurs de la guerre de Cent ans, éteignent chez nous le génie. Strasbourg et Cologne deviennent les écoles du style que nous avions créé. La France voit à son tour chez elle des artistes étrangers. Le style français passe pour allemand; l’Italie l’appelle tudesque, puis, par un contresens des plus bizarres, fait prévaloir pour le désigner l’absurde dénomination de gothique. Il faut se rappeler que les barbares furent surtout connus à l’Italie par les Goths. Gotico devint synonyme de barbaro, et une légende représenta les Goths comme des êtres fantastiques acharnés à la destruction des monuments romains, qu’ils venaient marteler pendant la nuit. Dans leur dédain pour cette architecture, qui n’était pas conforme aux ordres grecs, et qui leur était profondément antipathique, les Italiens du XVIe siècle l’appelèrent gotica, et ce nom fut d’autant plus facilement accepté par la France du XVIIe siècle, que le mot gothique avait pris en français, par suite de l’influence italienne, une nuance analogue (écriture gothique, les temps gothiques, etc.). De là à prétendre que les Goths avaient inventé ce style, il n’y avait qu’un pas: Vasari le franchit, et aujourd’hui ce non-sens historique n’est pas encore déraciné de l’Italie.

Comment se forma ce style extraordinaire, qui, durant près de quatre cent ans, couvrit l’Europe latine de constructions empreintes d’une si profonde originalité? Les doctes et judicieuses recherches que je rappelais tout à l’heure ont résolu la question. Les anciennes hypothèses, et d’une influence orientale, et d’une origine germanique, et d’un prétendu type xyloïdique (architecture de bois), doivent être absolument abandonnées. Le style gothique sortit du style roman par un épanouissement naturel, ou, si on l’aime mieux, par le travail d’hommes de génie tirant avec une logique inflexible les conséquences de l’art de leur temps: il fut la continuation d’un style antérieur, créé vers l’an 1000 et déduit lui-même des lois qui jusque-là avaient présidé en Occident à la construction des temples chrétiens.»

ERNEST RENAN, "L'art du moyen âge" in Mélanges d'histoire et de voyage, Paris, Calmann-Levy, 1878.

Essentiel

«Plus je vois les monuments gothiques, plus j’éprouve de bonheur à lire ces belles pages religieuses si pieusement sculptées sur les murs séculaires des églises. Elles étaient les archives du peuple ignorant. Il fallait donc que cette écriture devint si lisible que chacun pût la comprendre. Les saints sculptés par les gothiques ont une expression sereine et calme, pleine de confiance et de foi. Ce soir, au moment où j’écris, le soleil couchant dore encore la façade de la cathédrale d’Amiens; le visage calme des saints de pierre semble rayonner.»

DAVID D'ANGERS, cité par E. RENAN, op.cit


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«[...] la flèche flamboyante échappa comme le profond soupir d'une poitrine oppressée depuis mille ans. Et si puissante était la respiration, si fortement battait ce cœur du genre humain, qu'il fit jour de toutes parts dans son enveloppe; elle éclata d'amour pour recevoir le regard de Dieu.

Regardez l'orbite amaigri et profond de la croisée gothique, de cet œil ogival, quand il fait effort pour s'ouvrir, au XIIe siècle. Cet œil de la croisée gothique est le signe par lequel se classe la nouvelle architecture. L'art ancien, adorateur de la matière, se classait par l'appui matériel du temple, par la colonne, colonne toscane, dorique, ionique. L'art moderne, fils de l'âme et de l'esprit, a pour principe, non la forme, mais la physionomie, mais l'œil; non la colonne, mais la croisée; non le plein, mais le vide. » (suite)

JULES MICHELET, Histoire de France, 1833

Articles


Gargouille

Eugène Viollet le Duc
article «Gargouille» du Dictionnaire de l'Architecture par Viollet le Duc, accompagné des gravures de l'auteur.

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