Culture et postmodernisme
Le postmodernisme, tel que présenté par [Yves] Boisvert, n'est pas la nouvelle forme de la culture, mais la négation même de la culture. Il implique une démission de l'homme devant le type de technologisme que nous connaissons. La culture a toujours été, en même temps qu'une expression de la société, la critique, la contestation, la mise en question de cette société. Il est de sa nature même d'affirmer que l'homme transcende le société. Dans la perspective postmoderniste, ce n'est pas le monde extérieur, la société, la technologie, la production qui sont en fonction de l'homme, mais l'homme qui est en fonction de tout ce qui est extérieur à lui. Cette approche comporte une part de résignation et même de capitulation. Elle comporte en réalité la négation même de la culture, alors que c'est seulement celle-ci qui peut rendre la postmodernité un peu plus humaine.
Il y a culture quand l'homme n'est plus partie dépendante de l'univers, mais créateur d'espace de conscience et de liberté, que ce soit à travers des moeurs, des représentations, des oeuvres d'art, des mythes ou des croyances. C'est ainsi que peu à peu l'homme de la préhistoire s'est construit un habitacle qui lui permettait de surmonter les déterminismes de la nature. Dans la postmodernité, il semble bien que la société menace de submerger l'homme. " La domination de la société sur l'individu, écrit Marcuse, est infiniment plus grande que jamais ". Et plus loin : " le processus mécanique dans l'univers technologique détruit ce que la liberté a de secret et d'intime " (1). Ce n'est pas là une nouvelle forme de culture, mais une menace à la culture. C'est justement le rôle de celle-ci de protéger l'homme de cette agression. »
Note
1. HERBERT MARCUSE, L'Homme unidimensionnel, traduit par Monique Witting, Paris, Éd. de Minuit, Coll. Points, 1968, pp. 18, 57.