Le Trust
Mais à quoi, se demandera-t-on, sert cet argent ? Pour l'essentiel, à la protection de l'environnement, à la défense d'espèces menacées, voire à la défense de certains droits civils qui pourraient être battus en brèche. On aura donc compris que les objectifs de son Trust sont de nature surtout écologique. Rien n'a été prévu par Marguerite Yourcenar, en effet, pour la promotion de la littérature en général ou de son oeuvre en particulier. Un soir qu'elle m'entretenait de ses dernières volontés, sans entrer dans les détails, et que je l'interrogeais sur ses intentions à l'égard de son oeuvre, elle me répondit : «Que l'œuvre se défende elle-même!», puis elle parla d'autre chose.
Jusqu'ici, ce qui revient à dire depuis quinze ans, le Trust a versé environ 100 000 $ par année aux organismes susceptibles d'émarger à son budget. Car il importe de préciser que ses contributions s'effectuent à l'intérieur d'une liste close. Aussi le Trust n'encourage-t-il de ses deniers que les organismes auxquels l'écrivain cotisait déjà de son vivant. Peut-être convient-il d'ajouter qu'une tranche de 20 000 $ est prélevée chaque année sur la somme précitée et confiée à tour de rôle à l'un des quatre administrateurs du Trust, cette personne peut en disposer à sa guise en faveur d'organismes de son choix figurant sur la liste.
Si le Trust a pu jusqu'à présent distribuer annuellement la somme mentionnée plus haut, il n'est pas sûr en revanche qu'il pourra toujours le faire au même rythme dans l'avenir. Par ces temps d'incertitude financière, il lui faut compter avec les fluctuations du portefeuille et avec une éventuelle érosion des droits d'auteur, pour l'heure substantiels, mais qui s'éteindront tout de même à l'expiration du délai légal en 2037. Néanmoins, aussi longtemps qu'il le pourra, le Trust assurera la mission dont l'a investi la générosité posthume de Marguerite Yourcenar.