Paul Éluard, de son vrai nom Eugène Émile Paul Grindel, est un poète français, né à Saint-Denis, le 14 décembre 1895, mort le 18 novembre 1952 à Charenton-le-Pont. Après sa séparation avec Gala, il a vécu des années très heureuses (1931-1946) avec Nusch, rencontrée chez Salvador Dali. Nusch fut sa compagne amoureuse et sa complice de tous les combats pour la liberté durant la guerre d'Espagne et la seconde guerre mondiale. Or, lors d'un séjour en Suisse en novembre 1946, il apprend la mort subite de sa femme. Ce fut une rupture soudaine et brutale provoquant un deuil très lourd à porter. Les poèmes de son recueil Le temps déborde témoignent de son sentiment d'isolement, de séparation, de finitude dans un monde devenu distant et indifférent.
Vingt-huit novembre mil neuf cent quarante-six
Nous ne vieillirons pas ensemble
Voici le jour
En trop: le temps déborde.
Mon amour si léger prend le poids d'un supplice.
MA MORTE VIVANTE
Dans mon chagrin rien n'est en mouvement
J'attends personne ne viendra
Ni de jour ni de nuit
Ni jamais plus de ce qui fut moi-même
Mes yeux se sont séparés de tes yeux
Ils perdent leur confiance ils perdent leur lumière
Ma bouche s'est séparée de ta bouche
Ma bouche s'est séparée de ton plaisir
Et du sens de l'amour et du sens de la vie
Mes mains se sont séparées de tes mains
Mes mains laissent tout échapper
Mes pieds se sont séparés de tes pieds
Ils n'avanceront plus il n'y a plus de routes
Ils ne connaîtront plus mon poids ni le repos
Il m'est donné de voir ma vie finir
Avec la tienne
Ma vie en ton pouvoir
Que j'ai crue infinie
Et l'avenir mon seul espoir c'est mon tombeau
Pareil au tien cerné d'un monde indifférent
J'étais si près de toi que j'ai froid près des autres.
Nous ne vieillirons pas ensemble
Voici le jour
En trop: le temps déborde.
Mon amour si léger prend le poids d'un supplice.
MA MORTE VIVANTE
Dans mon chagrin rien n'est en mouvement
J'attends personne ne viendra
Ni de jour ni de nuit
Ni jamais plus de ce qui fut moi-même
Mes yeux se sont séparés de tes yeux
Ils perdent leur confiance ils perdent leur lumière
Ma bouche s'est séparée de ta bouche
Ma bouche s'est séparée de ton plaisir
Et du sens de l'amour et du sens de la vie
Mes mains se sont séparées de tes mains
Mes mains laissent tout échapper
Mes pieds se sont séparés de tes pieds
Ils n'avanceront plus il n'y a plus de routes
Ils ne connaîtront plus mon poids ni le repos
Il m'est donné de voir ma vie finir
Avec la tienne
Ma vie en ton pouvoir
Que j'ai crue infinie
Et l'avenir mon seul espoir c'est mon tombeau
Pareil au tien cerné d'un monde indifférent
J'étais si près de toi que j'ai froid près des autres.