Tout à l'opposé d'Elon Musk qui déclarait récemment que « la faiblesse fondamentale de la civilisation occidentale est l'empathie », l'ex-première ministre néo-zélandaise, Jacinda Ardern, croit que la politique moderne devrait être fondée sur l'empathie. Une des politiciennes les plus en vue de la nouvelle génération de politiciennes, elle disparaissait abruptement de la scène politique en 2023, usée par la violence des critiques et des propos haineux à son endroit. Elle vit aujourd'hui au Massachussetts où elle suit un cours en leadership empathique à Harvard. Elle vient de publier ses mémoires dans lesquels elle explique son retrait de la vie politique et plaide pour une "réhumanisation de la vie publique".
Un entretien à lire dans The Guardian.
Selon plusieurs commentateurs, dont le théoricien des médias Andrey Mir, les modes de pensée et de discours de l'ère numérique ressemblent de plus en plus à ceux des cultures orales pré-alphabétisées. Ces auteurs s'appuient largement sur les travaux du philosophe Walter Ong, philosophe qui a développé dans Orality and Literacy une théorie très influente, quoique controversée, sur la façon dont les cultures orales et littéraires divergent.
« Andrey Mir affirme que l'"oralité numérique" a plongé de nombreux conservateurs et progressistes dans l'abîme de la caverne de Platon - le royaume allégorique où les intuitions subjectives sont prises pour des vérités objectives. La droite subordonne la raison au culte de la personnalité de Trump, tandis que la gauche accorde moins de valeur à l'empirisme qu'à l'"intersectionnalité". Il en résulte un "tribalisme identitaire", une polarisation et une crise de la démocratie représentative.»
Quelques traits de l'oralité
«Dans une culture orale, toutes les idées importantes doivent être exprimées d'une manière qui soit à la fois mémorable et facile à réciter.»
«Cela implique, entre autres, l'utilisation intensive de répétitions, de formules, de moyens mnémotechniques et d'épithètes.»
«Par ailleurs, dans une société orale, la communication doit toujours se faire face à face, souvent à portée de voix des autres villageois ou hommes de clan. Selon Ong, cela imprègne le discours d'un esprit combatif, car les déclarations ont tendance à se doubler de demandes de statut et d'affirmation sociale.»
«Plus important encore peut-être, ces limites de l'oralité l'ont rendue incapable d'accueillir la pensée abstraite.»
Un essai à lire dans Vox (en anglais).
Il y a près de 20 ans un programmeur californien écrivait le futur programme de l'administration Trump 2.0:
«Au printemps et à l'été 2008, alors que Donald Trump était encore inscrit au registre des démocrates, un blogueur anonyme connu sous le nom de Mencius Moldbug publiait un manifeste intitulé Lettre aux progressistes à l'esprit ouvert. Rédigée avec la désaffection narquoise d'un ancien croyant, cette lettre de cent vingt mille mots affirmait que l'égalitarisme, loin d'améliorer le monde, était en fait responsable de la plupart de ses maux. Le fait que ses lecteurs bien-pensants pensent autrement, selon Moldbug, est dû à l'influence des médias et de l'université, qui travaillent ensemble, bien qu'involontairement, pour perpétuer un consensus gaucho-libéral. Il a donné à cette alliance néfaste le nom de "cathédrale". Moldbug ne demande rien de moins que sa destruction et un "reboot" total de l'ordre social. Il propose "la liquidation de la démocratie, de la Constitution et de l'État de droit", et le transfert éventuel du pouvoir à un PDG omnipuissant, qui transformerait le gouvernement en "une société ultra-profitable et lourdement armée". Ce nouveau régime vendrait les écoles publiques, détruirait les universités, abolirait la presse et emprisonnerait les "populations décivilisées". Il licencierait également les fonctionnaires en masse (une politique que Moldbug appellera plus tard RAGE - Retire All Government Employees) et mettrait fin aux relations internationales, y compris aux "garanties de sécurité, à l'aide étrangère et à l'immigration de masse".»
Un portrait de Mencius Moldbug, alias Curtis Yarvin, penseur des "lumières obscures (Dark Enlightment)", dans le New Yorker (en anglais). Lire également ce commentaire du philosophe Mike Brock,Yarvin et les mécanismes de l'effondrement démocratique (en anglais). Mike Brock, un ex-ingénieur de la Silicon Valley, a été l'un des premiers à avoir attiré l'attention sur les projets révolutionnaires du Big Tech.