Vapeur (machine à)

DOSSIER EN RÉVISION

Il s'agit d'une machine qui, afin de produire un travail mécanique, utilise la vapeur d'eau chauffée. Le passage qui suit, tiré d'un article de revue du XIXe siècle, en décrit le fonctionnement de base : «Réduite à ses plus simples éléments, la machine à vapeur se compose d’une chaudière où l’eau devient de la vapeur en absorbant le calorique du foyer et d’un cylindre dans lequel la vapeur, en poussant un piston, perd le calorique qu’elle avait absorbé et se résout en eau. Le piston transmet le mouvement qu’il a reçu à une roue, à une bielle ou à un balancier. Ainsi la machine et l’eau qu’elle contient ne sont (...) que des organes intermédiaires qui servent à transformer de la chaleur en travail.» (H. Blerzy, «Études sur les travaux publics : la machine à vapeur», Revue des deux mondes, 1er août 1872, p. 543)

C'est l'Anglais James Watt qui, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, apporta à la machine à vapeur les perfectionnements qui permirent à celle-ci de jouer un rôle décisif lors de la révolution industrielle.

Essentiel

Pour les hommes du XIXe siècle, la machine à vapeur inspire des sentiments variés, allant du respect craintif à l’émerveillement (cf. ce poème). Voici ce qu’en dit, non sans naïveté, H. Blerzy, dans la Revue des deux mondes de 1872 :
    «Dans le nombre de ces serviteurs inconscients et quelquefois rebelles, le plus redoutable ou, pour mieux dire, le plus redouté est sans contredit la machine à vapeur. On aurait vite fait de compter les personnes qui ne tremblent pas devant cet énergique instrument. On le soumet à la surveillance comme un malfaiteur incorrigible, on l’éloigne des habitations comme un pestiféré, et cependant vit-on jamais serviteur plus docile ? Lorsqu’on se trouve en présence de ces engins gigantesques qui roulent, se balancent, vont et viennent sans bruit, sans choc et sans repos, la première impression d’effroi surmontée, l’esprit se sent satisfait. Il ne reste plus que le sentiment d’un immense travail accompli sans que personne en ait la fatigue. Il était pénible jadis de voir l’homme s’user dans un travail purement musculaire, on s’apitoie même quelquefois au spectacle d’animaux domestiques qui tournent machinalement dans un manège ou s’épuisent en efforts sur un attelage embourbé ; la vue d’une machine qui accomplit un acte de force brutale et ne laisse à l’ouvrier qu’une œuvre de surveillance intelligente nous fait éprouver une certaine quiétude. Grâce à la vapeur, le rôle de l’homme est devenu dans nos manufactures plus noble. A ce point de vue, la machine à vapeur est un prodigieux instrument de progrès et de civilisation.» («Études sur les travaux publics : la machine à vapeur», Revue des deux mondes, 1er août 1872, p. 541-542)

Quel regard pouvons-nous jeter, aujourd'hui, sur cette invention et sur la place qu'elle occupe dans l'histoire des techniques énergétiques. Voici le point de vue de Marcel Boiteux, qui fut pendant plusieurs années directeur général et président d'Électricité de France :
    «Plus encore que le harnais, une découverte majeure va alors changer la face du monde : la machine à vapeur.

    Ne voilà-t-il pas qu’avec ce genre de machines, on peut transformer l’énergie thermique, dont on dispose largement, en cette énergie mécanique qui manque depuis si longtemps ! Pour le physicien, la machine à vapeur, la transformation des énergies, la thermodynamique, tout cela constitue une étape intéressante dans le progrès des connaissances. Pour l’économiste, c’est un formidable événement. On dispose d’énergie thermique abondante, on manque cruellement d'énergie mécanique, rare et coûteuse. Et voilà une machine qui permet de transformer gentiment l’une en l’autre, de faire du mouvement avec de la chaleur. Le muscle qui travaille est remplacé par du bois qui brûle dans une chaudière.

    C’est une telle révolution qu’en peu de temps – à l’échelle des siècles – on va manquer de bois. Il faut du bois pour faire les charpentes des maisons, pour construire les bateaux, pour y mettre de grands mâts. Il faut du bois aussi dans la métallurgie où se fabriquent ferrures et armes. Et voilà qu’il en faut aussi pour les machines à vapeur. Les forêts occidentales menacent d’être ravagées.

    C’est alors que l’exploitation des mines de charbon arrive, à son heure, pour relayer celle des forêts. Grâce à la machine à vapeur, qui permet de pomper l’eau des mines et d’en faire remonter mineurs et minerais, l’exploitation des gisements de charbon change fondamentalement de dimension. Et, grâce au charbon, les forêts sont sauvées : l’énergie thermique retrouve l’abondance qui justifiait sa transformation en énergie mécanique par la machine à vapeur.

    L’alliance de la machine à vapeur et de la métallurgie, en plein essor grâce au charbon, va conduire aussi au chemin de fer, qui bouleverse l’économie du transport. Finies les diligences, fini le règne de la voie d’eau et du halage : le chemin de fer échappe au diktat des fleuves et des rivières, qu’il longe ou qu’il traverse allégrement. Et les progrès de la métallurgie vont permettre d’équiper efficacement un grand nombre de chutes d’eau pour faire le même travail que la machine à vapeur.

    Cette fois, on a gagné : le muscle, le muscle humain en tout cas, cesse enfin d’être la principale source d’énergie mécanique. Dans les usines, machines à vapeur ou chutes d’eau font tourner des roues, lesquelles entraînent des courroies qui distribuent le mouvement dans les ateliers. Quant au chemin de fer, il transporte les charges et les gens bien plus aisément que les gabares et les voitures de poste.

    Dans la foulée, les grands voiliers renoncent aux galériens, qu’on remplace par des voiles supplémentaires et des marins et, plus tard, par des machines à vapeur.

    Mais le muscle animal reste encore très sollicité pour porter les cavaliers et tirer les calèches dans les villes, traîner les charrues et les charrettes dans les campagnes, et pour assurer les grands transports que le chemin de fer n’assume pas encore.

    D’autre part, la machine à vapeur ou l’énergie hydraulique ne peuvent prendre en charge les besoins diffus d’énergie mécanique pour tirer l’eau des puits dans les campagnes, pour la distribuer dans les villes, pour battre le grain et remplir les silos, pour animer le tour du potier et la meule du coutelier… (...)» (Marcel Boiteux, «Du muscle à l’atome», Commentaire, no 97, printemps 2002)

Articles


Machine à vapeur : poème

Fèvre-Desprez
Une poésie qui montre bien le culte rendu à la machine en ce XIXe siècle.

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