Essentiel
Forget-me-not, «ne m'oublie pas», est son nom anglais, équivalent du nom allemand. Le myosotis est la fleur du souvenir. Les combattants de l'alzheimer en ont fait leur symbole.
Elle, si petite, si légère, si discrète, fleur de la grave mémoire? Mais non! Par son apparence, elle évoque plutôt le tendre et pâlot souvenir qui subsiste de joies lointaines. Dans ce poème d'Appolinaire, la jeune fille mit-elle du myosotis dans ses cheveux ?
Le chevalier
«Ah Dieu, que la guerre est jolie
Avec ses jeux, ses longs loisirs
Cette bague, je l'ai polie
Le vent se mêle à vos soupirs.
Adieu! Voici le boute-selle!»
Il s'en alla en sifflotant
Et mourut là-bas tandis qu'elle
Riait au destin surprenant.
L'amoureuse de cette chanson de Brassens devait en semer le long de sa route:
«Quand tu partis, quand
Tu levas le camp
Pour suivre les pas
De ton vieux nabab,
De peur qu' je n' sois triste,
Tu allas chez l' fleuriste
Quérir un' fleur bleue,
Un petit bouquet d'adieu,
Bouquet d'artifice ;
Un myosotis,
En disant tout bas
Ne m'oubliez pas.»
Le myosotis, George Brassens
(
suite)
Et le poète s'en contentera:
Va vite, léger peigneur de comètes !
Les herbes au vent seront tes cheveux ;
De ton œil béant jailliront les feux
Follets, prisonniers dans les pauvres têtes...
Les fleurs de tombeau qu’on nomme Amourettes
Foisonneront plein ton rire terreux...
Et les myosotis, ces fleurs d’oubliettes...
Ne fais pas le lourd : cercueils de poètes
Pour les croque-morts sont de simples jeux,
Boîtes à violon qui sonnent le creux...
Ils te croiront mort – Les bourgeois sont bêtes –
Va vite, léger peigneur de comètes !
Tristant Corbière
Avril est de l'aurore un frère ressemblant;
Il est éblouissant ainsi qu'elle est vermeille.
Il a l'air de quelqu'un qui rit et qui s'éveille.
Or, nous sommes au mois d'avril, et mon gazon,
Mon jardin, les jardins d'à côté, l'horizon,
Tout, du ciel à la terre, est plein de cette joie
Qui dans la fleur embaume et dans l'astre flamboie:
Les ajoncs sont en fête, et dorent les ravins
Où les abeilles font des murmures divins;
Penché sur les cressons, le myosotis goûte
À la source, tombant dans les fleurs goutte à goutte;
Le brin d'herbe est heureux; l'âcre hiver se dissout;
La nature paraît contente d'avoir tout,
Parfums, chansons, rayons, et d'être hospitalière.
L'espace aime.
Victor Hugo , L'Art d'être grand-père