Tobias Wong est né à Vancouver le 10 juin 1974 dans la province de Colombie Britannique, Canada, de parents originaires de Hong Kong. A l'âge de 35 ans, cet «enfant terrible» du monde du design s'est pendu le 30 mai 2010. Pourquoi? Et pourquoi à ce moment précis de sa carrière? Tobias Wong était sur le point d'ouvrir une nouvelle agence et venait de participer avec succès à l'International Contemporary Furniture Fair à New York. Avec Tim Dubitsky, son compagnon de vie et gérant de publicité en design, Tobias nourrissait le projet d'avoir un enfant par procuration.
Ainsi, en mourant, Tobias a causé une surprise et a laissé ouvertes de nombreuses questions, comme il l'a fait durant tout son vivant et tout au long de sa carrière. Gradué du programme de sculpture de la Cooper Union, il créa une oeuvre qui interrogea le consumérisme d'une industrie qui en était elle-même la promotrice et la productrice. Il se servit du terme «paraconceptuel» pour désigner son oeuvre. Avant tout, Tobias était un artiste qui eut le don de métamorphoser les objets les plus ordinaires ou même des oeuvres issues du design. Son suicide lui-même a tendance à se révéler, aux yeux de ses amis et de ses collègues, comme un concept -osons l'appeler- «paranormal» et - pourquoi pas?- «transcendental» ou encore comme un de ces «tours» excentriques qu'il aimait jouer durant des réunions publiques ou des événements officiels. Son jeu de créativité insolente débordait ses oeuvres, pour la bonne raison que ce jeu fit partie de sa vie et de sa personnalité ludiques ou, plus précisément, du personnage qu'il s'était choisi d'incarner ou qu'il s'était façonné de lui-même comme un «artefact».
D'après des intimes, Tobias n'agissait pas comme quelqu'un qui n'avait pas de projets d'avenir ou qui avait rompu avec la vie. Par contre, il semblait rêver d'un vie somptueuse et pleine de jouissances. Serait la manifestation de frustration ou d'insatisfaction devant des besoins ou des désirs non comblés? Il n'était traité ni pour maladie mentale* ni pour toxicomanie*. À noter: il souffrait de daltonisme, ce qui n'a, en principe, aucun lien avec des comportements suicidaires. Il était, par ailleurs, un travailleur infatigable et un insomniaque.Selon le témoignage de ses proches, Tobias Wong souffrait de troubles de sommeil, appelés cliniquement «parasomnia» ou, en termes plus populaires, de «somnambulisme» chronique. Il connut des moments de terreur cauchemardesque. Son partenaire Tim Dubitsky le trouva parfois en larmes ou dans un état bizarre et s'exprimant dans un langage incohérent. À d'autres moments, descendant du lit comme un zombie, il accomplit des tâches professionnelles ou artistiques, qui réclamaient beaucoup de concentration et de dextérité, ou encore joua-t-il des tours «à se faire pendre»!
Plus il était stressé, plus ses épisodes de somnambulisme allaient en croissant. Aucun médicament ni aucune diète n'aidaient à contrôler ce malaise éprouvant. Il connut des phases de paranoïa jusqu'à s'imaginer que son partenaire voulut le tuer. Selon Dr Mark Mahowald, directeur du Minnesota Regional Sleep Disorders Center, les somnambules sont à moitié conscients et à moitié endormis, aptes à exécuter des conduites complexes, mais inaptes à exercer quelque responsabilité sur leurs actes. Des somnambules peuvent se lancer sur une autoroute pour faire du jogging et se faire happer par une voiture ou faire un saut du pont d'un navire dans la mer. C'est pourquoi les experts parlent de la mort par «parasomnia» en termes de pseudo-suicide. Ce qui voudrait dire qu'une telle mort a toutes les apparences d'un suicide, mais qu'elle n'est pas une mort volontaire. Il s'agirait plutôt d'une mort accidentelle.
La mort de Tobias a été reconnue officiellement par le coroner comme étant un suicide. Ou s'agit-il du résultat accidentel d'un épisode de «parasomnia» ?
SOURCES
Alex Williams, «The Mysteries of Tobias Wong»,
New York Times, le 25 juin 2010.
http://www.nytimes.com/2010/06/27/fashion/27Wong.html?_r=2&pagewanted=all
William Grimes, «Tobias Wong, Witty Designer and Conceptual Artist, Dies at 35»,
New York Times, le 3 juin 2010.
http://www.nytimes.com/2010/06/03/arts/design/03wong.html?ref=fashion
Alexandra Marshall, «In Memoriam | Tobias Wong»,
New York Times, le 4 juin 2010.
http://tmagazine.blogs.nytimes.com/2010/06/04/in-memoriam-tobias-wong/?ref=fashion
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digboston.com