L'Encyclopédie sur la mort


Laon Anselme de


Anselme de Laon « Loué par ses contemporains et critiqué par le seul Pierre Abélard, Anselme de Laon (entre 1030 et 1050 - 15 juillet 1117) constitue l'une des figures majeures de la « Renaissance du XIIe siècle ». Anselme n'est pas seulement l'auteur probable de gloses et de commentaires bibliques, il est aussi le rédacteur de sentences théologiques à la diffusion manuscrite non négligeable. Afin de comprendre cette figure magistrale, il convient de restituer la carrière d'Anselme, de suivre la transmission de ses sentences théologiques et d'étudier la constitution des recueils rattachés à son enseignement. Il devient alors possible de montrer la manière dont un maître aussi prestigieux a fait école, de son vivant et jusque dans les dernières décennies du XIIe siècle ( Cédric Giraud, Per verba magistri. Anselme de Laon et son école au XIIe siècle, « Bibliothèque d'histoire culturelle du Moyen Âge (BHCMA 8) »,Turnhout, Brepols, 2010, 631 pages.).

Ce qu'Abélard raconte des enseignements d'Anselme

« ... je reviens en France, principalement dans l'intention d'étudier la théologie, que le même Guillaume de Champeaux enseignait après beaucoup d'éclat dans son évêché de Châlons. Il avait eu pour maître dans cette science Anselme de Laon, depuis longtemps regardé comme le plus grand théologien de ce temps.

J'allai donc entrendre Anselme. Ce vieillard devait sa grande réputation plutôt à la routine qu'à son génie. Si vous alliez frapper à sa porte et consulter sur quelque difficulté, vos doutes s'augmentaient et vous reveniez plus incertain qu'avant. Admirable aux yeux d'un auditoire, il était nul en présence d'un adversaire. Il avait une merveilleuse abondance de langage, mais sous ses belles paroles le sens était vide et pauvre de raison. Lorsqu'il allumait son feu il remplissait sa maison de fumée, il ne l'éclairait point. Son arbre, tout en feuillage touffus, présentait de loin un aspect imposant; mais quand on venait à l'examiner de plus près, on le trouvait stérile. Je m'en étais approché pour recueillir du fruit; je reconnus que c'était le figuier maudit par le Seigneur, ou le vieux chêne auquel Lucain compare Pompée dans ces vers :

"L'Ombre d'un grand nom était seule debout, comme un chêne altier dans une campagne fertile. "

Une fois désabusé, je ne restai pas longtemps oisif sous son ombre. Je n'assistait plus que rarement à ses leçons, et cette inexactitude blessait les principaux disciples d'Anselme comme une marque de mépris pour un tel docteur. Ils l'excitèrent donc sourdement contre moi, et leurs perfides suggestions m'en firent un ennemi.

[...]; mais les calomnies d'Anselme et sa rancune jalouse tournèrent en mon honneur et ses persécutions ne firent qu'accroître ma renommée. » (Abélard, Hisoire de mes malheurs, traduit du latin par M. R. L'Abbé, révision de la traduction, notes et postface par Jérôme Vérain, Éditions de Mille et une nuits, 2001, p.13 - 17)


Voici l'épitaphe gravée sur sa tombe à l'abbaye Saint-Vincent de Laon :

« Il dort en ce tombeau le très illustre maître Anselme
À qui par les pays et les climats du vaste monde
Ont valu partout la célébrité, partout la louange
Foi sans défaut, doctrine féconde, vertu respectable
Vie lumineuse, main généreuse, action prudente
Éloquence agréable, fermeté vigilante, correction indulgente
Sagesse dans le conseil, modestie, prévenance et douceur
Mais ces dons que lui amassa largement la grâce de Dieu
Le sombre juillet les a dispersés au néfaste jour des ides
Puisqu'elle fut sa force dans la vie
Que la grâce l'accompagne dans la mort ».

Date de création:-1-11-30 | Date de modification:2012-04-12