Escroc ou financière hors pair ? Dans les années 1920, Marthe Hanau enflamma la Bourse de Paris et défraya la chronique mondaine, avant de tomber, victime de ses propres pratiques et des attaques de ses concurrents (Tristan Gaston-Breton. Les Échos, n° 20721 du 19 Juillet 2010, p. 9)
http://archives.lesechos.fr/archives/2010/LesEchos/20721-58-ECH
Née le 1er janvier 1886 à Paris, Marthe Hanau est issue d'une famille de commerçants juifs d'Alsace. À l'âge de 22 ans, elle épouse Lazare Bloch, mais elle divorce après que celui-ci eut dilapidé sa dot au jeu. Au lendemain de la première guerre* mondiale, Marthe monte une petite usine de parfumerie. C'est à cette époque que démarre son intérêt pour les finances, domaine jusqu'alors exclusivement réservé à la gent masculine. En 1925, Marthe Hanau fonde La Gazette du franc, destinée d'abord à soutenir la monnaie nationale, mais qui, au fur et à mesure, lui servira à lancer en Bourse certains titres de sociétés qu'elle avait elles-même constituées. Grâce à la réputation de sa revue et aidée par son ex-mari ainsi que par des industriels et des politiciens renommés, comme André Citroën et Aristide Briand, elle crée un groupe de gestion financière qui propose aux petits épargnants un taux d'intérêt supérieur à ceux accordés par les banques. La réussite de la « Banquière des petits épargnants» comme on se plaît à la nommer, à la fois femme et juive, ainsi que son train de vie dans un hôtel particulier proche du bois de Boulogne, ses voitures luxueuses et ses visites fréquentes aux salles de jeu, engendrent le soupçon. La Presse crie au scandale, des comités de victimes se forment et portent plainte.
« Marthe Hanau est arrêtée une première fois le 4 décembre 1928. Inculpée pour escroquerie et abus de confiance, elle est emprisonnée à la prison Saint-Lazare. Elle entame une grève de la faim, s'évade de l'hôpital Cochin où elle a été transférée, mais regagne ensuite spontanément la prison. Libérée sous caution, Marthe Hanau promet d'indemniser les souscripteurs. Elle fonde un nouveau journal, La gazette des Nations. Mais elle est à nouveau arrêtée le 8 avril 1932, et une nouvelle fois remise en liberté sous caution. Deux ans plus tard, en juillet 1934, Marthe Hanau est jugée en appel et condamnée à trois ans de prison ferme. Son pourvoi en cassation est rejeté et elle est incarcérée à la prison de Fresnes. C'est là que quelques mois plus tard elle se suicide, le 14 juillet 1935, en avalant un tube de Véronal. Elle était âgée de quarante-huit ans ».
http://www.afmeg.info/squelettes/dicofemmesjuives/pages/notice/hanau.htm
Bibliographie
Dominique Desanti, Marthe Hanau : la banquière des années folles, Paris, Fayard, 1968.
Lucienne Mazenod, Ghislaine Schoeller, Dictionnaire des femmes célèbres, Paris, Robert Laffont-Bouquins, 1992, « Hanau Marthe », p. 386.
Florence Montreynaud, Le XXe siècle des femmes, Paris, Nathan, 1989, «La banquière scandaleuse », p. 219-220.
T. de Morembert, « Hanau Marthe », dans M. Prévost et Roman d'Amat (dir.), Dictionnaire de biographie française, Paris, Letouzey et Ané, 1954, 17, p. 573.
Laurent Quevilly, « Et voici Marthe Hanau », http://melao.free.fr/haneau.htm
Film
Francis Girot, La Banquière, 1980, 130 minutes, le rôle d'Emma Eckhert, inspiré par la figure de Marthe Hanau, est interprété par Romy Schneider. Dans ce film, la Banquière, malgré ses erreurs, est présentée comme une femme qui prend à coeur le sort des petits épargnants. Elle ne s'y suicide pas, mais elle est assassinée.