L'Encyclopédie sur la mort


Calderón Pedro

Pedro Calderón de la Barca de Henao y Riaño, né à Madrid le 17 janvier 1600 et décédé à Madrid le 25 mai 1681, est un auteur et poète dramatique espagnol. Très tôt en deuil de son père espagnol et de sa mère flamande, il a, durant ses jeunes années, des démêlés avec la justice et avec l'Église. Il est pourtant bien accueilli à la cour à cause de ses talents littéraires. Après une brève expédition militaire contre les Catalans en 1640 et 1641, il retourne à la cour sous Philippe IV et sous Charles II. À 50 ans, entré dans les ordres, il reconnaît avoir eu un fils dont le nom de la mère est demeuré inconnu. Il exercera d'abord des fonctions de chapelain à la cathédrale de Tolède et sera nommé chapelain honoraire de Philippe IV en 1663. Il se retire pour se consacrer entièrement à l'écriture.

Il écrit de nombreuses pièces de théâtre marquées par leur diversité. La vie est un songe, drame métaphysique publié vers 1633, est considéré comme son chef d’œuvre et comme un des grands classiques de la littérature universelle. Cette oeuvre est une interrogation philosophique à la fois sur le caractère éphémère de la destinée humaine et sur le caractère illusoire de la liberté*.

La Vie en songe (extrait)

Au royaume de Pologne, le Roi Basyle, astrologue, a vu le présage selon lequel son fils, le prince Sigismond, le renverserait et le tuerait. Il fit donc enfermer son héritier dans une tour à l'écart du monde. A la fin de la deuxième journée, Sigismond se réveille et considère que son séjour au palais a été un rêve. À la troisième journée, des soldats mutinés viennent libérer Sigismond afin de le mettre à leur tête pour la conquête du trône. Sigismond, cependant, désenchanté, se croit la proie d'une nouvelle illusion et renonce aux fausses couronnes qui au plus léger souffle s'évanouiront.

SIGISMOND.
De nouveau - oh ! cieux, que signifie cela ? -
vous voulez que je rêve
d'une grandeur que le temps détruira ?
De nouveau vous voulez que je voie,
parmi les ombres et l'illusion,
les splendeurs majestueuses
que fait se dissiper le vent ?
De nouveau vous voulez que je touche du doigt
le désabusement, ou le péril,
auxquels par naissance toute puissance humaine
humblement est soumise,
auxquels il faut toujours être attentifs ?
Eh bien ! je ne veux pas, je ne veux pas ;
regardez : me voici de nouveau
la proie de mon destin ; mais puisque je sais
que toute cette vie est un songe,
allez-vous-en, ombres qui simulez
aujourd'hui à mes sens moribonds
un corps et une voix, tant il est vrai
que vous n'avez ni voix ni corps ;
je ne veux pas de fausses majestés,
je ne veux pas de splendeurs chimériques,
illusions fantastiques
qui au plus léger souffle s'évanouiront,
pareilles à l'amandier fleuri,
dont les fleurs fraîches écloses,
innocentes et imprudentes,
s'éteignent sous le premier souffle,
laissant se flétrir et laissant se ternir
de leurs roses boutons
la beauté, l'éclat, l'ornement.
Je vous connais, ah oui ! je vous connais,
et je sais que vous en usez de même
avec quiconque s'endort ;
mais il n'est plus pour moi désormais d'illusions ;
car, désenchanté à présent,
je sais bien, je sais que la vie est un songe.

(vers 2424 à 2460 ; Traduction de Bernard Sesé, Garnier-Flammarion, 1996)
http://jeanmichel.messiaen.free.fr/Pages/Calderon.html

Image: http://users.ipfw.edu/jehle/poesia/CALDERON.JPG

Date de création:-1-11-30 | Date de modification:2012-04-15