L'Encyclopédie sur la mort


Ars moriendi. Cent petits tableaux sur les avantages et les inconvénients de la mort

Jacques Gleyse

Savoir vivre implique, inéluctablement dans la vision onfrayenne, que l’on sache mourir : « Je crois qu’il faut lui abandonner nos vies de sorte que Thanatos, quand il triomphera, n’ait à ranger dans sa besace qu’un corps qui aura brûlé jusqu’aux derniers feux » (op. cit. , p. 267). Ars moriendi, s’emploie pour permettre à chacun de pouvoir y trouver son compte à recenser cent petits tableaux sur la mort.
Sont présentés pêle-mêle, dans ce texte paru dans une édition relativement confidentielle (Les Cahiers de folle avoine), aussi bien des façons de mourir que des réflexions presque triviales sur la mort. A titre d’illustration, on peut citer les découpages anatomiques effectués par la mafia (« le sexe autour du cou »), les puanteurs des champs de cadavres de la deuxième guerre mondiale dans la poche de Falaise à Chambois (« le nez du prince »), l’humanisme de Staline devant la mort de sa fille (« les larmes de Staline »), ou la masturbation de Bataille au 85 de la Rue de Rennes devant le cadavre de sa mère (« L’onaniste et la défunte »). Le lecteur pourrait sans doute s’interroger sur cet éclectisme baroque et se demander ce qui peut bien unir de tels tableaux, au-delà de la présence de la mort. La réponse est simple. Ars moriendi est le constituant de base de la morale onfrayenne. Il démontre par l’évidence qu’il n’y a pas d’eschatologie. Que seule la puanteur, le froid et la putréfaction seront la conclusion de nos existences. Il rappelle à qui veut l’entendre que nous n’avons qu’une vie et qu’il n’y a ni lendemains qui chantent ni paradis. Celui qui ne brûle pas ses jours et ne fait pas de sa vie un paradis est rappelé à la réalité : nous n’avons qu’une vie qu’il faut sculpter au mieux. Les cents petits tableaux sur les avantages et les inconvénients de la mort rappellent aussi qu’il ne saurait être question de perdre du temps dans la relation aux être chers qui peuvent nous être retirés à tout instant. Ils nous affirment haut et fort qu’après il n’y a rien et que jouir et faire jouir sans faire souffrir ni les autres ni soi même est la tâche première du philosophe du Carpe Diem. L’ouvrage est donc, comme tous les ouvrages de Michel Onfray, bien que manipulant des « faits divers » ou plutôt des faits singuliers : éthique. Il convie à un positionnement. « Il me paraît que sûr du néant qui suit la mort, il faut bien plutôt se soucier de ce qui se passe avant elle, et non après. Avant, tout, l’essentiel. » (1995, p. 65). Si un doute subsistait sur le positionnement matérialiste de l’auteur, il est levé. Hors du corps, il n’y a pas d’homme. Hors de la substance étendue, aucune substance pensante.Hédonisme philosophique matérialiste et philosophie du goût et de l'odorat
Date de création:-1-11-30 | Date de modification:-1-11-30

Documents associés