L'Encyclopédie sur la mort


Peut-on parler d'une obligation absolue de vivre?

Jean-Jacques Lavoie

Que disent les textes fondateurs du judaïsme et du christianisme au sujet du suicide? Parlent-ils d'une obligation absolue de vivre? Les éthiciens sont nombreux à poser un jugement négatif et déjà arrêté avant même qu'ils n'aient entamé la lecture des textes fondateurs. Pourtant, l'éthique sous-jacente à ces textes se présente comme une éthique de l'ambiguïté. Par conséquent, une éthique religieuse qui puise son inspiration dans les textes fondateurs ne doit considérer aucun acte comme absolument et universellement bon ou mauvais en soi; elle doit toujours s'interroger sur son contexte, sur les possibilités de celui qui le pose et sur la signification qui lui a été donnée.
ESQUISSE D'UNE ÉTHIQUE JUIVE ET CRÉTIENNE

«À QUOI PEUT BIEN NOUS SERVIR UN HOMME QUI A DÉJÀ MIS TOUT SON TEMPS À PHILOSOPHER SANS JAMAIS INQUÉTER PERSONNE? JE LAISSE AUX AUTRES D'EN JUGER. (1)


Selon Albert Camus, «juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d'être vécue, c'est répondre à la question fondamentale de la philosophie (2)». Or, à cette question, que répondent les textes fondateurs du judaïsme et du christianisme? Que disent-ils du suicide? Parlent-ils d'une obligation absolue de vivre? Les éthiciens juifs et chrétiens sont nombreux à poser un jugement absolument négatif et déjà arrêté avant même qu'ils n'aient entamé la lecture des textes fondateurs (3). Face à cette réponse claire qui est présentée comme quelque chose qui ne saurait varier et qui n'a jamais varié, pourquoi reposer la question? Simplement pour montrer que l'éthique, qu'elle soit juive ou chrétienne, a varié dans l'histoire et que les textes fondateurs, contrairement à ce qu'émettent maints rabbins et théologiens, ne présentent pas une réponse unique et dogmatique à cette question.

Mais avant d'examiner un peu plus attentivement ces textes, il convient de réfléchir brièvement sur le mot «suicide», puisque le choix même d'une définition exprime déjà une prise de position.

LE SENS OU MOT «SUICIDE»

Étymologiquement, se suicider vient de sui coedere, «se tuer»: il conviendrait donc de dire «suicider» et non «se suicider»; cette dernière expression constitue un pur pléonasme qui montre à quel point il s'agit dans cet acte de se tuer soi-même. Qu'en est-il de l'hébreu et du grec, ces deux langues dans lesquelles ont été rédigés les textes bibliques? La première remarque qui s'impose, c'est que la Bible ignore aussi bien le mot «suicide» que le verbe «se suicider». Cela dit, du côté de la langue hébraïque, le mot «suicide», qui est une création récente, se dit hite'abedût, ce qui signifie littéralement «se faire périr» (4). Quant au verbe «se suicider», qui apparaît pour la première fois autour du troisième ou quatrième siècle de notre ère dans le traité Semahôt, il se dit comme suit: ibéd 'açemô lâda'at, «faire périr soi-même (littéralement «son os;» avec la connaissance (c'est-à-dire «consciemment») »(5). En grec classique, le mot autophonos, «qui se tue» ou «qui tue les siens de sa main», dérive du pronom personnel réfléchi auto et du substantif phonos, «meurtre» ou, par extension, ,victime d'un meurtre». Quant au mot authentès, qui dérive de auto et entea, «armes», il porte la même ambiguïté puisqu'il désigne le meurtrier d'un autre ou de soi-même. Aucun de ces deux termes ne revient dans le Nouveau Testament ou dans la traduction grecque de la Bible hébraïque, communément appelé la Septante; par contre, le second terme revient une seule fois dans la Bible, en Sagesse 12,6, mais dans le sens le «meurtrier» (6).

Bien entendu, le sens d'un mot ne se réduit pas à son étymologie, mais on peut néanmoins admettre que la définition la plus simple du suicide et la plus respectueuse des étymologies vues ci-dessus est la suivante: mettre volontairement un terme à sa propre vie, quels que soient les moyens pour y parvenir, les circonstances ou les intentions. Cette définition a l'avantage de ne contenir aucun jugement d'appréciation. Par ailleurs, certains trouveront cette définition irrecevable puisqu'elle ne permet pas de distinguer l'acte de se donner la mort de l'acte d'offrir sa vie (7); ainsi, selon une telle définition, la mort de Jésus peut être considérée comme une forme de suicide tout comme la mort de Judas. C'est pourquoi, plusieurs auteurs ont dressé des typologies fondées sur les significations du suicide. Deux exemples suffiront ici à illustrer la complexité du propos qui, en soi, pourrait faire l'objet d'un article. Le premier est tiré de l'étude de Durkheim*, dont la première édition date de 1897, et qui distingue quatre situations sociales propres à provoquer le suicide; le suicide égoïste, le suicide altruiste, le suicide anomique et le suicide fataliste. Mais l'essai le plus connu est celui de Baechler* qui distingue quatre genres principaux de suicides dans lesquels sont rangés onze types: les suicides escapistes (fuite, deuil, châtiment), les suicides agressifs (vengeance, chantage, appel), les suicides ablatifs (sacrifice*, passage) et les suicides ludiques (ordalie, jeu) (8) En soi, ces deux exemples ne servent-ils pas déjà de mise en garde contre quiconque pense que la tradition judéo- chrétienne regarde la vie comme une valeur absolue? Une étude un peu plus approfondie des textes fondateurs viendra confirmer, mais non sans ambiguïté, que l'obligation absolue de vivre s'y trouve maintes fois sérieusement questionnée, voire niée.

LES SUICIDES DANS L'ANTIQUITÉ JUIVE
Le suicide est bien connu dans la Bible hébraïque même si, comme on l'a vu ci-haut, il n'existe aucun mot hébreu correspondant. Ce silence ne saurait être un indice de la relative rareté du phénomène dans l'antiquité juive, puisque les livres des Juges, de Samuel et des Rois mentionnent à eux seuls cinq cas de suicide. Ce silence ne pourrait-il pas être un indice d'une moindre acuité du problème moral posé par le suicide? Ce n'est pas impossible. Pourtant, l'opinion générale, tant chez les spécialistes du judaïsme ancien que du christianisme, est que la loi mosaïque ne prévoyait explicitement rien contre le suicide parce qu'elle le supposait inclus dans la prohibition qui vise l'homicide (Deutéronome 5,17 et Exode 20,13: «tu ne commettras pas de meurtre»). Rien n'est moins sûr, car il est notoire que le peuple d'Israël, tout au long de son histoire, a énuméré presque tout ce qui était permis et défendu. Or, force est de constater qu'aucune loi biblique ne fait mention du suicide, alors que la Bible*relate plusieurs cas de suicide.

Abimèlek se fit tuer par son écuyer en signe de protestation contre le fait d'avoir été blessé par une femme (Juges 9,52-54). Or, la tradition biblique ne porte aucun jugement sur ce suicide par blessure d'amour-propre; elle se limite simplement à deux commentaires: cette mort prématurée est une malédiction divine (Juges 9, 56-57) et elle est d'autant plus honteuse qu'elle est causée par une femme (2 Samuel 11,21)! Le suicide de Samson est perçu non seulement comme un acte de vengeance, mais plus encore comme le résultat de la volonté divine puisqu'il est l'accomplissement de sa prière (Juges 16,26-30). Saül et, à sa suite, son écuyer se suicidèrent en se laissant tomber sur la pointe de leur épée sous prétexte d'éviter l'affront d'être blessé par des incirconcis (1 Samuel 31,3-6). La seule remarque posée par le narrateur du texte porte sur les conséquences politiques de ces morts: les Philistins prirent les villes des Israélites (1 Samuel 31,7)! Aucun jugement n'est donc posé sur ces deux suicides qui, consistant à vouloir l'inévitable, expriment un acte de liberté*(9). Athiopel se pendit pour avoir été simplement contrarié (2 Samuel 17,23). En précisant que son corps ne fut pas laissé sans sépulture, ce qui représentait une véritable malédiction (voir par exemple 1 Rois 14,11 et Jérémie 16,4), le narrateur, une fois de plus, ne porte aucun jugement négatif sur ce suicide par frustration. Zimri, voyant que la ville était prise, décide lui aussi de se suicider (1 Rois 16,18). La mort de Zimri est certes perçue par le narrateur comme la conséquence de son péché (1 Rois 16, 19), mais force est de constater qu'aucune allusion n'est faite à l'acte du suicide et que celui-ci, en tant qu'ultime geste de liberté, n'est pas en soi condamné.

On notera que ces cinq suicides ont tous eu lieu de façon approximative entre les treizième et neuvième siècles avant notre ère, c'est-à-dire durant une période où Israël n'avait aucune croyance en un au-delà désirable et bienheureux. Or, malgré le fait que l'éthique religieuse reflète dans ses prescriptions l'image socioculturelle et socioreligieuse qu'elle se fait de la mort, il n'en demeure pas moins vrai que la nouvelle foi en la résurrection et en un au-delà bienheureux, qui fera son apparition autour du deuxième siècle avant notre ère (voir surtout 2 Maccabées 7 et Daniel 12,1-3), n'amènera pas automatiquement une loi interdisant le suicide. En réalité, l'époque qui voit naître la foi en la résurrection suscitera même davantage de suicides; c'est du moins ce que nous montrent les deux livres des Maccabées et le livre de Daniel. Le premier suicide est raconté en 1 Maccabées 6,42-46: pour sauver son peuple et acquérir un nom immortel, Eléazar chercha sa propre mort sous l'éléphant cuirassé. Encore une fois, ce suicide héroïque n'est nullement condamné. Bien au contraire! Il en va de même de 2 Maccabées 14,37-46 qui raconte dans les détails comment Razis se suicida, «aimant mieux mourir noblement que tomber entre les mains des criminels et subir des outrages indignes de sa noblesse» (verset 42) (10). Dans ce dernier cas, comme dans celui de Saül et de son écuyer, la liberté vis-à-vis la mort glorifie même la condition humaine. Selon la typologie des significations du suicide vues ci-dessus, le cas d'Eléazar (voir 2 Maccabées 6,18-31), "préférant une mort glorieuse à une vie infâme» (verset 19) et dont la mort est identifiée comme un «exemple de noble courage et un mémorial de vertu» (verset 31), pourra être qualifié de suicide ablatif. La même remarque s'impose pour la mort héroïque des sept frères et de la mère racontée en 2 Maccabées 7,1-42, et de la mort des docteurs du peuple, évoquée en Daniel 11,32-35.
D'autres suicides sont mentionnés dans la littérature juive ancienne sans que l'acte soit condamné. C'est par exemple le cas du suicide collectif de juifs pieux sous le règne de Caligula (Philon d'Alexandrie, Legatio ad Caium § 234), du suicide familial sous Antoine (Flavius Josèphe, Guerre des Juifs, 1,309-313 et Antiquités juives 14,420-430), du suicide collectif de Massada (Flavius Josèphe, Guerre des Juifs 7,320ss), du suicide des prêtres lors de la destruction du second Temple de Jérusalem (Talmud de Babylone, Taanit 29a), etc.(11) Tous ces textes ne nous montrent-ils pas qu'il y a des circonstances inhumaines où le suicide témoigne de l'importance de vivre dans la dignité et le respect de soi? Ces textes n'affirment-t-ils pas, à leur façon, que c'est non pas la vie, mais la liberté morale, c'est-à-dire une liberté qui se sait essentiellement rapportée à autrui et à l'Autre, qui est le bien humain suprême?
VIE ET MORT CHEZ LES SAGES D'ISRAËL
Il est vrai que, dans la Bible, le couple vie-mort exprime habituellement une opposition entre la bénédiction et la malédiction (voir Deutéronome 30,19). Il est également vrai que l'antithèse entre la vie et la mort est habituellement l'occasion pour le sage d'inviter à choisir la vie (12). Par contre, sans jamais prôner le suicide comme le faisaient par exemple explicitement les stoïciens, certains sages du judaïsme palestinien et du judaïsme hellénistique ont tout de même reconnu que, dans certains cas, la mort était préférable, voire souhaitable.
C'est par exemple le cas du Qohélet qui, en 4,1-3, oppose de façon lucide la mort à la vie:

Moi, j'ai vu, d'autre part, toutes les exploitations qui se font sous le soleil:
Voici les larmes des exploités, et ils n'ont pas de consolateur; entre les mains de leurs exploiteurs est la violence,
et ils n'ont pas de consolateur. Alors moi de louer les morts qui sont déjà morts plutôt que les vivants qui, eux, sont encore vivants.
Mais plus heureux que les deux est celui qui n'existe pas encore, parce qu'il n'a pas vu l'oeuvre mauvaise qui se fait sous le soleil.

Dans ce texte (13), le Qohélet ne préconise pas le suicide, mais il affirme que seul le non-être permet d'éviter l'absurdité de l'existence humaine. Quant aux nombreux exploités qui n'ont pu échapper à l'absurdité de la vie, leur solution reste la mort. La mort est non seulement inévitable, mais elle est aussi enviable, car elle seule libère des larmes, de l'exploitation et de la violence. Ce n'est donc plus les êtres humains et encore moins Dieu (le «consolateur») qui libèrent de l'injustice et du malheur, mais la mort. Il n'est donc pas étonnant de constater que la hiérarchie sociale des suicidés continue aujourd'hui de refléter les inégalités sociales (14). Or ces impasses sociales qui déterminent de nombreux suicides ne sont-elles pas plus pathétiques que le suicide lui-même? Par conséquent, lorsqu'une société engendre toutes sortes de misères économiques et matérielles, n'est-il pas incohérent de lui donner encore le droit de condamner ceux qui se soustraient, par la mort, à sa domination tyrannique?
Cette opposition entre vie et mort revient encore en Qohélet 6,3:

Si un homme engendre cent fois et vivait de nombreuses années,
mais que, si nombreux soient les jours de ses années,
son appétit ne soit pas rassasié de bonheur
et que même il n'ait pas de tombeau pour lui,
je dis: plus heureux que lui le mort-né.

À la lumière de ce texte, il est clair qu'il vaut mieux être mort-né, avorté, que d'avoir une vie sans être rassasié de bonheur (15). Mais qui donc peut se dire rassasié de bonheur? La longévité, la fécondité et la postérité, qui représentaient la
bénédiction par excellence, ne sont plus les critères décisifs du bonheur et d'une vie signifiante, et du coup, elles ne représentent plus les exigences centrales de la vie. Dit autrement, la mort prématurée peut devenir le bonheur souhaité.
Ces deux textes du Qohélet montrent clairement que la mort est plus qu'un phénomène naturel inévitable (voir 2,14-16; 3,19-22; 9,11-12); elle est aussi un phénomène désirable. Il y a un temps pour tout, dit·on très souvent en invoquant à tort Qohélet 3,1-9. Or le temps de la remise en question du Qohélet n'a pas à être escamoté. On ne doit pas occulter le fait qu'il y a des situations où la vie ne vaut pas la peine d'être vécue. Qohélet partage en quelque sorte l'opinion de Zarathoustra: «Beaucoup meurent trop tard, et quelques-uns meurent trop tôt. Elle semble encore étrange la doctrine qui dit: 'Meurs à temps!' Meurs à temps; c'est ce qu'enseigne Zarathoustra»(16). Ceux qui décident de mourir alors qu'ils sont encore au printemps de leur vie ont entendu, sans les avoir jamais lues peut-être, les paroles de Qohélet - cette parole de Dieu, faut-il le rappeler! - et de Nietzsche.* Ils nous retirent le droit d'argumenter et gardent le dernier mot en nous rappelant, à la suite de Qohélet 6,3-6, qu'il n'y a pas, trop souvent, de différence entre mourir vieux ou mourir jeune. l'existence n'est-elle pas un suicide différé (17)?

Le Qohélet n'est pas le seul sage de la Bible à avoir porté sur l'aventure humaine un jugement lucide et sans complaisance. Jésus Ben Sira, dans son livre connu sous le nom de Siracide ou de l'Ecclésiastique, a lui aussi rappelé que la vie ne méritait pas d'être vécue à n'importe quel prix. Écoutons d'abord ce qu'il dit des gens condamnés à vivre de la mendicité:

Enfant ne mène pas une vie de mendiant
mieux vaut mourir que mendier
l'homme qui regarde vers la table d'un autre
sa vie ne pourrait passer pour une vie. (Siracide 40,28-29ab)

Ben Sira est tranchant: la vie est plus qu'un phénomène biologique; l'être humain ne peut vivre que de son travail, et la nourriture, pour être humaine, doit être le résultat d'un travail. Mais si l'être humain ne peut vivre dignement que de son travail, comment peut-on logiquement alors condamner ceux qui se suicident, suite à un découragement face à un emploi qui n'est jamais venu ou qui est perdu?

Selon Ben Sira, la même remarque s'impose pour les gens dont la vie est amère ou atteinte d'une maladie persistante:

Mieux vaut la mort qu'une vie amère
et le repos éternel qu'une maladie persistante (Siracide 30,17)

En utilisant l'image du repos, comme en Qohélet 6,5, ce dit de préférence indique que, loin d'être un mal en soi, la mort se présente comme un soulagement, un apaisement. En affirmant que la mort est préférable à une triste vie de malade, Ben Sira est encore plus radical que Lemûel, car ce dernier se contentait, non sans cynisme, d'une invitation à se saouler pour mieux oublier l'indigence et le labeur de la vie (voir Proverbes 31,6-7). La pensée de Ben Sira s'apparenterait-elle exclusivement aux philosophies grecques qui affirnent qu'il vaut mieux mourir que de vivre atteint d'une maladie incurable(18)? Ce serait oublier que cette préférence pour la mort à une vie souffrante fut même l'objet de prière de la part de Job (3,11.13.20; 6,9-10 (19), de Tobie et de Sara (Tobit 3,6.13.15). En lisant ces textes, on ne peut faire autrement que se rappeler la belle prière de R.M. Rilke* :

Ô Seigneur, donne à chacun sa propre mort,
la mort issue de cette vie
où il trouva l'amour, un sens et sa détresse (20)

Quant aux personnes avancées en âge, sans force et sans revenu, le verdict de Ben Sira est aussi affirmatif:

Ô mort ta sentence est bonne
à l'homme indigent et manquant de force
au vieillard très âgé et distrait en toutes choses,
révolté et à bout de patience (Siracide 41,2)

Notre éthique, encore trop marquée par notre vision de vie brève, n'aurait-elle pas avantage à méditer ce texte? L'espérance de vie de certains vieillards gravement malades et souffrants, malgré les soins palliatifs, n'est-elle pas parfois qu'une condamnation à la survie? Pourtant, il est inutile d'insister pour admettre qu'en dépit du fait que ces livres (Qohélet, Siracide, Job) font tous partie de la Bible chrétienne, ces propos, qui reconnaissent que la mort peut être plus humaine et avoir plus de sens que la vie, n'ont guère eu d'échos ni dans l'éthique chrétienne ni dans l'éthique juive.

LE SUICIDE SELON LE TALMUD
Rédigé après la Bible, le Talmud stipule qu'il n'y a que trois cas où il vaut mieux se suicider que de transgresser la Loi: l'idolâtrie, le meurtre (sauf en cas de légitime défense ou pour empêcher une personne en poursuivant une autre ou pour empêcher l'accomplissement d'un viol) et les transgressions sexuelles (Sanhédrin 74a-b; Gittin 57b; Erouvîm 21b; etc.). C'est pourquoi de nombreux Juifs se suicidèrent durant les croisades, les persécutions médiévales et le régime nazi. Cela dit, la première législation concernant le suicide n'apparaîtra que dans le traité Semahôt, connu aussi sous le nom de Èvèl Rabbatî, «Grand deuil» (voir note 5). Ce traité sera repris et actualisé par le Shulhan 'Arouk, la plus grande codification juive du seizième siècle, et qui sert encore de nos jours de code de lois aussi bien pour les Séfarades que les Ashkénazes (voir note 3). C'est donc dans ce traité talmudique qu'il sera spécifié pour la première fois qu'on ne doit effectuer aucun rituel en l'honneur des suicidés, mais que l'on doit respecter ceux qui concernent les personnes en deuil. Les raisons invoquées contre le suicide sont fondées sur la foi au Dieu Créateur: la vie étant donnée par Dieu, l'être humain n'a pas le droit d'en disposer à sa guise.

Par contre, comme l'expression hébraïque utilisée pour dire «se suicider» intègre la dimension de la «connaissance», on distingue, de nos jours, le cas du suicide effectué par égarement ('ibéd 'açemô shel'o lâda'at) de celui qui est effectué en toute conscience ('ibéd 'açemô lâda'at). C'est pourquoi, dit-on, une personne insensée, même pour un seul moment, ne peut être tenue pour coupable de son acte. De même, aucune culpabilité n'est reconnue à l'enfant de moins de treize ans qui se suicide. Certains rabbins stipulent également qu'on ne jugera pas une personne comme suicidée quand on estimera qu'il n'y a pas eu, à l'origine de sa mort, acte volontaire. Du même souffle, ils affirment que, si une personne désire se suicider, on ne tiendra pas compte de ses intentions suicidaires, si on la trouve morte par la suite; même si une lettre nous indique sa volonté de mourir. Il est possible, dit-on, qu'elle ait regretté son intention avant de mourir ou que la mort lui ait été pénible (poison lent, blessure, noyade, etc.) (21). Dit autrement, on interprète le suicide non seulement comme un péché, mais aussi comme une maladie; dans ce dernier cas, le suicidaire est à l'abri de la justice rabbinique et divine. Par contre, on notera que ce sont les psychiatres, et non les rabbins, qui aujourd'hui peuvent tenter de vérifier si le suicidaire peut être retenu comme responsable de son acte. On retrouve de nos jours la même nuance du côté chrétien. À ce sujet, le psychanalyste et théologien Drewermann affirme que «les sociologues et les psychologues qui définissent le suicide comme une maladie ne me plongent aujourd'hui pas moins dans l'étonnement que les catholiques ou les musulmans qui le déclarent péché mortel.» Et, un peu plus loin, il ajoute: «Dans des situations extrêmes, il est en définitive impossible de classer le comportement humain en fonction de l'alternative maladie (absence de liberté) ou faute (liberté). Les frontières sont imprécises, et liberté et non-liberté se mêlent toujours inextricablement (22)». Mais c'est là un autre problème qui fait d'ailleurs l'objet de son livre.

LES SUICIDES DANS L'ANTIQUITÉ CHRÉTIENNE
Le Nouveau Testament parle peu de suicide. Il y a d'abord le cas de Judas, dont les deux rapports sont strictement contradictoires et irréconciliables (voir Matthieu 27,5 et Actes 1,18). En outre, loin de dire que ce geste est immoral, les textes néotestamentaires affirment, au contraire, que Judas est l'instrument indispensable de la Rédemption sans qui ne pouvait s'accomplir les Écritures! Judas est donc totalement innocent (23).

En ce qui concerne la mort de Jésus, qu'on pourrait interpréter comme un suicide oblatif (voir Jean 10,11: «le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis» ) (24), il est vrai que c'est l'amour d'autrui qui en est le motif, mais qui donc peut dire où commence et finit l'amour? Ne peut-on pas dire que le désespoir qui prit possession de Judas fut à la taille de l'amour qu'il portait pour Jésus? Ne peut-on pas dire d'une mère de famille devenue impotente à vie qui, par le suicide, évite de réduire les siens à la misère économique, qu'elle a agi par amour? Ne peut-on pas dire qu'un amoureux qui décide de subir le même sort que sa bien-aimée, savoir la mort, qu'il a agi par amour (25)?

Certes, «dans la vie comme dans la mort nous appartenons au· Seigneur» (Romains 14,8b), mais l'anthropologie chrétienne - à la suite de l'anthropologie juive - n'insiste-t-elle pas aussi pour nous présenter l'être humain comme un co- et procréateur (voir par exemple Genèse 1,26-28; Siracide 16,24-17,10; Sagesse 9,1-3; etc.)? Une telle vision anthropologique, qui souligne fortement la responsabilité qu'a l'être humain vis-vis le monde et son propre destin, ne renforce-t-elle pas ce droit et ce devoir qu'a l'être humain d'intervenir dans les phénomènes de la vie dont il peut assurer la régulation? N'y a-t-il pas aucune loi néotestamentaire qui interdit explicitement le suicide? N'y a-t-il pas aucune loi d'une obligation absolue de vivre? Aussi, comme pour le judaïsme, la tradition chrétienne ne se montre-t-elle pas étonnamment silencieuse jusqu'au quatrième siècle? Pourquoi les chrétiens qui aimaient distinguer leurs moeurs de celles des païens ne dénoncèrent-ils pas la grande estime en laquelle maints païens cultivés tenaient le suicide? Parce qu'ils furent persécutés jusqu'au début du quatrième siècle? Parce qu'ils partageaient les convictions de l'époque? Cette discrétion n'a pas encore reçu d'explication de la part des théologiens et des historiens du christianisme. Par ailleurs, à la lecture de l'Histoire ecclésiastique d'Eusèbe de Césarée, force est de constater que les premiers chrétiens n'hésitèrent pas à louer sainte Pélagie qui, pour ne pas tomber entre les mains du persécuteur, s'ôta la vie. Le même éloge se retrouve pour la vieille Apollonie qui préféra se lancer dans le feu que de consentir aux insinuations impies de ses accusateurs ou pour ses femmes qui, devant la crainte d'être violées par les soldats, choisirent la fuite vers le Seigneur en se précipitant dans un cours d'eau. En bref, plusieurs chrétiens, poursuit Eusèbe, se donnèrent la mort, soit par le feu ou en se jetant du toit de leur maison, pour fuir l'épreuve des conspirateurs et des persécuteurs (26).

Ainsi, il faut attendre Augustin* (354-430) pour voir apparaître la première énonciation en règle contre le suicide (voir Cité de Dieu, l, 17-28) et cela en le qualifiant d'homicide contre soi-même de façon à le distinguer du geste de celui qui offre sa vie pour les autres, geste non seulement admis, mais même recommandé. Paradoxalement, Augustin fera appel, non pas à la Bible, mais à Platon* (Lois 9, 873) qui parlait de celui qui «frustre la destinée du lot qui est le sien». Toutefois, par la suite, l'argument majeur des théologiens chrétiens fut emprunté à la théologie de la création: en attentant à ses jours, l'être humain dispose d'un bien qui ne lui appartient pas, mais qui lui a été confié, sous forme de talents à faire fructifier, et sur quoi Dieu réclamera des comptes (voir Matthieu 25,14-30). Cet argument fut appuyé par un second fourni par la théologie de la rédemption: comme le croyant vit et meurt pour le Christ et non pour lui-même (Romains 14,8), celui qui se retire volontairement la vie la vole à la mission qui lui a été confiée. Le reste de l'histoire est malheureusement mieux connu: à partir du Concile d'Orléans, en 533, l'Église refusa donc les obsèques religieuses à celui qui était mort par suicide. Depuis le nouveau code de droit canon, paru en 1983 (voir Canon 1184), ce jugement sévère a commencé à changer, mais cette nouvelle histoire pourrait faire le sujet d'un autre article.

CONCLUSIONS
La première conclusion qui s'impose au lecteur des textes fondateurs du judaïsme et du christianisme, c'est qu'ils ne présentent pas un enseignement éthique exhaustif sur le suicide. Par conséquent, le croyant qui cherche dans ces textes une solution éthique à tous les cas de suicide sera déçu. À moins de verser dans le fondamentalisme, il faut reconnaître que ces textes ne peuvent être la source unique de l'éthique juive et de l'éthique chrétienne.
La deuxième conclusion qui s'impose, c'est qu'on ne saurait se contenter de citer quelques passages des textes fondateurs afin de donner une apparence d'appui biblique ou talmudique à l'argumentation tout entière. Le croyant qui veut enraciner son discours éthique dans les textes fondateurs ne peut donc se limiter à considérer ces textes comme un arsenal dans lequel il peut puiser les citations nécessaires pour justifier ses thèses. En effet, ces textes fondateurs sont si divers qu'on aura toujours la possibilité d'y trouver des opinions et des justifications qui s'harmonisent avec les options qu'on veut défendre. Le lecteur de ces textes doit donc consentir à la diversité des points de vue, non comme le signe d'une incohérence, mais plutôt comme une interpellation qui l'oblige à se laisser interroger par les textes. Pour reprendre les mots de la citation placée en exergue du présent article, à quoi cela aurait-il servi de réfléchir sur le suicide sans inquiéter personne? Mais avant de laisser le soin aux autres de juger, force est de constater que l'éthique sousjacente aux textes fondateurs du judaïsme et du christianisme se présente comme une éthique de l'ambiguïté. Dit autrement, une éthique religieuse qui puise son inspiration des textes fondateurs ne doit considérer aucun acte comme absolument et universellement bon ou mauvais en soi; elle doit toujours s'interroger sur son contexte, sur les possibilités à la disposition de celui qui le pose et sur la signification qui lui a été donnée.

Notes
1. DIOGÈNE (DL. 6,24), d'après la traduction de L. PAQUET, Les Cyniques grecs. Fragments et témoignages, Paris, Librairie générale française, 1992, p. 90-91.
2. A CAMUS, Le mythe de Sisyphe. Paris, Gallimard, 1942, p. 15.
3. Du côté des juifs, voir par exemple E. GUGENHEIM, Les Portes de la Loi. Études et Responsa, Paris, Albin Michel, 1982, p. 248 et la dernière édition du Choul'han 'Arouk Sefarade, selon MARAN HEITIH YOSSEF, Jérusalem, GalIia, 1997, p. 300-303; du côté des chrétiens, voir le théologien réformé KARL BARTH, Kirkliche Dogmatik III, 4, Zurich, Zollikon, 1951, p. 466; enfin, en ce qui concerne la théologie catholique, on n'a qu'à consulter les commentaires de l'ancien ou du nouveau code de droit canon pour constater que l'interdit absolu est posé d'entrée de jeu comme ayant un fondement biblique. À ce sujet, voir par exempie É. JOMBART, «Suicide», Dictionnaire de droit canonique, Tome 7, Paris, Letouzey et Ané, 1965, p. 1113-1114 et P. Daubercies, «Suicide», Catholicisme. Hier, au;ourd'hui, demain, Tome 14, Paris, Letouzey et Ané, 1996, p. 565.
4. Il s'agit de la forme hithpael (réfléchie) du verbe 'âvad dont le sens premier est «périr»
5. Voir Talmûd Babeli, Masèkèt Semahôt, pèrèq shenî, halakah aleph [en hébreu] (Talmud de Babylone, Traité des joies. chapitre deux, règle un), London, The Soncino Press, 1984.
6. C'est du moins ce qu'on peut conclure après avoir consulté les concordances. La même remarque vaut pour le mot euthanasia (mort heureuse) qui apparaît pour la première fois chez le poète Posidipe (troisième siècle avant notre ère) et qui ne prendra le sens de mort sans douleur qu'au seizième siècle. Quant au mot autothanatos, «qui se donne la mort», il n'apparaîtra qu'à la toute fin de l'Antiquité.
7. C'est par exemple le cas de L. MEYNARD, Le suicide, Paris, PUF, 1966, p.57-75.
8. Voir E. DURKHEIM, Le suicide, Paris, PUF, 1981 et J. BAECHLER, Les suicides, Paris, Calman- Lévy, 1975. On trouvera une bonne synthèse dans P. BAUDRY, «L'approche sociologique du suicide. De Durkheim à aujourd'hui», Concilium, no 199, 1985, p. 27-36.
9. Malgré sa singularité, ce récit du suicide de l'écuyer de Saül n'est pas sans rappeler la mort par accompagnement, nommé junshi, chez les Japonais. Voir à ce sujet M. PINGUET, La mort volontaire au Japon, Paris, Gallimard, 1984, p. 75-79 et 353. On trouvera également des exemples de ce type de «suicide funéraire» à Sumer, en Chine et en Inde dans E. DREWERMANN, Le mensonge et le suicide. Psychanalyse et morale, Paris, Cerf, 1992, p. 53. On rejoint également Sénèque qui, parmi les anciens philosophes, a élaboré la théorie la plus complète du suicide comme expression suprême de la liberté humaine. Les philosophes défendant ce point de vue sont nombreux: à titre d'exemple, on peut citer M. DE MONTAIGNE, Essais l, Paris, Librairie générale française, 1972, p. 499-515 et A. COMPTE-SPONVILLE, Impromptus, Paris, PUF, 1996, p. 97-110.
10 Pour une analyse détaillée de ce passage relatant le suicide de Razis, voir J. W. VAN HENTEN, The Maccabean Martyrs as Saviours of the Jewish People. A Study of 2 and 4 Maccabees, Leiden, Brill,1997, p.85-124.
11. On trouvera des informations supplémentaires dans A DROGUE ET J. D. TABOR, Noble Death: Suicide and Martyrdom Among Christians and Jews in Antiquity, San Francisco, Harper & Row, 1992, p. 54-112.
12. Voir par exemple Proverbes 2,18-19; 5,56; 11,19; 12,28; 13,14; 14,27; 15,24; 18,21.
13. Pour une analyse détaillée de ce texte, voir J.-J. LAVOIE, «De l'inconvénient d'être né. Étude de Qohélet 4,1-3», Sciences Religieuses/ Studies in Religion, vol. 24, n° 3, 1995, p. 297-308.
14. Les sociologues qui rendent responsables des nombreux suicides les structures inhumaines et oppressives de la société actuelle sont très nombreux. On pourra consulter, entre autres études, P. BAUDRY, «Facteurs anciens et facteurs nouveaux en matière de suicide», Concilium, no 199, 1985, p. 17-26.
15. Pour une analyse plus détaillée de Qohélet 6,3-6, voir J.-J. LAVOIE, La pensée du Qohélet. Étude exégétique et intertextuelle, Montréal, Fides, 1992, p. 111121. Quant au bonheur, selon le Qohélet, on remarquera qu'il est fait de plaisirs très concrets: manger, boire, jouir et goûter la vie avec une femme, etc. Voir à ce sujet J.J. LAVOIE, Qohélet. Une critique moderne de la Bible, Montréal-Paris, Médiaspaul, 1995, p. 107-118.
16. F. NIETZSCHE, Ainsi parlait Zarathoustra, Coll. Bibliothèque 10/18, Paris, Union générale d'éditions, 1958, p. 66.
17. En effet, la tabagie, la toxicomanie, l'alcoolisme, l'anorexie, etc. ne sont-ils pas des suicides «au ralenti»? Et que dire des morts dues aux accidents de la route ou des accidents sportifs: ne sont-ils pas très souvent des suicides déguisés?
18. Voir par exemple EURIPIDE, Hécube, 1107ss; Platon, Georgias 5l2a; République 409e-410; Lois 862e; Diogène, Diogène Laërce, 6,24; etc. On trouvera à ce sujet des informations supplémentaires dans L. ELDERS, «Vieillesse, mort et mort volontaire dans l'Antiquité classique», dans J. RIES (dir. publ.), La mort selon la Bible, dans l'Antiquité classsique et selon le manichéisme, Louvain~la~Neuve, Centre d'histoire des religions, 1983, p. 93-133.
19. Toutefois, ce n'est pas l'idée de suicide qui hante Job, mais bien celle de meurtre: Job rêve d'être assassiné par nul autre que son Créateur. Pour une analyse de ces pas-sages, voir J. LAVOIE, «Job au-delà des versets: une théologie critique de la souffrance après Auschwitz», dans C. MÉNARD et F. VILLENEUVE (dir. publ.), Dire Dieu aujourd'hui, Montréal, Fides, 1994, p. 147-172, plus particulièrement les p. 166-167.
20. R.M. RILKE, «Le Livre des heures», dans Oeuvres, II, Poésie, traduit par P. de MAN, Paris, Seuil, 1972, p. 115.
21. Voir à ce sujet M. LAMM, The Jewish Way in Death and Mourning, New York, Jonathan David, 1969, p. 215-220 et A. CHICHEPORTICHE, 'êvên yiserâ'êl. Hilekôt-semâhôt. La pierre d'Israël. Lois et coutumes du deuil. Réflexions sur l'au-delà, Paris, Colbo, 1990, p. 191-193.
22. E. DREWERMANN, Le mensonge et le suicide, p. 13 et 24.
23. Cette thèse est bien défendue par H. STEIN-SCHNEIDER, «À la recherche du Judas historique. Une enquête exégétique à la lumière des textes de l'Ancien Testament et des logia», Études théologiques et religieuses, n° 60, 1985, p. 403-424. De son côté, C. F. WHELAN, «Suicide in the Ancient World: A ReExamination of Matthew 27:3-10», Laval théologique et philosophique, n° 49, 1993, p. 505-522, a bien montré que l'interprétation négative de la mort de Judas est due à une vue post-augustinienne et ethnocentrique du suicide. Une interprétation positive de la mort de Judas vient également d'être défendue par W. KLASSEN, Judas: Betroyer or Friend of Jesus?, Minneapolis, Fortress, 1996. L'avis des recenseurs est toutefois partagé. On trouvera une recension positive dans Sciences Religieuses n° 26, 1997, p. 367-368 et une négative dans le Journal of Biblical Literature, n° 117, 1998, p. 134-136.
24. Bien entendu, le Nouveau Testament présente plusieurs interprétations de la mort de Jésus. Voir à ce sujet R. E. BROWN, The Death of the Messiah. A Commentary on the Passion Narrative in the Four Gospels, 2 Vol., AB, Londres, RL, 1994 et O. GENEST, Le dûcours du Nouveau Testament sur la mort de Jésus: Épftres et Apocalypse, Québec, Presses de l'université Laval, 1995. On pourra également consulter le livre de P. E. DAUZAT, Le suicide du Christ, Paris, Presses universitaires de France, 1998. Ce livre au titre provocateur n'est toutefois pas une étude exégétique; il s'agit plutôt d'une enquête sur l'histoire de la réception de la mort de Jésus chez les théologiens et les philosophes. aussi bien dans l'antiquité, au moyen âge que dans la modernité.
25. On peut aussi penser, entre autres choses, à l'immolation volontaire de la veuve en Inde, connue sous le nom de «sati», «femme fidèle», ou encore au suicide de solidarité ou suicide d'amour, bien connu au Japon et identifié sous le nom de «ayako shinju». Voir à ce sujet M. PINGUET, La mort volontaire, p. 60-61; 96-98; 173-211 et 365. Du côté de l'Occident, on peut également évoquer le succès et l'admiration qu'a connu le suicide amoureux de Roméo et Juliette de W. Shakespeare.
26. Voir par exemple EUSÈBE DE CÉSARÉE, Histoire ecclésiastique, VI, 41,7; VIII, 6,517; VIII, 8,521; VIII, 12,3-4; VIII, 12,2,530.
Date de création:-1-11-30 | Date de modification:-1-11-30

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