Jeux olympiques

Les Jeux Olympiques dans l'Antiquité (Pierre de Coubertin, 1863-1937)

«Il est probable que la création des Jeux Olympiques fut due aux Pisates, premiers possesseurs de la vallée de l'Alphée. Mais les Olympiades ne commencèrent à compter que du jour où Iphitos, roi d'Elis, conclut avec Lycurgue la convention établissant autour des Jeux avec une «trève sacrée». Dès lors la ville d'Elis reçut la direction des concours et l'Elide devint territoire neutre et inviolable. La première Olympiade date de l'an 776 avant J.-C. Pendant près de douze siècles, elles furent célébrées avec une régularité que ne troublèrent guère les événements les plus graves. Au moment où se livrait le combat des Thermopyles, les Grecs se trouvaient assemblés à Olympie. Cependant il advint parfois que des contestations surgirent. Ce fut le cas pour la 8e Olympique (748 av. J.-C.) dont les Pisates reprirent la direction aux Eléens; lors de la 104e (364 av. J.-C.) la trève sacrée fut même rompue.

Le programme au début, ne comportait presque que la course à pied en vitesse qui se courait sur la longueur du stade, soit 180 mètres 2. Vinrent successivement s'y ajouter la double course, la course de fond (4 600 mètres environ), le pentathlon (en 708), le pugilat (en 688), la course de chars à quatre chevaux (en 680), le pancacre (en 648); puis à partir de l'an 632 les concours pour enfants; enfin, en 396, les concours d'art. Il semble qu'on ait pendant longtemps tenu, pour rester fidèle à la tradition, épuiser le programme en une seule journée. Mais en 472 les concours ne purent se terminer que fort avant dans la nuit et la durée des Jeux fut alors portée à cinq jours. Cela montre en tous cas que les concurrents ne furent jamais très nombreux et que leur spécialisation était extrême. Le pentathlon dont l'apparition introduit dans l'histoire sportive les «sports combinés» comprenait la course, la lutte, le lancement du disque, le saut et le pugilat auquel par la suite fut substitué le lancement du javelot. Il ne paraît pas qu'on ait compté par points; le vainqueur devait sortir premier des cinq épreuves successives. Nous ne savons pas exactement comment se faisait l'élimination.

La qualification du concurrent aux Jeux Olympiques était à la fois ethnique, sociale, morale et technique. Il devait être de pure race hellénique, n'avoir commis ni crime, ni impiété, ni sacrilège et, une fois «accepté» comme candidat, s'être soumis, après un entraînement de dix mois, à un stage de trente jours à Élis pendant la période précédant les Jeux. Il y a là une gradation de garanties que le monde moderne n'a jamais relevées. Au début les Doriens, les Eléens et les Arcadiens étaient seuls convoqués. Ce fut un Eléen, Corœbos, qui remporta le prix de la course à la Ire Olympiade. Mais dès le milieu du VIIe siècle avant Jésus-Christ, tous les Hellènes furent admis. Ils le furent seuls, en règle générale, jusqu'à la conquête romaine. Tibère, le premier des non-Hellènes, remporta un prix (course de chars). Lors de la 290e Olympiade (385 ap. J.-C.) qui devait être l'avant-denière, le vainqueur du pugilat fut le prince héritier d'un royaume arménien.

Il est impossible d'entrer ici dans le détail des cérémonies et des solennités auxquelles donnaient lieu les Jeux Olympiques. La religion, l'art, le symbolisme philosophique ou patriotique y régnaient perpétuellement, engendrant comme une exaltation de tous les sentiments et de toutes les pratiques qui servaient de base à la cité grecque. Les historiens ne sauraient trop étudier ce qui concerne ces grandes fêtes de l'Hellénisme.

Les Jeux Olympiques furent supprimés par un édit de l'empereur Théodose en 392. Le christianisme vainqueur voyait en eux une institution païenne. En 426, Théodose II, par un édit sacrilège, ordonna la destruction des temples et édifices que, dans l'intervalle, les hordes d'Alaric avaient pillés mais non détruits. L'édit ne fut que partiellement exécuté, mais les tremblements de terre de 522 et 551 et les inondations du Kladeos que ne retenaient plus les digues préservatrices achevèrent le désastre. Olympie disparut et on perdit jusqu'à ses traces. Retrouvée en 1829 par le corps expéditionnaire français venu au secours de la Grèce ressuscitée, elle fut exhumée de 1875 à 1881 par l'école allemande d'archéologie aux frais du futur empereur Frédéric III; 130 statues ou bas-reliefs, 13 000 bronzes, 6 000 monnaies, 400 inscriptions, 1 000 terres cuites et 40 monuments furent inventoriés.»

PIERRE DE COUBERTIN, La pédagogie sportive, Lausanne, Imprimerie réunies, 1919




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Événements sacrés à l'origine, à Olympie, dans la Grèces antique, les Jeux olympiques ont refait surface, sous une forme profane à Athènes, en 1896. L'une des différences entre les jeux anciens et les jeux modernes est qu'il n'y avait pas de records dans les jeux anciens. Le principal souci de l'athlète était de l'emporter sur ses adversaires et non d'abattre un record, c'est-à-dire de s'imposer comme le meilleur dans l'absolu. Faut-il relier cette différence au fait que les jeux anciens étaient religieux tandis que les jeux modernes sont profanes?

Les premiers Jeux olympiques
Les premiers jeux ont eu lieu à Olympie, en Grèce, en 776 av. J.-C. Les cités étaient censées déposer les armes pendant la durée des Jeux pour permettre aux athlètes de rivaliser en paix. La «trêve sacrée» qui fut à l'origine de ces Jeux s'accompagnait de la déclaration suivante : «Puisse le monde être affranchi des crimes et des tueries ainsi que du choc des armes».

(Selon divers auteurs, dont Werner Jaeger, il y eut des jeux à Olympie avant 776. «Depuis les âges les plus reculés de l'histoire connue, écrit Jaeger, la gymnastique grecque (au sens le plus large du mot) fut associée aux fêtes en l'honneur des dieux. Peut-être les jeux olympiques eurent-ils pour origine les jeux funéraires tenus pour Pélops à Olympie - à l'exemple de ceux, décrits dans l'Illiade, qui se déroulèrent à
Troie après la mort de Patrocle. On sait même que des jeux funéraires pouvaient être célébrés périodiquement, à des dates déterminées. Des compétitions très anciennes de ce genre purent fort bien avoir été reprises sous l'égide du Zeus olympien. Et, d'après les images votives de chevaux découvertes sous les fondations du plus vieux sanctuaire d'Olympie, il appert que des courses de chars eurent lieu sur l'emplacement de l'ancien culte bien avant la date traditionnelle où Corebos remporta la première victoire à la course à pied.» (Paideia. La formation de l'homme grec, Paris, Gallimard 1964, p. 250)

Parmi les premiers sports disputés à Olympie figuraient la course à pied, la lutte, la boxe, le pentathlon et les courses de char. Le premier champion olympique connu fut le coureur Koroibos. Seuls les hommes étaient autorisés à participer aux Jeux de l'antiquité. Interdiction était faite aux femmes d'y prendre part ou même d'y assister, sous peine de mort. La seule femme présente était la grande prêtresse de Déméter. Toutefois, dans la Grèce antique, les femmes avaient leurs propres jeux, qui avaient lieu à intervalles réguliers.

On sait que les Jeux olympiques anciens existèrent pendant douze siècles, jusqu'à 394 après J.-C. C'est un Français né en 1863, Pierre de Fredy, baron de Coubertin, qui est à l'origine des Jeux modernes. Il estimait que le sport pouvait servir l'humanité et encourager la paix entre nations. Son projet se réalisa en 1894 lorsqu'un congrès international réuni à Paris vota en faveur de la rénovation des Jeux olympiques; les premiers Jeux de l'époque moderne eurent lieu à Athènes en 1896.

Les Jeux ont lieu tous les quatre ans. À partir de 1924, ils ont été divisés en Jeux d'hiver et Jeux d'été. Les Jeux d'hiver ont commencé à avoir lieu en alternance avec les Jeux d'été après 1992, car les petits pays ne pouvaient se permettre d'envoyer la même année des équipes aux deux Jeux.

Depuis leur rénovation, les Jeux olympiques d'été ont eu lieu successivement dans les villes suivantes :

1896 Athènes (Grèce) 1900 Paris (France) 1904 St-Louis (États-Unis) 1908 Londres (Royaume-Uni) 1912 Stockholm (Suède) 1916 annulés a cause de la Première Guerre mondiale 1920 Anvers (Belgique) 1924 Paris (France) 1928 Amsterdam (Pays-Bas) 1932 Los Angeles (États-Unis) 1936 Berlin (Allemagne) 1940 annulés en raison de la Seconde Guerre mondiale 1944 annulés en raison de la Seconde Guerre mondiale 1948 Londres (Royaume-Uni) 1952 Helsinki (Finlande) 1956 Melbourne (Australie) 1960 Rome (Italie) 1964 Tokyo (Japon) 1968 Mexico (Mexique) 1972 Munich (Allemagne) 1976 Montréal (Canada) 1980 Moscou (URSS) 1984 Los Angeles (États-Unis) 1988 Séoul (Corée du Sud) 1992 Barcelone (Espagne) 1996 Atlanta (États-Unis) 2000 Sydney (Australie) 2004 Athènes (Grèce).

Jeux d'hiver :

1924 Chamonix (France) 1928 St-Moritz (Suisse) 1932 Lake Placid (États-Unis) 1936 Garmisch-Partenkirchen (Allemagne) 1940 annulés en raison de la Seconde Guerre mondiale 1944 annulés en raison de la Seconde Guerre mondiale 1948 St-Moritz (Suisse) 1952 Oslo (Norvège) 1956 Cortina d'Ampezzo (Italie) 1960 Squaw Valley (États-Unis) 1964 Innsbruck (Autriche) 1968 Grenoble (France) 1972 Sapporo (Japon) 1976 Innsbruck (Autriche) 1980 Lake Placid (États-Unis) 1984 Sarajevo (Yougoslavie) 1988 Calgary (Canada) 1992 Albertville (France) 1994 Lillehammer (Norvège) 1998 Nagano (Japon) 2002 Salt Lake City (Utah).


La flamme olympique
Un coureur portant la flamme olympique, au temple de Delphe, Grèce, avant les jeux olympiques de 1936. Source : Library of Congress, Prints and Photographs Division, LC-USZ62-68245
Le symbole le plus visible des Jeux est la flamme olympique. A Olympie, durant les jeux de l'antiquité, une flamme sacrée brûlait continuellement sur l'autel de la déesse Héra. A l'ère moderne, la flamme olympique est apparue pour la première fois en 1928, aux Jeux d'Amsterdam. La tradition du relais du flambeau olympique, qui culmine avec l'allumage de la flamme olympique à la cérémonie d'ouverture des Jeux, remonte aux Jeux de 1936 à Berlin. Ce relais symbolise le lien entre les Jeux anciens et les Jeux modernes.

D'après : Eric Green, Données sur les Jeux olympiques (Les vingt-sixièmes Jeux olympiques se dérouleront du 19 juillet au 4 août à Atlanta, 18 juin 1996 (Agence d’information des Etats-Unis, Département d’État américain)

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Essentiel

Les Jeux Olympiques méritent notre attachement. Quelle autre institution peut leur être comparée? Aristocratiques à l’origine, ils ont atteint leur apogée au moment où la démocratie athénienne donnait le ton en Grèce. Ils ont ensuite survécu à l’empire d’Alexandre et à la domination romaine. Au XXe siècle ni les deux guerres mondiales, ni la guerre froide ne les ont à jamais compromis. Ils demeurent hélas! fragiles. De toutes les menaces qui pèsent sur eux la plus grave est l’importance croissante prise par l’athlète fabriqué par rapport à l’athlète naturel. Cette évolution défavorise démesurément les pays pauvres. Elle illustre aussi une vision du monde qui paraîtra de plus en plus inadéquate au fur et à mesure que les hommes comprendront qu’ils ont intérêt à composer avec la nature et à l’imiter plutôt que de la transformer en la déformant faute d’en avoir compris la complexité. L’avenir des jeux ne peut-être assuré que par le respect des principes qui assureront celui de la planète. On peut dire des jeux actuels qu’ils procèdent d’une imitation de ce qui, dans les jeux anciens, correspondaient à l’esprit de la modernité. Pour assurer l’avenir, il faut d’abord chercher, dans le même passé, les éléments qui préfigurent le mieux les principes propres à assurer le développement durable aujourd’hui.)

Enjeux

Les Jeux olympiques sont une grande leçon de philosophie que l'humanité se donne à elle-même: Tels jeux, telle conception du bonheur, de l'homme, de la perfection...de l'amour. C'est vers le poète grec Pindare qu'il faut se tourner pour découvrir la philosophie correspondant aux Jeux Olympiques du premier âge. Pour comprendre la philosophie des Jeux de 2004 à Athènes, on pourra s'en remettre aux poètes officiels de la Société Radio-Canada.

Voici leur grand hymne, Jusqu'au bout, tel qu'il fut déclamé à la télévision de Radio-Canada, dans les minutes solennelles qui ont précédé la cérémonie d'ouverture des Jeux d'Athènes. Il d'un dialogue entre une femme et un homme, identifiés à des statues grecques anciennes.

« — Je suis un rêve de pierre, l'incarnation en marbre du sang qui coule et du coeur qui bat. Lourde, immobile, éternelle, je suis néanmoins l'image de la force, de la vitesse, de l'agilité des hommes et des femmes.

— Et moi je cours à travers les siècles pour porter le flambeau d'un idéal, le dépassement, la grande, la belle, la folle idée d'aller toujours plus loin, plus vite. Nous sommes allés sur la lune, bientôt nous irons sur mars, jusqu'aux étoiles. Nous irons jusqu'au bout.

— Pourquoi, pourquoi toujours aller jusqu'au bout?

— J'sais pas. C'est comme ça. Aller plus vite! Toute une vie pour grignoter des secondes, des centièmes, des millièmes de secondes, tous les jours! l'effort, la fatigue, l'angoisse, c'est notre grandeur. Six millièmes! Courir plus vite c'est grandir. Je n'aime pas les limites, je n'aime pas les frontières, je n'aime pas le temps qui emprisonne, je n'aime pas l'espace qui nous noie, je veux repousser le temps, maîtriser l'espace, échapper à la gravité, je veux aller au sommet de moi-même, je veux aller voir plus loin, plus vite, je veux voler. Je m'envole pendant quelques secondes, je vole. Des milliers d'heures d'entraînement m'ont donné des ailes. Quelques secondes, c'est une idée; après le premier pas de l'enfant, jusqu'à moi! Je vole.

— On ne sculpte plus le marbre. Nos statues sont en mouvement, relayées partout par des pixels, des images en couleur.

Vous voyez en direct la joie du vainqueur, l'agonie de ceux qui ont moins bien fait. Mais si c'était moi qui les avais faits, je serais fière de chacune de mes oeuvres. Vous êtes de la beauté du vivant. Je suis la fugitive beauté du dépassement, immortalisée dans le marbre. Et dans mon rêve de pierre, je rêve d'être vous et de voler encore. »

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