Caractère

Jacques Dufresne

 

Dossier en révision

Nous ne reproduisons pas ici les définitions des fondateurs de la caractérologie, Ludwig Klages en Allemagne et René Le Senne en France, uniquement pour contribuer à l'histoire de cette discipline, qu'on peut,en 2011, considérer comme morte. Cette mort, Ludwig Klages, précurseur de Le Senne, l'avait lui-même prévue: «plus la mécanisation avance, plus la personnalité(caractère au sens large) touche à sa fin»1 Privée progressivement de son objet la caractérologie ne pouvait en effet que disparaître; mais cette disparition n'est pas un fait divers de l'histoire des sciences, elle nous oblige à répondre à une question bien gênante: Est-il vrait que le caractère a tendance à disparaître?

La psychologie régnante aux environs de 1900  était essentiellement orientée vers les faits psychiques, indépendamment de la personne dans laquelle ils se déroulent. Cette psychologie qui prendra plus tard la forme du behaviorisme a continué et continue de se développer et la substitution du posthumain à l'humain comme objet ne créera pour elle aucun problème de méthode. On pourra facilement conditionner un robot, puisque le conditionnement de l'humain suppose sa réduction à sa dimension mécanique.

Comme la caractérologie et à peu près au même moment, la psychanalyse s'est  tournée vers la seule réalité concrète  où l'âme s'exprime: la personne humaine. Si la psychologie est vraiment,comme le mot le dit une science de l'âme, il faut que son objet soit telle ou telle personne. Idée que Gustave Thibon a brillamment exposée dans son ouvrage sur la caractérologie de Klages: «Klages définit le caractère comme la particularité distinctive d'un être. Le terme est pris ici dans son sens le plus étendu. En précisant un peu cette définition nous pourrons désigner par le mot caractère  la synthèse des qualités inséparables (sinon dans l'abstrait) et réciproquement solidaires qui, au-dessus de toute distinction d'ordre spatial ou numérique, confère à chaque créature une charge inaliénable d'irréductible originalité.»2 «Synthèse des qualités inséparables et réciproquement solidaires!» Une telle réalité complexe, soit dit en passant ne peut être étudié adéquatement que par ce qu'on appelle aujourd'hui approche holitisque, ce qui nous permet d'affirmer que la caractérologie klagésienne préfigurait les sciences de la complexité

Y aurait-il eu une érosion telle de la charge inaliénable d'originalité  qu'il est devenu impossible de l'étudier ou qu'il ne vaut plus la peine de le faire? Le déclin de la psychanalyse après celui de la caractérogie ne confirme-t-il pas cette hypothèse?

Notes

 Ludwig Klages, Les principes de la caractérologie, Delachaux et Niestlé, Neuchatel, Paris 150, p. 182

Gustave Thibon, La science du caractère, Desclés De Brouwer, Paris p.1

 

Définition de Klages

«Toute délimitation de la caractérologie doit s'appuyer sur la définition du caractère, mot à trois sens au moins, dont un seul cependant convient au langage scientifique. GOETHE , par exemple, use de son sens le plus restreint dans les vers souvent cités :

Le talent se forme dans le calme,
Le caractère se forme dans le courant du monde


et c'est toujours ce sens-là qu'on envisage lorsqu'on distingue les aptitudes intellectuelles ou artistiques, et d'une manière générale les qualités dont un homme est doué, en particulier son « génie », du « caractère » que l'on qualifie tantôt de « fort » ou de « faible », tantôt de « bon » ou de « mauvais ». La première de ces oppositions vise évidemment la volonté ; la seconde concerne la valeur morale des motifs. Caractère équivaut ici à « volonté morale » ; ce qui fait que très logiquement on appelle « manque de caractère » l'absence de tenue morale.

Mais l'emploi de ce mot dans une acception plus large — la seule qui entre en considération pour nous •— comprenant non seulement un côté de la personnalité mais la personnalité tout entière, ne rencontre pas non plus d'obstacle dans la langue usuelle. A la personnalité en général se rapportent par exemple l'opposition des caractères « différenciés » et « non-différenciés » et tout particulièrement celle en vogue des caractères « normaux » et « anormaux »; opposition qui, quoiqu'elle semble concerner avant tout la vie instinctive, sert à distinguer aussi, entre autres et dans bon nombre de cas, les intelligences. Ainsi, cet usage fait coïncider caractère avec personnalité. Nous ne définirons d'abord ce dernier mot qu'en partie, pour le faire plus complètement après avoir étudié le sens le plus étendu du terme « caractère ».

Personnalité est le terme abstrait correspondant à celui concret de personne, et à ce titre il porte tout au moins l'indice de l'unité. Le dogme chrétien de la Trinité divine ne se serait pas heurté à une opposition aussi vive qu'elle l'a été quelquefois, s'il n'avait exigé qu'on se représentât en même temps Dieu comme une seule personne. Lorsque cette unité se perd de façon passagère (hystérie, somnambulisme, etc.), on parle avec raison d'une « scission de la personnalité ». L'unité en question tient non au corps, mais à la vitalité; en conséquence nous définirons provisoirement la personnalité comme une unité vitale ou un individu. Cette unité vitale, nous l'attribuons parfois à des choses; et cette constatation nous conduit à la troisième signification du mot « caractère ».

Cette locution : deux personnes vivent comme chien et chat, suppose l'incompatibilité des caractères de deux êtres auxquels personne n'attribuerait la « personnalité ». On parle de même du caractère d'un peuple, c'est-à-dire d'une chose composée d'un grand nombre de personnes; et rien ne nous empêche de parler en outre du caractère du dialecte de ce peuple, du caractère d'un édifice, d'un paysage, et même du caractère d'un phénomène quelconque tel qu'une tempête, un orage, la Révolution; enfin du caractère d'abstractions telles que le nombre, la ligne, l'unité, la géométrie, la monarchie. A l'opinion qu'ici caractère signifie propriété, on peut opposer que toutes les propriétés du désert, comme par exemple son étendue, ne font nullement partie de son caractère, et que, pour caractériser un objet, nous préférons certaines marques distinctives à d'autres dont nous nous servons moins volontiers. Après tout, si l'on se contente de comparer des locutions comme « le caractère du désert » et « la constitution du désert », on sentira que la première est, dans une certaine mesure, poétique, en ce sens qu'elle doue le désert de vie intérieure comme s'il était un individu.

L e fait que nous pouvons parler du caractère des choses inanimées, dévoile en réalité une partie de notre préhistoireNA l'origine on croyait animés tous les objets de l'appréhension, et cela en vertu d'un sentiment immédiat qui agit encore aujourd'hui avec force chez les enfants et peut se réveiller chez l'adulte dès que l'intellect critique s'assoupit. Toute appréhension consiste primitivement à saisir des unités vivantes, et la séparation du monde en une moitié morte et une moitié animée est l'effet d'une expérience qui vient plus tard et qui n'est jamais entièrement achevée. L a langue nous a conservé ce stade préhistorique en décrivant des événements innombrables du monde extra-humain des perceptions, voire des choses inertes, à la manière de processus vitaux et d'actions : non seulement la pluie « fouette » les arbres, mais le chemin « court » à travers le champ, et une maison « projette » son ombre 1 Nous y reviendrons plus loin; ici, le fait que l'usage de mots attribuant un « caractère » aux objets s'est conservé dans toute sa force, nous préparera à comprendre qu'il est impossible que l'âme humaine soit identique avec le fondement de la conscience. De même que chacun, sans aller jusqu'à affirmer que les pierres aussi ont une âme, aurait néanmoins pour cette idée une sympathique compréhension, de même nul n'admettrait qu'on parlât de la personnalité du caillou, de la plante ou du nuage, fût-ce en poésie. Il faut donc que quelque chose s'ajoute à l'unité vivante pour qu'elle devienne une personnalité.

Ce quelque chose, nous le découvrons en comparant à l'homme le degré de la Vie avec lequel il a le plus d'affinité, l'animal. Nous ne doutons pas que l'animal soit doué de sensations, qu'il ait des sentiments, des émotions, des tendances, qu'il rêve et qu'il reconnaisse ce qu'il a déjà vu. Mais nous doutons et nous devons douter qu'il ait conscience de lui-même. Il est vrai que chez lui, en tant qu'elle est une condensation de la Vie universelle, la vitalité est entre autres un processus d'appropriation, et ne cesse par là de tendre à la conservation d'un support finalement périssable; mais, parmi tous les actes que l'instinct de l'animal accomplit en vue de la conservation, de la prolongation et de la défense de la vie, il n'en est aucun qui nous oblige à admettre qu'il sache, comme nous, qu'il est mortel. L'hypothèse d'un instinct de conservation est moins une métaphore poétique qu'une transposition logiquement inadmissible à la Vie en général et particulièrement à la vie animale, de ce sentiment de l'existence qui est exclusivement le propre de l'homme. L a plante elle aussi reçoit sa forme, bien qu'à son égard nous devions douter même de la présence de quelque chose qui serait apparenté à nos sensations.

L a Personnalité n'est pas seulement une unité vitale mais, en outre, un Moi: elle est le Moi individuel; et la science qui s'en occupe est la caractérologie. — Ainsi, dès la délimitation de notre objet, sont placés devant nous deux éléments nettement séparés, sur lesquels nous nous appuierons plus tard pour développer avec méthode le système des mobiles. L'un est la base de lois générales suivant lesquelles des objets de la pensée, indépendants des personnes, proviennent de processus vitaux. A cette activité purement « régulatrice », la matière est fournie par le second élément créateur que, suivant un usage très ancien de la langue, nous appelons l'Ame; en suite de quoi le Moi personnel (= Soi individuel) ressemble à une combinaison chimique : celle de l'Esprit général avec une Ame toujours particulière.


Nous terminons nos réflexions sur la définition de la Personnalité en mentionnant un fait dont la force de persuasion est connue : le nom même de ce concept indique la dualité de ses éléments significatifs ! « Personne » est en latin « persona », qu'on a fait à tort dériver de « personare » = retentir à travers; c'était à l'origine le masque à travers lequel l'acteur antique déclamait, puis le rôle qu'il interprétait, et enfin le « caractère », la « personnalité ». Ainsi la désignation de la nature humaine s'est attachée au nom latin du masque tragique, qui ne vit que lorsque s'élève la voix de l'histrion! Passons sur l'indice utile que peut fournir à la métaphysique de la dualité en question cette dualité particulière, et contentons-nous de retenir que le sens primitif de « personne » comprenait en effet deux choses : un masque inanimé en lui-même, et une voix retentissant au travers et qui dans le drame primitif signifiait la voix d'un dieu.

Source:   Ludwig Klages, Les principes de la caractérologie, Delachaux et Niestlé, Neuchatel, Paris 150, p. 9-11

Définition de René Le Senne, auteur du Traité de caractérologie publié aux Presses Universitaires de France en 1945.

A) Pour commencer par celui du mot même de caractère, il est indispensable de l’enlever à l’indécision avec laquelle il est utilisé, non seulement dans le langage commun, mais même dans la litté­rature psychologique. Tantôt ce qu’on appelle le caractère, c’est la nature d’un individu, souvent sans préciser si l’on signifie sa nature congénitale, non acquise et durable, ou au contraire cette seconde nature qu’il a gagnée et s’est faite en vivant. Tantôt c’est le résultat éventuel du développement d’un individu, quand par exemple l’on dit qu’il faut « former le caractère ». Tantôt enfin on accentue encore le sens moral du mot en appelant caractère, non ce qu’est l’homme ou ce qu’il sera éventuellement, mais ce qu’il doit devenir : ainsi on accuse d’être « sans caractère » un homme qui, au sens psychologique, a bien un caractère, mais, au sens moral, manque de l’originalité qu’on lui voudrait, n’« est pas un caractère ».
Pour éviter dorénavant toute confusion nous fixerons rigou­reusement le sens du mot caractère : dans tout le cours de cet ouvrage, caractère signifiera l’ensemble des dispositions congénitales qui forme le squelette mental d’un homme.

Cette définition rassemble trois éléments :

 
a) Le caractère n’est pas le tout de l’individu, c’est seulement ce que l’individu possède comme la résultante des hérédités qui sont venues se croiser en lui. Avant le caractère, dans le temps et dans l’espèce, il y a eu le jeu mendélien des apports fournis par les ascendants du nouveau‑né : le résultat c’est une structure foncière où les hérédités issues des parents lointains ou prochains se sont non seulement juxtaposées, mais composées de manière à engendrer une individualité à la fois semblable aux autres et différente d’elles. D’après la définition qui en suit, il n’y a rien dans le caractère qui ne soit congénital, né avec l’individu, constitu­tif de sa nature première. En est exclu tout acquis, c’est‑à‑dire tout ce qui dans l’individu provient de son histoire, soit que l’on considère dans cette histoire les actions subies par lui, comme l’éducation, les enseignements de l’expérience, soit que l’on se réfère aux effets produits par l’action, spontanée ou volontaire, de l’individu sur lui-même.


b) Ce caractère est solide et permanent : il assure à travers le temps l’identité structurelle de l’individu. Il crible les influences que celui-ci subit et, au cours des transformations de la vie mentale, il constitue le fond, le tuf dur, qui n’évolue pas, mais conditionne l’évolution psychologique. Quand, revoyant un ami après plusieurs années, nous nous écrions devant une de ses réactions caracté­ristiques : « Il est bien toujours le même ! » cette réaction est dans son fond une manifestation de son caractère.

c)Cette armature est mentale, mais elle n’est que le squelette de la vie psychologique. On exprime la même idée en disant qu’elle se trouve située aux confins de l’organique et du mental. Le caractère achève le corps et conditionne l’esprit. Le corps s’indi­vidualise dans le caractère qui en est l’unité la plus haute ; et le caractère clive l’histoire mentale de l’individu.

   Source Traité de caractérologie publié aux Presses Universitaires de France en 1945. Disponible en version électronique libre de droits.


Définition d'Alain

"Le caractère est littéralement une marque reçue du dehors. Naturellement l'empreinte dépend aussi de l'être qui la subit. Il est donc vrai de dire que le caractère enferme le tempérament et l'humeur; mais ce n'est pas tout dire. Un homme très vigoureux, très puissant, a souvent plus d'humeur que de caractère. Le caractère c'est l'humeur contrainte. Par exemple un horloger d'humeur impatiente prendra un caractère, par la lutte entre ses mouvements naturels et les actions de son métier. De même un militaire d'humeur inégale prendra du caractère. Le caractère est ainsi la marque du métier sur un tempérament et une humeur qui résistent au métier. Le caractère exprime donc bien la nature, mais par une lutte des circonstances contre la nature; et c'est surtout par la famille, le négoce, la fonction que les circonstances contrarient notre nature. Notre caractère doit donc beaucoup à la société; notre nature explosive, ainsi comprimée, est ce qui porte un caractère. Dans une vie sauvage, il y a plutôt de l'humeur. Un grand esprit comme Beethoven a seulement de l'humeur. En Gœthe, au contraire, le corps sait saluer; aussi la nature ne s'y montre que par ruses et voies détournées.

L'humeur fait bosse; on la lit aisément; on peut la manier physiologiquement; par exemple un fauteuil large à un homme gros, voilà un remède à l'humeur. Mais le caractère est fait d'humeur déguisée, de colère rentrée, de haine différée de désir transposé. Un être faible comme le petit La Baudraye de Balzac, dans la Muse, est une énigme souvent, parce que, ses ressentiments viennent de loin. Chauchard, maître absolu dans ses magasins, renvoyait toutes les femmes rousses; ce n'était qu'humeur. S'il avait dû vivre trente ans avec une femme rousse, peut-être aurait-il pris du caractère.

L'humeur n'a pas le temps de penser; elle crie, elle frappe. Le caractère pense beaucoup; il n'a d'abord que des pensées, ou, pour parler autrement, ses réactions sont toutes ajournées. C'est pourquoi il y a de la dissimulation en tout caractère, et toujours une teinte de tristesse. Une des choses qui assombrissent l'homme, c'est la promesse de souci qu'il se fait à lui-même, d'après une longue expérience; et ce souci à venir est déjà souci; c'est pourquoi un caractère marqué se défie même du bonheur. Et cette prédiction, comme toutes les prédictions de l'ordre moral, se réalise par sa propre puissance. Il n'est donc pas absurde de dire que l'homme est l'esclave de son caractère.

Seulement le commun langage, qui ne se trompe jamais, me redresse ici. Car, quand on dit d'un homme qu'il a du caractère, on entend qu'il sait vouloir, et qu'il ne se laisse point gouverner. À son tour, donc, l'homme de caractère va imprimer sa propre marque sur les choses et sur les gens. Il va gouverner, par son caractère; il va montrer constance, patience, ténacité. Mais on ne veut pourtant point dire que l'homme de caractère va subir l'événement. L'usage a rassemblé les deux sens en un mot, ce qui nous invite à réfléchir sur la puissance d'un caractère. Un homme énergique gouverne souvent par son humeur; il lâche sa colère à point nommé, et c'est ainsi qu'il meut la masse inerte des subalternes. Napoléon savait bien se servir de ses terribles mouvements d'humeur. Or un caractère est une arme, encore mieux que l'humeur. Vouloir changer son propre caractère est une de ces entreprises qui rendent triste, parce qu'elles sont vaines. Au contraire l'homme de volonté se reconnaît à ceci qu'il ne discute jamais devant la situation donnée, mais qu'il s'y établit et part de là pour la changer; de même il se prend comme il est, n'ayant point l'idée qu'un caractère est mauvais absolument ; en vérité l'on fait ce qu'on veut de son caractère, et sans le changer. Il est vain de souhaiter d'être grand si l'on est petit ; l'homme petit, à la salle d'armes, fait deux pas au lieu d'un ; en revanche, il est léger et offre une moindre surface. Cet art est subalterne. Mais c'est un grand art, et de même espèce, que d'agir avec toutes ses forces, telles qu'on les trouve ; ce qui suppose qu'on ne prononce jamais qu'on est par caractère incapable de ceci ou de cela. Les grands négociateurs ne sont pas moins forts par ce qu'on appelle leurs défauts. Il n'y a qu'à se rappeler ce que le père Grandet faisait de son bégaiement. Un timide, qui se sait timide, est bien capable de gouverner les autres par cela même. Et la manie du soupçon peut bien soutenir un genre de confiance; car on se sent gardé par soi. Il ne s'agit que de laisser le caractère à sa place, et l'humeur aussi; comme ces habiles, qui font outil de tout. Disons qu’avant de montrer du caractère il faut avoir un caractère.»

 


Alain, "LXXII. Le caractère (20 août 1931)", dans Esquisses de l'homme (1927); texte reproduit d'après la 4e édition, Paris, Gallimard, 1938. Le texte intégral de cet ouvrage est disponible sur le site Les Classiques des sciences sociales.



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