Actualité

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Temps

Jacques Dufresne

Qu'est-ce que le temps? «Si personne ne me pose la question, je sais; si quelqu’un pose la question et que je veuille expliquer, je ne sais plus.» (saint Augustin, Confessions XI, 14, 17). «Le temps est l’image mobile de l’éternité». Cette définition de Platon correspond au cadran solaire. La clepsydre ou le sablier sont le symbole du temps qui passe, du temps comme mesure...

Essentiel

« L'actualité est le bruit que fait le devenir en passant. »

PAUL-ÉMILE ROY

Enjeux

« L'actualité, c'est la nouvelle, ce qui fait oublier hier, c'est ce qui jaillit comme cela dans le paysage, sans avant ni après. C'est l'éphémère, ce qui surgit et s'évanouit. L'homme de la société actuelle fait l'expérience d'un temps qui n'est pas une continuité, mais un instantané. Le présent n'est pas une alluvion, comme dit le poète Maurice Beaulieu. Il n'est pas non plus prégnant du futur. Il est replié sur l'actualité. C'est le fait sans le sens. L'immédiat comme totalité.

On pourrait donc affirmer que ce qui explique pour une part le développement de l'inculture dans la société moderne et postmoderne, ce serait une expérience étriquée du temps. Le temps n'est pas pour nous une trame continue mais un pointillé, non un devenir, mais un instantané. Quand nous disons le mot " être ", nous ne pensons pas à un verbe, mais à un nom. Il n'y avait rien avant nous, il n'y a rien après. L'homme actuel est inédit. Ce qui existait avant lui est déconsidéré, caduc, n'est pas valable pour lui.

Les retentissements de cette expérience du temps dans le champ de la culture sont incommensurables. L'histoire est discréditée évidemment, parce qu'elle n'existe pas. Elle est comme un phantasme, une évasion dans le non-être, ce qui explique qu'il suffit que vous évoquiez une perspective historique pour vous faire traiter de nostalgique, d'esprit passéiste. L'histoire a été discréditée depuis une vingtaine d'années, non parce que nous vivons au présent, mais parce que nous vivons dans l'actualité, le fait brut. Le présent, pour peu qu'on s'y arrête, est le lieu de l'être, du temps, du devenir, entre le passé et l'avenir. Il a un sens. L'actualité est le bruit que fait le devenir en passant.

Les modernes, disait Péguy, croient au miracle. Ils pensent que les événements se produisent comme cela, spontanément, sans préparation. Ils croient à la génération spontanée. Ils croient qu'on peut récolter sans semer, savoir sans apprendre. Ils ne sont pas conscients des lentes préparations qui s'effectuent dans le temps et arrivent un jour à maturité. Les modernes sont loin d'être débarrassés du prestige de la magie. Ils pensent bien plutôt que tout se fait par des automatismes, en suivant des recettes, des modes d'emploi, en pressant un bouton. »

PAUL-ÉMILE ROY, Propos sur la culture, Brossard, Humanitas, 1997, pp. 28-29.

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